XV. Avis de tempête (1/2) - réécrit

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 Postés en haut des marches sur le pont, les jumeaux découvrirent un paysage tout bouleversé. C'était un flot de marée humaine, rien à voir avec les quais calmes des promenades dominicales : on ne voyait plus les pavés tant la foule était dense.

– J'espère que Brume ne s'est pas fait griller par Léandre. Elle devrait déjà être là, non ?

Ils scrutèrent la rame de métro qui filait sur le pont. A travers la vitre, Brume leur fit de grands signes. Millie et Liam s'approchèrent de la station et la jeune adolescente se rua vers eux sans considérer la dame qu'elle venait de bousculer.

– Alors ?! demanda-t-elle sans préambule.

– Nous n'avons pas appris grand-chose. Les marins de l'Artémis nous ont confirmé que Sylvère représentait bien une menace, mais ils n'ont aucune idée de ce que le 7 juin représente. Et toi ?

– J'ai attendu presque trois heures à l'angle de la rue, sans quitter des yeux l'entrée des Trois Fontaines, et pas un signe de Léandre !

Liam triturait sa lèvre, en pleine réflexion.

– Sûrement un week-end où il ne restait pas à l'institution. Et d'un côté, s'il prépare quelque chose, valait mieux qu'il le fasse sur un autre territoire.

– On peut donc penser que l'intégralité des Trois Fontaines n'est pas concernée.

– Ce serait bizarre, et trop gros ! Je n'exclue pas Mauric. Mais les autres élèves et professeurs ne peuvent pas tous être impliqués.

Brume et Millie hochèrent la tête.

– Pitié, faites qu'on ait complètement craqué ! espéra Liam.

Le trio s'enfonça dans la foule qui descendait les marches du pont. Le ciel clair n'offrait aucune ombre.

– On se croirait dans un four ! pesta Brume en soulevant son T-shirt pour créer une brise illusoire.

– Allez, suivez-moi ! Le quai des ancres, c'est juste après le glacier !

Le lieu de rendez-vous à l'embarcadère avait été fixé à onze heures. Ils avaient bien fait de prendre de l'avance car un bon quart d'heure de marche les attendait malgré la courte distance ; les touristes en nombre ralentissaient leurs pas.

– Liam, reste près de moi ! Je ne veux pas qu'un autre me colle avec sa sueur, beurk...

L'étouffante chaleur faisait luire les fronts de tous les passants.

– Le temps se gâte, constata Brume en montrant les nuages approchant au loin.

– S'il pleut, ça ne sera pas plus mal. J'étouffe !

– Arrêtez de parler météo, et jetez un œil autour de vous !

– Liam, que veux-tu qu'on déniche dans ce foutoir ?

– Regardez là-bas ! s'exclama Brume.

– Nom d'une époclade ! Lupin de Fondeterre !

Ils n'eurent pas tant le temps de réfléchir, la foule les entraînait vers lui et le jeune protégé de Mauric ne tarda pas à les reconnaître. On ne croisait pas la chevelure argentée de Brume à tous les coins de rues.

– Alors, on est perdu, les morpions ?

– T'as rangé tes poings ? se moqua Liam.

– Si t'en redemandes, va pas falloir me chauffer longtemps ! menaça-t-il.

Les touristes à proximité se tournèrent, se demandant si Liam et Léandre étaient des potes qui se charriaient. De toute façon, toute entreprise quelle qu'elle soit était impossible dans ce flot continu.

– On peut savoir ce que l'on t'a fait ? Tu ne nous connais même pas ! demanda Millie.

– Si on ne peut plus s'amuser avec les nouveaux...

– Hilarant ton humour, piqua Brume.

Il serra la mâchoire. Ils s'approchèrent de l'arche du pont, où les passants étaient moins serrés.

– Vous faites aussi votre sortie scolaire ici ? demanda Millie.

– Je crois que toutes les écoles de la ville sont là, ironisa Léandre.

– Qu'est-ce que tu fais tout seul, alors ?

– Je t'intéresse, blondinette ? répondit-il à Liam.

Le jeune Poppy leva les yeux au ciel.

– Je n'aime pas la foule et je préfère être en avance.

– Millie, Liam, rejoignons notre classe. L'heure tourne...

– Vous me manquez déjà, lâcha-t-il, désinvolte.

Ils s'éloignèrent sans un salut pour Léandre.  

Gemini PoppyOù les histoires vivent. Découvrez maintenant