Chapitre 11 : Le Tueur de Mawario

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   Il était quinze heures, le Soleil était haut dans le ciel et la température était agréable. Nombreux étaient ceux qui en auraient profité pour prendre l'air si la semaine n'était pas inachevée. Le Dr Arthur Dorf était satisfait de ce moment : il pouvait profiter de la luminosité gratuite tout en étant payé pour écouter les derniers ragots qui allaient apporter encore plus d'argent. Il aimait être psychologue. Son rendez-vous actuel, Aidia Cosmoss, était une lycéenne blanche aux formes très avantageuses (pour le plus grand plaisir du Dr Dorf), les cheveux châtain sauf la frange qui était teinte dans le même rouge que le psychologue arborant trois barrettes en forme de lettre ("I","D" et "A"), qui écrivait des romans très populaires exprimants à la perfection sa paranoïa. Vendre les informations de cette patiente était beaucoup plus rentable que pour des anonymes à la foule. Sans l'ombre d'un doute, le jour préféré du manieur de Rumour Has It était le jeudi.

«-Pourquoi ne réponds-tu pas à ma question, ma petite Aidia ?
-Si des journalistes venaient à entendre ma réponse, je ne pourrais plus aller au lycée…
-Je suis tenu par le secret professionnel, tu le sais bien.
-Je sais mais Ruwa m'a dit que c'était peut-être vous qui aviez déjà partagé tous mes secrets à la presse.
-Mais ton frère n'en est pas sûr alors que moi, je suis certain de mon honnêteté.
-D'accord… C'est de Brian que je suis amoureuse.
-Brian ? Mais je croyais qu'il était déjà en couple avec Michael !
-En fait, ils se sont séparés parce que Brian a fait son coming out hétérosexuel.
-Les hétérosexuels refoulés, c'est tellement rare.
-En même temps, ils ne sont pas victimes de discrimination.
-La discrimination est un tel fléau, de nos jours… Et dire que c'était pire avant...»

   Cette consultation s'annonçait être très payante pour le psychologue. Malheureusement, elle n'était pas éternelle, il fallait rencontrer le patient suivant, Michael, l'ex petit ami de Brian. Mais quand il se présenta dans la salle de consultation, il n'avait pas la même aura qu'habituellement. Son visage semblait un peu déformé, son corps était beaucoup plus imposant et sa démarche silencieuse. Il était un tigre à l'affût, prêt à tuer en un éclair. Sans l'ombre d'un doute, ce n'était pas la même personne mais un usurpateur. Le Dr Dorf voulait vite se débarrasser de lui, il était effrayé. Il croyait entendre du sable se déverser, peut-être était-ce le sablier qui décomptait avant sa libération ou alors sa mort.

 Mais l'usurpateur s'assit d'une manière étonnamment naturelle, toute la crainte avait disparu pendant ce mouvement avant de revenir d'un coup. C'était un avertissement : il avait la capacité de se faire passer pour n'importe qui et de tromper même un psychologue. S'il y était obligé, il pouvait tuer. Il n'avait aucune volonté de cacher ses intentions. Le bruit du sable était insoutenable.

«-Je ne suis pas Michael, je l'ai tué.
-Tu n'avais pas besoin de le préciser.
-La ferme ! C'est moi qui parle !»

   Cette réplique causa immédiatement un tonnerre de silence, même le sablier était couvert par ce non bruit étouffant. Le psychologue ne pouvait plus s'entendre penser.

«-Tu peux m'appeler the Flow. Je suis celui qui a dératisé le gang qui se pavanait trop avec sa connaissance de l'impulsion. Je peux voir à ton visage que ce pouvoir t'est familier. Tu es très talentueux pour manier les informations alors tant que tu n'attires pas l'attention des autres Aborigènes, j'acceptes de t'épargner et même de te protéger.
-J'ai déjà donné ma fidélité à un autre maître de l'impulsion, je sais pas si elle va accepter que je joue sur deux tableaux.
-MAIS FERME TA GUEULE ! Mégane Itari est discrète à sa manière. On ne s'en rend pas vraiment compte mais elle ne risque pas de dévoiler le moindre secret sur notre culture. J'ai aucune raison de la tuer. En plus, elle est le meilleur appât pour faire apparaître la fameuse voix du téléphone.»

  Le bruit de sablier avait disparu, le tueur allait enfin partir. Il donna un léger coup avec son doigt sur le mur et ce dernier s'effondra, il n'y avait plus que de la poussière sur le sol.

  C'était donc ça, un véritable maître de l'impulsion, un être capable de manipuler sa présence, les informations, la matière. Stephen allait avoir du mal à défendre la ville de ce fou.

La Baleine de Mawario (Premier Jet)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant