26 : Varlok, Second des Cinq

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L'arène de la cour ne pouvant contenir les six toises de longueur du Dragon, il fut donc convenu que l'affrontement se déroulerait hors des murs du Castel.
Une silencieuse procession passa donc le pont-levis pour rejoindre le Dragon, patientant sur la grande place de ce qui avait dû être le faubourg du château avant de tomber en ruine.

Témeriel servirait de témoin pour le Second.
Aliénor serait celui de Paulin.
Seuls les plus hauts gradés des troupes de Varlok présents à Rocacier furent autorisés à assister au duel. Huit, en tout, comptant les deux témoins.

Les deux adversaires se placèrent l'un en face de l'autre, sous un ciel de flammes parfaitement dégagé. Plus loin, les feuilles des arbres arboraient les mêmes couleurs, comme si le monde entier se consumait.
Les souffles retenus, seules les paroles du vent balayaient les ruines et l'arène.

Paulin était droit. Du moins s'efforçait-il de le rester, de garder un regard constant et de ne pas perdre espoir.
Malgré son épée, il avait le sentiment d'être un condamné face à son bourreau.

Noble et serein, le bourreau en question attendait, presque immobile. Chacune de ses inspirations attisait son brasier tel un soufflet infernal, allumant entre ses plaques d'armure une lumière rouge sang qui s'estompait lentement à chaque expiration. Sur son crâne reptilien, cinq splendides cornes d'or pur scintillaient. Les légendes racontaient qu'elles avaient appartenu à cinq héros, ayant affronté Varlok lors du Jour de la Brèche.

Bien que juché à cinq toises de hauteur, le regard du Dragon n'avait rien de hautain. Rien de méprisant. Rien de moqueur.
Il jugeait, en silence, et rendait à chacun son jugement.

Paulin ferma les yeux et se concentra. Tirant sa lame, il initia le duel en prononçant ces mots :
« Moi, Paulin Destoisons, Choisi par la Pureté et l'Espoir, n'affronte pas aujourd'hui que l'un des Cinq. Je me dresse aujourd'hui contre la Tyrannie Draconique, contre le Joug de la Brèche, et contre la Guerre. Varlok de la Brèche, je vous défie.

Le Dragon releva son cou d'acier, et répondit ainsi :
— Moi, Varlok de la Brèche, Second des Cinq, Avatar de la Guerre et Conquérant d'Or, ne souhaite ni la souffrance, ni la destruction, ni la mort, ni la peur. Je ne souhaite pour chacun que le plus grand des Honneurs.
Pour le mien comme pour le vôtre, Paulin Destoisons, je relève votre défi. »

Le duel avait donc débuté, et ne pouvait s'achever que dans la mort ou l'abandon de l'un des deux adversaires.

Paulin avança prudemment, épée en main, tandis que Varlok mouvait une à une ses pattes forgées d'acier et de lave, les enfonçant profondément dans le sol de pierre afin d'y trouver un appui.
Il ne fit rien pour empêcher Paulin de s'approcher de lui.
Il inspira profondément, comprimant sa puissance au sein de sa fournaise, puis déploya en un instant ses vertèbres de métal.

Paulin n'eut pas le temps. Ni de se jeter sur le côté, ni de se plaquer au sol, ni même de jeter un dernier regard vers Aliénor.
Il ne put qu'à peine élever sa lame entre lui et le monstre.

Quand le Dragon ouvrit sa gigantesque gueule, un torrent d'enfer noya la frêle silhouette du chevalier, calcinant roches et briques dans un souffle brutal, et ce sur plusieurs toises.
Le jet conserva un débit constant, aussi puissant que cauchemardesque, durant une dizaine de secondes de bourrasque carbonisante.

Aliénor laissa s'échapper un cri d'effroi, qu'elle tut en plaquant ses deux poings devant sa bouche. Témeriel, lui, ne put contempler le brasier plus de deux courtes secondes, et détourna le regard en silence.

Enfin, Varlok referma sa mâchoire, ferma les yeux, et baissa humblement sa tête en signe de recueillement envers un digne adversaire.
Il ne rouvrit ses paupières d'acier que quand il entendit des pas rapides et un hurlement de rage devant lui.

Ainsi qu'il fut ÉcritOù les histoires vivent. Découvrez maintenant