Esprit

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 Je m'approchais de Hakann, qui frissonnait de douleur.

Je le recouvrais d'une couverture propre et épongeais son front, repoussant ses mèches derrière ses oreilles.

Sa peau avait repris de la couleur et mon cœur s'était desserré.

-Merci beaucoup, Nova, susurra-t-il.

Je lui souris, essuyant son cou.

-Je sais pourquoi tu es là.

-Et pourquoi donc ? Répondis-je.

-Tu devrais être avec les tiens, mais tu es ici avec moi, lança-t-il sur le ton du reproche.

Je soupirais.

-J'ai appris que tu étais blessé alors je suis venue. Mais je ne m'en cacherais pas, Hakann. Oui je t'aime bien et...Quelque chose m'attire vers toi sans arrêt.

Il garda le silence quelques secondes, puis déglutis avant de souffler.

-Alors c'est donc réciproque.

J'eus envie de sautiller, de courir, de hurler de joie mais non seulement mon corps était trop faible, le moment était également très mal choisi. Ses mots semblaient logiques. Soudain, tout prenait sens.

Je repensais à Sora quelque part dehors et soupirais.

-Quand est prévue la cérémonie ? Demandais-je en sortant son bras de la couverture pour en retirer le sang.

Il sut de quoi je voulais parler et fixa le plafond quelques secondes.

-Dans un mois, lâcha-t-il, las.

-Pourquoi un mois ? Cela fait longtemps que vous vous connaissez, dis-je après avoir dégluti.

-Je sais, mais je trouve toujours quelque chose pour repousser l'heure fatale. A la base, nous devions être mariés bien avant le printemps, dit-il avec un rictus.

Je ne pus m'empêcher de sourire et plongeais dans ses prunelles, posées sur moi.

Il n'avait jamais ce regard doux et compréhensif.

-Je ne veux pas rester, Nova.Voila pourquoi je repousse.

-Quoi ? M'exclamais-je en bandant une de ses blessures.

-J'ai toujours voulu rejoindre la Garde. C'est rare, mais possible. Mais je ne peux pas fuir mes responsabilités et partir...L'alpha m'a choisi.

Je tirais une chaise et m'installais à ses côtés après avoir replacé sa couverture.

-Que veux-tu dire par là ?

-Lorsque l'alpha se fait vieux et si personne ne l'a défié, alors il choisi quelqu'un qu'il juge à la hauteur et le défi dans un combat à mort. Lorsque nous tuons un alpha, nous prenons directement sa place.

J'avalais de travers et risquais de m'étouffer.

-Un combat à mort ? Es-tu fou ?

Aucune réponse.

Il se contentait de rire.

Ses traditions étant bien différentes des miennes, je devais passer pour une enfant fragile et lui, pour un guerrier barbare.

-Je ne peux pas partir, répéta-t-il.

-Bien sûr que tu peux ! Poursuis ton rêve et ne te laisses pas retenir ici si tu n'y es pas heureux...

Jenny m'interpella et me demanda de rentrer à la maison, ce qui m'irrita au plus haut point.

Je voulais rester ici et parler avec lui des heures durant.

Nous nous regardâmes intensément pendant quelques secondes et les fourmillements réapparurent, dans tout mon corps cette fois.

J'hésitais, puis tendit la main vers lui et la posais sur sa joue.

Sa peau irradiait de chaleur.

-Reposes-toi et penses à ce que je t'ai dit.

Il hocha la tête et m'interpella lorsque je me relevais.

-Tu sais que nous ne pouvons pas être ensemble, hein ? Chuchota-t-il.

-Je sais, tranchais-je en me dirigeant vers la porte d'entrée.

Je saluais son père, qui nous remercia de nombreuses fois et partie dans la maison d'à côté.

Jenny était très faible, ayant même du mal à marcher droit.

Je la fis asseoir sur la première marche et partis toquer.

Une femme d'une quarantaine d'année ouvrit, un bébé dans les bras.

-Bonsoir, je suis...

-Une Fae ? Entres, je t'en prie.

Je hochais la tête et passais la porte pour tomber sur une exact réplique de la maison de Hakann.

Seul la décoration changeait quelque peu.

J'observais la pièce, plus remplie que l'autre et vit que beaucoup de membres de sa famille se trouvaient là.

En m'approchant du lit, je vis les deux camarades de Jenny, pâles et épuisées.

Elles reculèrent et partirent dans la cuisine.

Le Loup tourna la tête vers moi, me faisant signe de venir.

Tout comme Hakann, il semblait en grande souffrance.

Je l'avais déjà aperçu plusieurs fois. Il passait tout son temps avec Hakann et ils étaient aussi proches que des frères.

Il s'appelait Lumi.

Il avait toujours un air solennel et ses traits durs et marqués lui donnait un air innaprochable.

Sa peau était plus foncée et ses cheveux noirs étaient deux fois plus longs que ceux de Hakann.

Son torse était recouvert de tatouages, ainsi que son épaule gauche.

-Tu es Novaeh, dit-il d'une voix rauque.

-Oui. Est-ce que tu te sens mieux ? Lui demandais-je en regardant ses bras.

-Oui. C'est ma jambe qui avait le plus souffert. J'ai eu peur de la perdre, mais tes amies m'ont sauvé la vie. Je ne te remercierais jamais assez. Remercies Orla pour moi.

-De rien, c'est tout à fait normal. Mais c'est moi qui ai pris cette initiative ; Orla n'en sait rien.

Il haussa des sourcils surpris, puis se retint de sourire.

-Ce que l'on dit sur toi est donc vrai, tu n'obéis qu'à toi même, chuchota-t-il en réprimant une vague de douleur.

Sa main étant grande ouverte, je mis la mienne dans la sienne, qui en faisait pratiquement le double.

Il planta ses prunelles noires et froides dans les miennes et m'obligea à me pencher vers lui ;

-Vous souffrez d'une terrible perte. Nous aussi. Venges-nous tous.

Je pressais sa main avec force, partageant sa rage.

Destinée I : RisingOù les histoires vivent. Découvrez maintenant