Poliroid (Bigflo & Oli)

10. « Je suis partie avec lui pour te protéger. »

Alec se lève de sa chaise pour mieux apercevoir ce qui se passe. De mon côté, un seul coup d'œil m'a permis de voir qui a déchaîné ces filles. Mais qu'est-ce qu'il fait là, bon sang ? J'ai beaucoup de mal à croire à une coïncidence.

— Tu sais ce qui se passe ? me demande Alec.

Je me concentre à nouveau sur lui, ayant échappé de peu à un baiser de sa part. J'essaye de cacher mon sourire, mais je n'y parviens pas. Et c'est l'incompréhension sur son visage. Forcément...quel genre de fille sourit alors que le moment du baiser n'a pas eu lieu ? Seulement les filles qui s'appellent Charline et qui sortent en semaine avec leur ex.

— Juste un groupe de fans heureuses de voir leur idole, je réponds calmement.

— Y'a une star ici ? Qui c'est ? s'exclame le garçon assis face à moi.

Je rêve ou il fait comme s'il n'avait pas été coupé dans son geste ? En fait, il m'a sorti, comme à son habitude, son beau discours de parleur et dès que quelque chose de mieux se présente, il laisse tomber la fille. Je suis vraiment stupide d'y avoir cru un minimum.

— Star peut-être pas, mais il est...je commence.

— Mais c'est pas le type que t'écoutais là ? Ouais, le barbu qui chante avec son frère ! C'est quand même de la merde leurs chansons, me coupe Alec qui visiblement a décidé de retrouver son rôle de con.

Je n'ai même pas envie de lui répondre. Déjà, il se permet de couper la parole, alors que quelques minutes auparavant il était prêt à se mettre à genoux pour me récupérer. Ensuite, il est en train de critiquer les deux seules personnes qui m'ont aidé à sortir du gouffre dans lequel il m'a jeté il y a deux ans. Je suis prise d'une soudaine envie de lui en coller une.

— Charline !

Comme si j'avais pas déjà assez de problème, voilà qu'il débarque à son tour. Ils veulent pas dîner ensemble quand même ? Moi, je me tire.

Je me retourne et vois Oli arriver en marchant d'un pas sûr jusqu'à notre table. Et déjà, il m'a vraiment reconnu de dos ? Parce que je l'ai regardé un quart de seconde, alors ça m'étonnerait qu'il ait vu mon visage.

— Hum...salut, je parviens à dire.

Génial. En plus de devoir me battre contre une nouvelle angoisse, je me trouve assise en face de mon ex. Je ne pouvais pas rêver mieux pour un mercredi soir.

— Et tu es...? poursuit Oli, en regardant Alec.

Je n'ai absolument pas envie de voir ça. Sérieux ? Une discussion des plus banales entre un garçon que j'admire et mon idiot d'ex petit-ami. Je recule ma chaise d'un geste franc, récupère mon sac et ma veste, puis adresse un faible sourire avant de sortir en courant du bar. Une fois arrivée dehors, je me pose contre le mur du bâtiment et inspire un grand coup. Cette soirée était pire que je n'aurais pu l'imaginer.

Oli sort quelques secondes après moi. Et je ne sais pas si c'est l'angoisse qui m'a fait agir, mais je me jette sur lui, l'attrape par le bras et l'emmène loin de là, au cas où Alec viendrait à débarquer juste après et réclamer des explications. Malheureusement pour lui, j'en ai aucune à fournir pour le moment. Je suis en rupture de stock d'excuses. Mais je suis débordante de colère et sous le choc.

— C'est courant chez toi d'interrompre les gens qui sont sur le point de dîner ? je lâche en colère.

Il a l'air aussi surpris que moi. Je viens vraiment de faire une phrase cohérente, sans balbutier ? Impossible. Ce n'est pas moi qui parle. C'est juste la personne en colère qui vit en moi.