Partie XVII

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PDV Alex
Je fais les cent pas. Une rage manque d'exploser à tout moment. Je savais que c'était de la folie. Pourquoi je n'ai rien empêché ?
- Combien de morts, demandais-je tendu.
- Isaac, Axel, Malone... Et d'autres blessés.

Éden prend sa tête dans les mains, et fixe le sol. Mais d'un coup, il frappe la table. Si fort qu'elle aurait pu s'en briser.
- Il faut y retourner, dit-il. Il faut venger nos camarades. Ils se sont battus pour quoi ? Pour ta pétasse qui n'en vaut pas la peine ! Mais en fait, tout ça c'est de ma faute. C'est moi qui ait voulu l'accueillir. Moi qui ait trouvé cette épreuve. C'est moi qui ait envoyé nos confrères à la mort.
- On ne peut pas continuer à nous battre. Le mal est fait, et retourner sur les champs de bataille serait perdre d'autant plus de gens qui nous sont chers.

Une rage sourde m'envahit. J'essaie de la canaliser autant que je peux, mais cette colère noire menace de se projeter envers mon frère. Non. Je ne peux pas me permettre maintenant de faire ça. J'ai déjà assez foutu la merde.

Il se lève, et ramène une carte qu'il étale.
- C'est facile de dire ça pour toi. Tu t'es souvent éloigné de nous, à vouloir reconstruire ta vie. C'est moi qui ait vu ces hommes évoluer, c'est moi qui leur ait donné une nouvelle vie alors qu'ils étaient au fond du gouffre. Qu'ils aient été touchés par la misère, ou par autre chose, je les ait sauvés comme je t'ai sauvé toi.  Et maintenant, il ne reste plus rien d'eux que les souvenirs, et ça, je m'en voudrais à vie. J'aurais dû y aller seul.
- Si tu étais allé seul là-bas, tu serais mort à l'heure actuelle. Et tout se serait déroulé normalement. On serait venu te chercher, et il y aurait eu d'autres victimes encore.

Il réfléchit un instant, avant de déclarer :
- Ne remettons plus ce qu'il s'est passé en cause. J'aurais ma vengeance plus tard. Maintenant, j'ai quelque chose à te proposer.
- Quoi donc ?
- Je sais que tu veux une vie banale, et que tu souhaites pareil pour Anelyne. Tu ne la vois pas nous rejoindre, pas vrai ?
- Oui, c'est vrai. Et si j'avais la possibilité de tout arrêter, pour repartir à zéro, honnêtement, je le ferais.
- J'en étais sûr. Et la possibilité, elle est là.

Il me montre du doigt la frontière Canadienne.
- Tu veux qu'on aille là-bas ?
- C'est le meilleur endroit que j'ai pu trouver pour vous.
- On va se faire contrôler à la frontière. Il y a des risques. S'ils voient que nos papiers sont faux, qu'ils découvrent notre véritable identité...
- Ça n'arrivera pas. Tout va bien se passer. Maintenant, c'est à vous de décider. J'ai des amis là-bas qui pourront vous aider.
- On se disait la même chose, que tout allait bien se passer durant l'épreuve. Sauf que nos hommes sont morts et Anelyne a vécu l'horreur.

Il serre la mâchoire, irrité.

Dans tous les cas, il nous faudra plusieurs jours de route avant d'arriver à la frontière. Et ensuite, il n'y aura plus qu'à espérer que l'on y parvienne.

Je sors dehors quelques temps, et me promène dans le jardin. Je réfléchis à comment je pourrais formuler ma demande lorsque je devrais en parler à Anelyne. Je m'en vais alors la voir.

Je monte les escaliers. Je me retrouve dans un grand corridor, et j'avance à grand pas vers sa chambre. J'ouvre doucement la porte. Elle est éveillée, mais reste allongée. Je m'installe à côté d'elle, observant son visage doux et ses traits fins.
- Comment est-ce que tu te sens ? Demandais-je.
- Beaucoup mieux.

Elle ne semble pas si bien. Physiquement, elle s'est rétablie et a repris des forces. Mais mentalement, elle endure une sorte de guerre interne.
- Je ne pourrais jamais oublier ce qu'il s'est passé. Tout ce sang, et ces visages qui perdent leurs couleurs. Éden doit me haïr, et je le comprends. Je suis la responsable. si j'avais fait attention, peut-être qu'ils seraient en vie.
- Vous vous sentez tous les deux coupables. Mais vous devez cesser de vous torturer l'esprit. Les choses sont faites, et maintenant il faut aller vers l'avant. Je viens te proposer quelque chose.
- Je vous ait entendu parler. Le Canada, oui. Ne m'en veut pas d'avoir écouté votre discussion.
- Non, c'est rien. Je me demandais, si tu voulais y aller ?
- C'est envisageable. On a rien à perdre après tout.
- C'est ce que je pensais aussi.

J'ouvre la fenêtre. Le soleil entre, illumine la chambre et la brise vient se répandre dans la pièce. On sent le parfum des fleurs, et une odeur de miel venu des cuisines, assez réconfortante.
- Cet endroit, c'est votre manoir ? Vous habitez ici ?
- En quelque sorte oui. Il appartient à mon frère.
- Je ne pensais pas que vous aviez ça... C'est beaucoup plus grand que le QG, dit-elle.
- Je ne vais pas dire le contraire.

Je lui souris, avant de passer du temps avec elle.
Nous aurions pu être heureux, si je ne l'avais pas entraînée dans mes affaires. Le Canada, est véritablement notre dernière chance, la dernière occasion qui se proposera. Il vaut mieux essayer et échouer, que de vivre avec l'idée que l'on restera sans cesse des fugitifs.

Ça paraît surréaliste, de savoir que mon quotidien changera. Que je vais m'installer quelque part, vivre comme n'importe qui. Mais je ne dois pas me faire de faux espoirs.

Âmes en peine [ TERMINÉE ] Où les histoires vivent. Découvrez maintenant