17. Dictature

52 5 0
                                    

Allongée de tout son long, Adrianna respirait lentement, les piqures consécutives de l'aiguille ne l'atteignant presque plus, étonnant Théo au plus haut point. Il n'avait jamais vu personne avec une aussi haute tolérance à la douleur.

Plus de deux semaines qu'ils ne sortaient pas, ne dormaient presque plus, mangeaient à peine et carburaient aux drogues. Ça commençait presque à lui plaire alors qu'Adrianna avait l'impression de vivre dans le déjà vu. Ils ne parlaient pas vraiment plus qu'avant. Leur quotidien se résumait à la cigarette, les tatouages et le sexe, rien de plus, rien de moins.

C'était malsain, pas besoin d'être un génie pour le comprendre, mais ils faisaient tous les deux les aveugles, c'était plus facile. De toute façon, la brune avait décidé qu'elle n'en démordrait pas, et pour Théodore, voir l'objet de ses fantasmes constamment à moitié nue n'était pas un réel problème.

En une quantité de jours limitée, il avait gravé sa peau de lettres, de mots, de dessins dont il ne connaitrait peut-être jamais la signification, mais savoir qu'elle lui faisait assez confiance pour lui confier cette tâche le satisfaisait.

Ils avaient commencés par tous les cycles de la lune de son mollet à sa cheville droite, puis une série de chiffres romains dans le cou, une croix à la base de son pouce, deux têtes de cerfs dans les paumes, une paire d'ailes stylisées au niveau de son foie, une texte entier qui semblait être une lettre à destinataire inconnu sur sa cuisse, un A stylisé derrière l'oreille et, le petit dernier pour le moment avait-elle dit « Forever Young » entouré d'une guirlande de roses sur sa cage thoracique.

Théodore travaillais sur cette « dernière » pièce depuis de nombreuses heures déjà, étant donné qu'elle voulait le faire en une seule session. Il avait bien essayé de lui expliquer que ça prendrait énormément de temps, que c'était une zone sensible qu'il valait mieux ne pas trop maltraiter, elle n'en avait eu que faire et avait exigé son tatouage, alors il tatouait. Une t   asse de café constamment remplie de nouveau posée à côté de lui, une cigarette entre les lèvres, il tatouait.

Il savait que les conditions hygiéniques laissaient à désirer et durant les premières heures, ça lui avait hérissé le poil, puis il s'était habitué. Il s'appliquait deux fois plus sur elle que sur une autre personne et s'assurait régulièrement qu'elle supportait. Lorsqu'elle s'était endormie alors qu'il tatouait sa nuque, il avait déduit qu'elle était carrément foutue en l'air.

Parles moi de toi. lâcha soudainement le brun

Il en avait marre de ne pas savoir, de ne pas comprendre, d'être si loin mais si prêt et peut-être qu'en fait, il suffisait de demander. Peut-être qu'elle avait juste besoin d'entendre qu'il voulait savoir pour lui raconter.

J'ai rien à dire, répondit-elle simplement

Bon, pour la compréhension de l'être humain, il repasserait.

Je suis à califourchon sur toi en train de te tatouer les seins et t'as rien à dire ? Tu te fous de moi ?

Sa réflexion la fit sourire et elle haussa les épaules, faisant tressaillir Théo qui lui avait formellement interdit de bouger.

Sérieusement Ad.
Quoi ? Qu'est-ce que tu veux savoir ?
Je sais pas. Pourquoi t'habites ici ? Ta famille, tu la vois jamais, pourquoi ? Est-ce que t'en as, même ? Avant moi, c'était quoi ta vie ? Ce genre de trucs ?
J'habite ici parce que c'est pratique et que ça me conviens, j'ai toute ma famille mais je la vois jamais parce que c'est comme ça et avant toi, ma vie, c'était ça mais sans toi. Rien d'extraordinaire, tu vois.
ça te convient sérieusement de vivre dans ce trou à rat ?
Oui, répondit-elle sur la défensive, et visiblement ça te plait à toi aussi puisque tu es constamment fourré chez moi.
C'est être constamment fourré avec toi qui me plait, fais un effort ok ?

Lorsqu'il réalisa ce qui venait de lui échapper, il eut vaguement peur qu'elle lui fasse la réflexion, mais elle fit comme si de rien était et enchaina.

Qu'est-ce que ça peut te faire de toute façon.
Rien. Je veux juste savoir. T'as des frères et sœurs.
Ouais, un grand frère.
Pourquoi tu le vois jamais ?
Parce que c'est compliqué avec ma famille. T'as bientôt fini ?
Oui.

La conversation s'arrêta là. C'était encore elle qui avait décidé, une nouvelle fois. 

InsomniaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant