L'ultime symbole

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Dès le lendemain de son retour parmi nous, mon homme, mon ami, mon confident, collègue et amant, Matt, avait exigé de sortir de son lit sous l'oeil contrarié des médecins qui avait eu le loisir de découvrir un aspect ronchon de son caractère affirmé.

Il ne supportait ni la nourriture, ni la tenue légère dans laquelle il avait passé les trois quart de son temps depuis son arrivée et malgré mon inquiétude, je ne pouvais l'en blâmer. "Les infirmières se précipitent à mon chevet au moindre courant d'air !" Se plaisait-il à dire, s'amusant de ma jalousie tout en tournant sur lui-même pour que je puisse deviner, à travers une blouse entrouverte, certains de ses attributs parmi lesquels son joli fessier rebondi.

Il se plaignait également de la pièce bien trop exiguë à son goût et mourrait d'envie de remonter à moto. Moi, ça me faisait rire, parce qu'il était là, parce qu'il était lui et que ses pitreries étaient une des raisons premières à m'avoir fait tomber sous son charme. Longuement, je le regardais pianoter sur son mobile, tourner les pages d'un magazine ou faire la moue devant la "bouffe dégueulasse" de l'hôpital, me suppliant de lui trouver un burger par tous les moyens.

Chacun d'entre nous avait tenté de raisonner ce bougre d'âne, mais, ni notre petite troupe, ni le corps médical n'avait eu raison de sa détermination :

Docteur : Monsieur Ortega ce n'est pas raisonnable ! Avait dit le chef de service d'un oeil sévère qui n'avait rien intimidé son patient en le voyant revêtir son cuir après avoir clipser la boucle de sa ceinture. Il vous faut davantage de repos.

Matt : Docteur, avec tout le respect que j'ai pour vous et malgré ma reconnaissance envers votre service pour avoir pris soin de moi, je ne suis pas quelqu'un de raisonnable.

En effet, il avait voulu se dégourdir et par-dessus tout, prouver à chacun d'entre nous que son ego, pourtant bien moins encombrant que celui du chef de gang qui lui servait de famille, n'était pas qu'une fable, qu'une légende. Il avait une réputation à sauvegarder lui aussi et pas un seul de ses amis n'avaient échappé à cette information lui apparaissant comme primordiale.

Un premier malaise quelques jours après avoir retrouvé le calme de notre foyer m'avait pourtant effrayé, mais rien qui ne l'avait conduit plus loin que son canapé. Nous avions donc réappris à vivre sereinement. Nous délectant de voir Bianca grandir sous nos yeux, redécouvrant, avec une joie non dissimulée, le plaisir d'une soirée entre amis, d'un déjeuner en famille, d'un dîner en tête-à-tête, d'un film ou d'une nuit paisible.

Matt avait repris le chemin du travail quelques semaine plus tard, quant à moi, j'étais devenue, temporairement, maman au foyer. Ravie de pouvoir choyer les miens, rendant grâce, chaque matin, à ma bonne étoile de nous avoir permis d'être réunis loin du rouleau compresseur par lequel nous étions passés. Les projets s'enchaînaient, de travaux en déménagement, de week-end romantique en vacances aussi, mais la priorité était de voir se concrétiser un jour plus symbolique que tous les autres.

Il avait fallu six mois pour cela, mais nous y étions.

Devant le miroir d'une chambre d'hôtel somptueuse et bien plus luxueuse que celle à laquelle mes rêves, eux-mêmes, se seraient vu refuser l'accès, une larme silencieuse perlait au coin de mes yeux tout en observant la jeune femme derrière moi responsable de ma métamorphose, tout en l'écoutant me maudire de ruiner le sublime maquillage dont nos visages s'étaient parés, tout en la gratifiant d'une reconnaissance visuelle que les mots auraient entachés.

Son investissement pour faire de ce jour un instant aussi fabuleux que mémorable et sa bonne volonté n'avait pourtant pas réussi à me faire oublier l'absence de ma mère et pourtant la douleur de son départ m'apparaissait moins vive que quelques mois auparavant. Peut-être parce que, dans cette ville aux millions de possibles, j'avais enfin trouvé tout ce qui avait une valeur à mes yeux. Une famille dont ma demoiselle d'honneur faisait partie.

Son coeur contre le mien : is it love MattOù les histoires vivent. Découvrez maintenant