Chapitre 15

157 20 12
                                    

Son portable vibrait, affichant le numéro de Claude à chaque fois, mais elle s'obstinait à ne pas répondre. Elle ne voulait pas entendre son excuse, ses explications ou encore une blague mal placée. Même si c'était stupide, elle désirait juste rester dans son cocon et se persuader qu'elle était toute seule, souffrant sans que personne ne le sache. Elle n'avait pas envie de faire l'effort, considérant en avoir déjà bien assez fait pour le moment. Elle refusait même d'écouter les messages vocaux qu'il laissait, et fini par éteindre son téléphone.

On frappa alors à sa porte et elle se redressa rapidement, fronçant ses sourcils, craignant que sa mère ne vienne une nouvelle fois la tourmenter. Cependant, sa mère n'aurait pas pris la peine de frapper et serait entrée directement.

- Qui est ce ?

- Kokuchu mademoiselle, je me permets d'entrer.

N'attendant pas son autorisation il entra, tenant un téléphone dans sa main droite.

- Vous semblez vraiment en piteux état, se moqua-t-il, si je ne vous connaissais pas je pourrais dire que vous êtes à deux doigts de pleurer !

Erine sentit le dernier verrou en elle exploser, et tout ce qu'elle avait contenu jusqu'à maintenant sur Kokuchu sortit. Elle avait presque l'impression d'être extérieure à tout cela, de constater les événements sans pouvoir agir. Pourtant, c'était sa bouche qui parlait, lachait des mots et phrases lourdes de sens et de douleur.

- Je ne veux rien entendre de vous, espèce de bon à rien ! Depuis que je suis arrivé au Japon vous ne faites que vous montrer irrespectueux envers moi, me traitant comme si je n'étais rien et vous moquant sans cesse ! Vous êtes incapable de comprendre la moindre petite chose qui se passe en moi et ne vous rendez même pas compte des conséquences de vos paroles ! Vous n'avez pas votre place ici ! Je ne sais même pas comment vous avez pu être recruté pour un tel métier au vu de votre comportement exécrable et répugnant !

Kokuchu encaissa dans un silence royal, mais toujours avec un fin sourire aux lèvres. Quand Erine termina sa tirade, il tendit le téléphone vers elle.

- Une personne désire vous parler.

- Et si je n'en ai pas envie, cracha-t-elle froidement en regardant le portable avec un œil mauvais.

- Je vous suggère vivement de répondre, cela ne pourras que vous aider.

Erine fronça les sourcils et hésita quelques secondes, avant de prendre le portable et le porter à son oreille.

- Bonjour Erine, cela faisait longtemps.

La jeune femme ouvrit de grands yeux, reconnaissant cette voix, cette tonalité.

- Jiyu.

Elle n'aurait jamais cru recevoir un appel de son cousin et encore moins dans de telles conditions. Etait ce un hasard ? Non, elle savait que Jiyu ne faisait rien au hasard. Il était tel un joueur d'échec, planifiant chaque mouvement en avance et anticipant l'adversaire pour le prendre à revers. Ainsi vivait son cousin.

- Je viens d'apprendre la situation par Kokuchu, ta mère semble te mener la vie dure.

- Hein ? Comment ça tu as appris par Kokuchu !?

Un petit rire échappa à son cousin, ce qui fit penser à Erine qu'il avait mijoté quelque chose dans son coin, comme pour changer.

- Je suis celui qui a engagé Kokuchu et qui l'a envoyé auprès de toi au Japon.

Erine tomba de haut et elle en perdit son latin pendant quelques secondes. C'était lui qui avait planifié cela ? Mais dans quel but. Que cherchait-il à faire en envoyant un incompétent pareil à ses côtés ?

- J'ai entendu ta petite tirade le concernant, et je vais en reprendre quelques points.

- Tu vas me faire la morale là ?

- Peut être bien, oui. Déjà, si tu veux obtenir le respect, tu dois toi-même en montrer aux autres. Penses tu que les gens ont envie de se montrer sympathique avec toi si tu te comportes en peste ? Bien sur que non. Alors oui, le peuple est à ta botte depuis ta naissance et les domestiques Kibo t'ont toujours répondu amen, à chacune de tes demandes. Regarde ce que ça a fait de toi, Erine. J'ai engagé Kokuchu pour te faire comprendre la réalité de ce monde. Il se comporte avec toi comme tu te comportes avec tout le monde.

Erine se mordit la lèvre, serrant sa main de libre.

- Ce n'est pas agréable, n'est ce pas ? Alors maintenant, tu peux te mettre à la place de tous ceux qui se prennent tes remarques. Tu peux les comprendre.

- Pourquoi tu as fais tout ça ! Je ne comprends pas !

- Erine, tu es bien plus qu'une petite princesse pourrie gâtée. Tu es une Kibo, et peu importe ce qu'en diras ta mère, ça ne changera pas. Tu es intelligente mais tu n'en fais pas usage. Tu es rusé et maline mais tu te caches derrière ton masque de suffisance. Ca suffit maintenant, montre à tout le monde qui tu es vraiment. Sois fière d'être celle que tu es, et vis la tête haute sans crainte. Comment crois tu que je sois libre ? J'ai usé de toutes les cartes que j'avais, je me suis hissé au dessus de mes parents et j'ai imposé ma propre loi.

- Je ne suis pas toi, toi tu as du talent, tu as tout ce que je n'ai pas !

Sa mère lui avait déjà dit mainte et mainte fois, elle n'arrivait pas à la cheville de son fantastique cousin. Lui qui était capable de rivaliser en intelligence avec l'héritière Rein était doué dans chaque domaine qu'il touchait. C'était un génie. Comment pourrait-il comprendre une fille comme elle qui n'avait rien de spécial ?

- Tu n'es pas moi, c'est vrai. Tu es Erine Kibo. Tu as tes propres talents, tes propres envies, tes propres objectifs. Pose-toi la question, veux tu être libre ou rester éternellement dominer par tes parents ?

La journée lui revint en mémoire, elle se souvint de cette sensation de liberté, du fait de ne plus rien ressentir comme pression, de pouvoir agir librement et sans entrave.

- Erine, sais tu ce que notre nom de famille signifie en japonais ?

- Kibo ?

Elle plongea dans ses souvenirs de révision, mais il ne lui semblait pas avoir déjà vu passé ce mot.

- Espoir, répondit-il à sa place, notre nom de famille signifie « espoir ».

- Espoir...

Cela fit frissonner son cœur et quelques larmes glissèrent sur ses joues.

- Ca me rappelle, souffla-t-elle, Jiyu ça veut dire « liberté », non ?

- Exactement, tu es espoir et la liberté te conseille de suivre ton cœur.

Elle eu un petit rire, c'était une belle métaphore qu'il lui faisait là. Mais ces quelques mots lui redonnaient courage et force. Il avait raison, elle devait se battre. Elle avait ses propres armes. Maintenant, elle allait prouver à sa mère ce qu'elle valait réellement.

- Jiyu, merci.

- Ah, c'est rare que tu prononce ce mot.

- Ne me le fais pas regretter.

Il rigola légèrement, avant de reprendre son sérieux.

- Bien, en tout cas si tu es réveillée c'est une bonne chose. Et n'hésite pas à demander des conseils à Kokuchu, il est mes yeux et mes oreilles dans cette maison. Et aussi désagréable soit-il avec toi, il reste un être humain.

- Ouais, je verrais, ne m'en demande pas trop non plus.

- Bonne chance Erine, et ne cesse jamais de te battre pour être libre.

Elle sourit et baissa le téléphone, entendant son cousin raccrocher. Oui, elle allait se battre pour sa liberté. Elle allait clouer le bec de sa mère. Mais avant, elle devait parler parfaitement le japonais et faire remonter ses notes.

- Tu vas voir Japon, je ne me laisserais pas vaincre. 

Un parfum envoûtant [Fanfiction IE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant