Chapitre 32 - Madeline

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J'eue à peine le temps de fermer les yeux que la troisième assiette qui se trouvait sur la table se fracassait contre le mur. Edgar ne se ménageait pas et criait sa colère et sa peine. J'avais envie de lui retenir ses bras qui commandaient ses tourments, lui dire que ça allait aller, que sa mère rentrerait à temps, mais aucun mot ne sortait. Il lui avait suffi d'un aller-retour rapide en cuisine pour exploser. Le plat était prêt, les délicates arômes qui embaumaient la pièce depuis le début de soirée n'attendaient que d'être dégustée, mais voilà, le repas n'allait plus avoir la même saveur désormais.

Tapissée le long du mur, j'attendais de trouver le moment adéquat pour lui montrer que j'étais là pour lui, même sans parler tant j'en étais incapable. Il attrapa une nouvelle assiette et j'émis un léger cri, prête à le retenir de casser toute la vaisselle. Comme s'il se souvenait soudain que j'étais dans la pièce, il releva la tête vers moi et son regard m'envoya toute la tristesse qu'il ressentait à ce moment-là. Il s'agenouilla honteux et posa l'assiette au sol. Je me ruais vers lui, l'encerclant de mes bras, tentant par ce simple moyen d'apaiser sa peine. Je ne voulais pas qu'il pense que j'avais pitié de lui, la frontière entre cette dernière et la compassion était tellement fine que j'avais peur de le brusquer.

— Edgar, je suis si désolée, tentais-je.

Il cachait sa tête dans ses mains et ne parlait pas.

— Je ne sais pas ce que je peux faire ou te dire... continuais-je.

Il me brisait le cœur. Le voir dans cet état était dur et je prenais sur moi pour rester forte. Ce n'était pas le moment d'être faible, il avait besoin d'une épaule sur laquelle s'appuyer, pas d'un soutien fragile.

C'était tout simplement un enfant en mal d'amour maternel. Qui tentait par tous les moyens d'attirer l'attention de sa mère. A le voir comme ça, j'eue l'impression qu'il avait perdu dix ans, mais il se battait contre les mêmes démons depuis si longtemps que l'enfant en lui était toujours aussi présent, dans la fissure que son cœur avait créé avec le temps.

J'étais en colère avec lui, contre cette mère qui n'avait pas réussi à voir la lumière dans leur noirceur, qui n'avait pas réussi à voir cet ange encore en vie malgré les ténèbres qui s'étaient emparés de la moitié de leur famille.

Car oui, Edgar était un ange, un bienheureux se débattant avec sa vie merdique pour essayer de s'en sortir. Je m'en rendais compte réellement maintenant. Ce qu'il m'avait fait me paraissait si anodin, face à ce que, lui, avait dû vivre. Sans figure paternelle, voire complètement parentale à cause des dérives de sa mère, il n'avait pas eu la tendresse et l'attachement nécessaire à la « bonne » éducation. Pourtant c'était un être bon, aimant, passionné, tendre et juste, mais malheureux.


— C'est moi qui suis désolé, Madeline, m'avoua Edgar au bout d'un moment dans mes bras.

Il avait repris une certaine contenance, mais renifla discrètement, toujours en me cachant son visage.

— Elle m'a dit qu'elle allait changer... qu'elle allait faire des efforts. Qu'elle regrettait que je sois parti... Et regarde où on en est... continua-t-il sarcastique.

Toujours accroupis au milieu de la salle à manger, dans notre bulle de paix entre la porcelaine cassée, je lui transmettais tout l'amour que j'avais à lui offrir.

Je ne comptais plus les minutes dans lesquelles nous étions restés ainsi mais je réussi à l'apaiser. Il releva enfin la tête, les yeux rougis et un sourire contrit et me regarda. Il me caressa la joue de sa main gauche et me remercia.

— Merci d'être là, merci pour cette chance que tu m'offres, je ne te mérite pas, souffla-t-il en se pinçant l'arête du nez de sa main libre.

To Hell 🔥 - Tome 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant