Les jours suivants, je passai de bons moments avec Alex. Il m'aidait à aller mieux. Même si je ne lui ait rien dévoilé à propos de moi ou de mes drames, j'ai découvert qu'il était une personne très sensée et affective. Mais malgré sa présence, je digère mal le deuil de mon amie disparue. Et il ne pourra rien y faire.
Peut-être qu'Océane aurait aimé que je poursuive mes études.
Je ne sais pas quoi penser. Je n'ai plus de rêves, sans mon amie, ils sont moindres. Je veux me laisser aller à la vie.Seulement, je ne pourrais pas payer mon loyer ou les prochaines factures. Je ne veux pas finir à la rue, et ce n'est pas le moment d'accumuler les erreurs. Sachant que je ne souhaite pas m'éterniser à l'université, je vais au moins me chercher du travail. Le soir j'épluche les petites annonces. J'envoie ma candidature en tant que coursière et serveuse dans la restauration.
Seule une des deux candidatures fut acceptée. Et après avoir passé un entretient, me voici maintenant pour ma première journée en tant que serveuse. Je fus prise même sans avoir fait une formation, ce qui est plutôt une chance.
Les débuts furent compliqués. Je devais enchaîner les tâches à un rythme effréné. Accueillir les clients avec de grands sourires chaleureux, servir, débarrasser. Encaisser l'argent. Puis en fin de journée nettoyer tout le restaurant. Laver le sol, les tables... Et le lendemain tout recommence. Mais qui a dit que ce serait simple ?
Je pars pour arriver vers 10h, et pendant ce temps préparais la salle complète. Avant que les clients n'arrivent, je suis partie un instant à l'extérieur. Je me rends de plus en plus compte que je suis une marionnette. Dirigée et contrôlée par les derniers événements. Comme si j'avais perdu ma propre raison.
Je sors un paquet de cigarette acheté la veille. Je m'étais jurée de ne jamais y toucher. De préserver mes poumons. Et pourtant, une soudaine envie de commencer m'a prise. J'hésite un instant, en ouvrant le paquet. Absolument rien ne m'y oblige, rien ni personne. Et peut-être qu'un jour, quand je n'arriverais plus à m'arrêter je regretterais. Je me munis de mon briquet, et allume la cigarette. Je prend une première bouffée, sans même tousser. C'est comme je me l'étais imaginé, et je ressens une fraîcheur mentholée. Cela semble apaiser mon stress un instant, mais peu de temps plus tard, il revient.
À la fin de la journée, je me sens mal. Comme si je m'étais moi-même humiliée. Je suis fatiguée, et je n'ai qu'une envie. Dormir.
Je jette le paquet de cigarette à la poubelle, dégoûtée de ne pas avoir tenu ma promesse. Je ne veux pas m'autodétruire. Mais après, c'est peut-être ce que je fais quotidiennement. Fumer tue mais vivre aussi.
Je m'allonge toute habillée sur le lit, et me recroqueville sur la couverture. Mon téléphone vibre en recevant un message. Comme par hasard, comme si le monde savait que je n'attendais que ça.
Alex : ça te dit de sortir ce soir à la fête foraine ? Je me vois mal y aller seul
Je souris en voyant son message.
Je me sens étrange vis à vis de Alex. Je ne le connais pas vraiment. Il ignore tout de moi, comme moi de lui. Pourtant, je me sens bien en sa présence. Peut-être que je ne devrais pas.
Je n'ai rien à faire, je n'ai plus d'amis. Il me propose une bonne occasion pour sortir. Je ne vois pas pourquoi je devrais refuser. Et puis, je lui en dois une bonne depuis qu'il m'a sauvée, ce jour là...
Je décide de lui répondre, ne voulant le faire attendre plus longtemps.
Moi :
j'ai vraiment hâte. C'est pour quelle heure ? Tu passes me chercher ?
Il me répond ensuite, et je lui envoie mon adresse. Je me dirige vers mon armoire, soudainement de bonne humeur. Jusqu'à ce que mes démons débarquent.
Océane aurait été ravie de m'accompagner et de rencontrer Alex. Je me serais tellement amusée avec elle... Seulement elle n'est plus là, enterrée six pieds sous terre. Et je peux m'en prendre qu'à moi-même. Evah aurait pu m'aider à choisir ma tenue. Mais elle aussi est partie. Encore une fois de ma faute. Je suis stupide, ingrate. Une tueuse. Une moins que rien. J'ai tout raté, tout foutu en l'air.
Le vide m'envahit. C'est avec un visage dénué d'émotions que je choisis mes vêtements ; un pull, une jupe, mes Dr Martens.
Alors que je me maquille légèrement, j'hésite à annuler la sortie. Je suis envahie d'idées contradictoires. Et plus rien ne va. Je soupire en enfilant ma parka. Je vérifie l'heure, et cinq minutes plus tard j'aperçois le pick up garé sur le trottoir. Je descends et il m'adresse un sourire. Il avance de deux pas et me prend dans ses bras, geste affectif qui me prend au dépourvu.
- Tu vas bien ? Me questionne-t'il.
- Oui, super.
Mon affirmation semble fausse, mais il n'insiste pas et tant mieux. Je monte dans le véhicule, et il se place au volant. Au fil du trajet, nos conversations se font diverses.
Sur des sujets différents, mais jamais il n'a touché le point sensible. Il respecte mes silences, et je l'apprécie aussi pour cela.- Je dois avouer que je n'aime pas les manèges à sensations fortes, dis-je.
Pourtant sauter d'un pont ne te dérange pas tant que ça.
- Pour être franc, moi non plus ; prononce-t'il avec un ricanement. Mais tu verras, il y a des tas de chose à faire là-bas.
Je réfléchis un moment, avant de me lancer :
- Alex, je peux te poser des questions ?
- Ouais ?
- Je ne sais pas grand-chose que toi. Je ne connais que ton prénom. Certes on a passé de bons moments, mais je ne sais même pas qui tu es. Tu aurais pas des choses à me dire sur toi ? Que l'on apprenne à mieux nous connaître et que l'on ne reste plus des inconnus l'un pour l'autre.
Sa mâchoire se crispe.
- Il n'y a rien à dire. Je suis né en Floride, j'y ait vécu toute ma vie jusqu'à ce que je déménage ici. Je travaille dans un garage, et j'ai dix-neuf ans. Et mon nom complet est Alex Tom Williams.
Je trouve son ton sec, mais il adoucit l'ambiance en m'adressant un sourire. Je ne fais pas attention à son comportement. Parfois, nous n'aimons pas simplement pas parler de notre passé.
Il reprend :
- D'ailleurs, je pourrais te retourner la question. Tu t'appelles Anelyne, et ?
J'esquisse un rictus, en détournant le regard. Je n'aime pas parler de moi, cela m'a toujours paru péjoratif, de se présenter ainsi.
- Je suis née en Espagne, puis j'ai déménagé en France avec mes parents. Seulement à un moment donné tout a mal tourné et ils ont du repartir dans notre pays d'origine. Je suis venue aux États-Unis avec ma meilleure amie.
- Tu as l'air d'avoir eu une vie bien remplie, je me trompe ?
- Je ne sais pas vraiment...
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Âmes en peine [ TERMINÉE ]
Teen Fiction"On pourrait entendre les cris de nos cœurs ensanglantés Voir la peur dans nos regards Mais à la vie à la mort nous serons ensembles Tant que tu seras là je continuerais la bataille Car c'est le destin qui nous a unis " Anelyne est une jeune adul...