Combien de jours encore ?

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Flashback :

Minuit, une heure du matin puis deux et il m'était impossible de fermer les yeux, de trouver le sommeil. Un mauvais pressentiment s'était emparé de moi ce soir là sans que je ne sache réellement pourquoi lorsque soudain un numéro inconnu avait fait son apparition sur l'écran de mon téléphone. Craignant d'abord qu'il s'agisse d'Harper qui me harcelait toujours à des heures indues, j'avais fini par presser le petit bouton vert au centre de mon vieux mobile.

... : Mlle Smith ?

Lenny : Elle même !

... : Je suis le Dr Cooper. Le médecin de garde, je suis en charge de votre mère !

Lenny : Qu'y a t il ?

Dr Cooper : Son état s'est détérioré ces dernières heures.

Lenny : Quoi ? Mais non... Ce n'est pas possible... J'étais avec elle pas plus tard que cet après-midi. Elle allait... Elle était...

Dr Cooper : Je suis désolée mais il vous faut venir si vous désirez...

La communication avait été coupée. Je n'avais pas attendu la fin de cette phrase pour me précipiter à son chevet, apeurée à l'idée que nos conversations de ces dernières semaines sur la vie, le monde et l'amour soient désormais une offrande au règne des souvenirs et de la mélancolie. Tétanisée de devoir faire mes adieux à celle qui était mon repère, mon phare et ma boussole. Paralysée à l'idée de devoir guider ma barque sans cet être merveilleux qui avait bâti la petite bonne femme fragile que j'étais devenue.

Fin du flashback.

De la même façon que ce jour dont ma mémoire se souvenait comme s'il avait eu lieu la veille, terrorisée à l'idée de perdre une personne essentielle à mon équilibre, plus indispensable à ma vie que mon propre souffle, j'avais accouru à New-York, ordonné à ma blonde de me rejoindre sur le parking de l'hôpital pour récupérer Bianca puis avait filé aussi vite que mes jambes pouvaient me porter jusqu'au hall d'accueil où une hôtesse m'avait indiqué la chambre 321. Cette chambre où se trouvait le détenteur de mon cœur.

Ces couloirs blanchâtres et austères semblaient ne jamais vouloir s'arrêter et je vomissais l'odeur aseptisée qu'ils dégageaient. Je les maudissais ces deux hommes, ceux qui avaient tout fait pour y trouver résidence, pour m'infliger cette panique constante et lorsqu'un visage familier fit son apparition à quelques mètres de distance du mien, je fus consumée par une foule de sentiments aussi confus qu'indescriptibles.

Je les voyais et les prenais en pitié ses traits tirés, ses cernes, son air inquiet dans ce costume hors de prix qui n'avait plus rien de reluisant. Je la voyais sa veste, froissée, ornée de larges auréoles qui se confondaient avec le tissu allant jusqu'à marquer sa chemise nettement plus claire. Ces traces que je pouvais imaginer être le sang de son frère. Ces tâches moins nauséabondes par leurs odeurs que par leurs apparitions sous mon œil averti.

Malgré moi j'étais devenue une machine, un objet à qui on ne demande pas de ressentir. Mon corps était devenu l'hôte d'une rage folle guidée par la peur que j'avais abrité durant ces interminables bornes qu'il m'avait fallu parcourir et ma partielle désolation devant son air si penaud, si coupable, n'avait en rien empêcher mon bras, autonome, de guider ma main au contact de sa joue dans un claquement brutal et violent.

Peut-être s'y attendait-il ou peut-être pas mais son visage avait gardé la position que je lui avais imposé par cette magistrale gifle durant ce qui était à mon sens une éternité et avant que je ne puisse recouvrir d'une main cette bouche, la mienne, que je voulais ode à la douceur plutôt qu'appel à la guerre, un bruyant sanglot s'en extirpa.

Son coeur contre le mien : is it love MattOù les histoires vivent. Découvrez maintenant