Chapitre 18

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Il était désormais temps d'aller déjeuner en compagnie, donc, des autres détenus.
Alaïa n'avait plus parlée aux filles depuis que ces dernières s'étaient livrées et ses compagnes de cellule n'avaient pas cherché à savoir ce qu'Alaïa pensait non plus.

La même gardienne qui avait accompagnée Alaïa aux toilettes la veille les escortait à présent vers un réfectoire. 
Une fois arrivées, Alaïa et les trois filles restèrent un moment dans l'entrée avant qu'elles ne soient poussées pour dégager le passage.
Alaïa, ne voulant pas se retrouver seule  et cela même si elle ne se sentais pas forcément en sécurité avec Coulnao, Qith et Zhaganai suivit ces dernières jusqu'à l'une des longues tables du réfectoire. 

Seul, un jeune homme y mangeait. Il avait les cheveux blonds vénitiens et ses yeux étaient bleus foncés. Sa peau était d'une transparence presque maladive et lorsqu'il aperçut Coulnao, Qith et Zhaganai il sourit en les invitant à venir s'asseoir avec lui.
Mal à l'aise Alaïa hocha la tête à l'intention de l'inconnu et s'assit le plus en retrait possible sans être pour autant trop loin afin que d'extérieur on pense qu'elle était avec eux et qu'on la laisse ainsi tranquille.

La conversation portait sur la nourriture qui était sans réelle saveur et Alaïa pouvait aisément deviner que ce n'était qu'un moyen de combler le silence et que cette conversation avait même peut-être lieu chaque mardi et chaque vendredi pour combler le silence.
Car de quoi pouvait-on parler lorsque l'on restait enfermé et sans distractions et que chaque jour ressemblait au précédent si bien que la perception du temps qui passe en devenait seulement rythmée par les repas.
Alaïa était en train de se dire que si elle réagissait ainsi après moins d'une semaine comment allait-elle supporter psychologiquement un enfermement sans fin.

Soudain, Alaïa ressentit une présence, elle ressentait de nouveau une essence comme lors de ses entraînement avec Néréla et alors qu'elle relevait brusquement sa tête baissée vers son plateau elle croisa le regard de l'homme.

Ce regard échangé l'essence disparut aux perceptions d'Alaïa et elle se demanda si elle ne l'avait pas imaginée.
Alors qu'elle se demandait si il était possible que ce soit cet homme qui lui ait laissé l'occasion de savoir qui il était il s'adressa justement à elle pour lui demander son prénom.

Toujours perplexe Alaïa se présenta et fit preuve politesse en retournant la question bien qu'elle n'en eut pas envie.
Elle apprit donc qu'il s'appelait Selyens et, alors qu'à aucun moment l'une des trois personnes partageant son espace d'enfermement ne lui avaient demandé pour quelle raison elle était là il le lui demanda. Alaïa trouva cela peu correct mais si au moins elle savait quoi répondre...

Alors, une idée lui vint et elle répondit :

- Je suis ici car j'ai été accusée d'avoir tuée une jeune fille mais je suis amnésique de cette partie de l'histoire dont on m'accuse alors je ne pouvais rien dire pour me défendre.

En y réfléchissant Alaïa avait été plus honnête qu'elle ne pouvait espérer l'être. En effet, elle ne se souvenait pas avoir tuée quelqu'un même si au fond elle transformait "se souvenir" par "savoir". 
Selyens ne parut pas surpris et il fallut toute la volonté d'Alaïa pour se convaincre de ne pas lui retourner la question. 

Elle ne l'appréciait pas mais différemment de l'agacement constant qu'elle pouvait ressentir envers Telren lorsque ce dernier faisait semblant de s'intéresser à elle car Selyens paraissait vraiment s'intéresser à ses paroles et cela la dérangeait.

Qith tira Alaïa de son embarras en s'adressant de nouveau à Selyens alors que ce dernier fixait toujours Alaïa.

Alaïa respira tout de suite plus librement et fut heureuse que Selyens ne lui adresse plus la parole du repas. 

Lorsqu'il fallut se diriger de nouveau vers sa cellule Alaïa adressa un simple hochement de tête à Selyens qui le lui rendit en souriant.

Sourire qu'Alaïa ne lui rendit pas.

En fait, elle se demandait toujours si c'était lui qui avait laissé échapper son essence de manière intentionnelle. 

Maintenant dans sa couchette, d'horribles conjectures lui vinrent en tête : et si il faisait parti des sensibles qui vivaient à la surface et qu'il avait deviné qui elle était. Après tout, peut-être que les sensibles de la surface avaient deviné que certains de leurs semblables avaient survécus. 

Si c'était le cas il était logique que ceux de la surface se doutent que les autres tenteraient une rébellion. Mais une rébellion aurait besoin d'aide et quoi de mieux qu'une aide extérieure...

Alaïa, tout en picorant le deuxième repas de la journée se demanda comment, si c'était le cas, Selyens aurait pu deviner qui elle était. 

Après tout pourquoi cacher son essence alors qu'il n'y aurait personne pour la sentir ? Alaïa était en train de se maudire de s'être trahie en relevant la tête quand Selyens lui avait tendu une perche lorsqu'une terrible idée s'imposa à son esprit.

On lui avait dit que grâce à la boisson multicolore elle pourrait ressentir l'essence des sensibles mais peut-être que la formule était encore mal réglée et qu'en ingérant ce liquide elle s'était elle aussi mise à émettre une essence !

En revenant de la salle d'hygiène Alaïa était en train de se rassurer en se disant que si elle avait dégagé une essence quelconque, même infime, on le lui aurait dit afin qu'elle apprenne à la canaliser pour ne pas que cela ne compromette ses futures recherches.

Maintenant de retour sur sa couchette et alors qu'elle devait tenter de dormir Alaïa commença à s'en vouloir, elle avait souhaité retourner chez elle et, même si elle ne savait pas comment elle y était retournée, elle était désormais incapable de se sortir de cette situation.

Si seulement elle possédait des aptitudes elle pourrait peut-être sortir en douce... mais, si Selyens était vraiment un sensible comme Alaïa le pensait, pourquoi s'était-il laissé emprisonner?

Peut-être ne possédait-il pas les aptitudes nécessaires ou peut-être n'était-il pas assez puissant pour résister ou, et la respiration d'Alaïa s'arrêta lorsque cette possibilité s'imposa à elle, peut-être qu'il s'était laissé attraper pour la retrouver elle.

Tandis que cette possibilité lui faisait garder les yeux ouverts la respiration paisible des trois filles et la lassitude de se torturer l'esprit l'emporta et elle s'endormit tandis que sa dernière pensée fut qu'elle devait à tout prix éviter de s'asseoir près de Selyens vendredi pour l'observer de loin et l'analyser.



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