5. C'est dans mon cœur

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- flash-back -

« Rémi ? Tu viens ? »

Le petit bouclé tourna la tête vers sa mère, et vers le médecin qui les attendait, avec un sourire, dans l'encadrement de la porte.

Il prit la main de sa mère, et entra avec elle dans le cabinet du docteur, qui referma la porte derrière eux.

Alors qu'il jouait avec des Legos dans un coin de la pièce, il pouvait entendre la voix de sa mère, murmurant au médecin.

« Vous êtes sûr qu'on peut diagnostiquer ce genre de chose si tôt ? Il n'a que huit ans... »

Rémi était déjà venu chez ce médecin, ce dernier lui avait posé pleins de questions, sur sa vie, ses amis, sa famille, ses jouets, et à chacune de ses réponses, le visage de sa mère se tordait d'une grimace désappointée, et le médecin s'empressait de noter des choses sur son carnet.

Et puis un jour, une dame et un monsieur en costumes, étaient rentrés dans leur maison.
Ils avaient posé pleins de questions, surtout à lui, et étaient restés toute la journée, la plupart du temps à les observer silencieusement, lui et ses parents.

À la fin de la journée, quand allongé dans son lit, sa chambre plongée dans le noir, dont il n'avait pas peur grâce à sa veilleuse multicolore, il entendit les deux inspecteurs saluer ses parents, et la porte de la maison se claquer, il sortit de ses draps et de sa chambre, courant vers les bras de son père.

Celui-ci les avait enlacés, lui et sa mère pendant de nombreuses minutes.
Il le savait parce qu'il avait compté pendant 2 minutes les incessants tic tac de l'horloge de la cuisine. Et il y avait eu pleins de 2 minutes après ça.
Sa mère avait caché son visage dans le cou de son mari, mais Rémi lui caressait les cheveux de sa toute petite main poisseuse.

Son père l'avait ramené dans son petit lit, alors que sa mère était repartie dans le salon, sans un regard pour eux.

Le lendemain matin, des cernes bleues barraient le bas de ses beaux yeux. Elle avait essayé pendant de nombreuses minutes passées dans la salle de bain, de les cacher sous son maquillage. Mais le petit bouclé les avait déjà vu.

Les semaines suivantes, Rémi avait dû voir pleins de médecins différents. Ce qui était drôle, c'est qu'ils lui posaient pratiquement toujours les mêmes questions.

Un vendredi soir, alors qu'il était censé lire dans sa chambre, ce qu'il détestait, il avait surpris une discussion qu'il n'avait pas vraiment comprise, entre ses parents.

« Qu'est-ce qu'on a fait ? Je n'arrive pas à comprendre ! On ne l'a jamais rejeté ! Il ne manque de rien ! »

– Chérie, ce qui est le plus important maintenant, c'est de s'occuper de lui comme il faut. On écoute les docteurs, et on s'adapte. Ce n'est pas important de savoir ce qui a causer ça.

– Hé bien pour moi c'est important ! Merde ! Mais, c'est nous ses parents ! Réveille toi !

– Ça ne vient peut-être pas de nous.

– Mais comment tu peux être aussi dégagé de la situation ?! C'est ton fils ! Que ce soit nous ou une autre personne, je veux savoir pourquoi il est comme ça !

Rémi était vivement retourné dans sa chambre, étudiant les limbes de discussions qui lui étaient restés en mémoire.

Ils avaient continué à retourner chez le médecin.

« C'est compliqué de diagnostiquer ce genre de chose chez un enfant, mais c'est un risque, auquel vous devrez vous préparer. Ne lui en parlez pas trop tôt, on ne peut être sûr de rien à cet âge. Il faudra repasser des tests quand il sera plus âgé. »

De retour à la maison, ses parents avaient continué leurs étranges discussions, et Rémi les écoutait, caché derrière le mur.

« Je refuse que mon fils soit ce genre de chose. Tu sais combien les médecins sont parano avec les enfants ! »
avait fait son père.

– On va quand même devoir lui instaurer quelques règles. Pour sa sécurité.

– Tu veux qu'il grandisse dans la vie en se disant dès le début qu'il est anormal ?!

La main de sa mère, posée à plat sur table, retentit dans un grand bruit.

– Je t'interdis de dire qu'il est anormal !

– Ah parce que tu trouves ce genre de chose normal ?!

– C'est beaucoup plus fréquent qu'on ne le croit !

La voix de sa mère se fit beaucoup moins forte en continuant :

– Le médecin a dit qu'il y avait peut-être une prédisposition génétique.

– Quoi ?!

– Il est possible que nous l'ayons, toi ou moi... ou même la petite...

Rémi jeta un regard vers la chambre de Florie. On entendait sa petite voix fluette s'échappait de l'embrasement, elle jouait avec ses doudous.

Il retourna à son tour dans sa chambre, laissant ses parents se disputer.

☁️

Quelques larmes coulèrent le long de ses joues.
Le souvenir de sa voix de petit garçon se répétait en boucle dans sa tête d'adolescent perdu.

« Ce n'est pas ta faute maman. C'est n'est pas ta faute. »

Et elle, elle pleurait, pleurait en répétant que c'était sa faute.
Se cachant le visage dans ses mains, mais le petit Rémi avait déjà vu les larmes, il avait déjà vu ses yeux tristes, et son corps recroquevillé refoulant les remous de remords et de culpabilité qui l'accablaient.

« Ce n'est pas ta faute maman. »

Alors qu'il essayait encore de réconforter sa mère, deux bras l'attrapèrent, le soulevant de terre pour l'emmener dans sa chambre, sous les cris déchirants de l'enfant.

« Papa ?! Elle a besoin de moi ! »

– Je t'aime Rémi.

Le regard vert de son père lui sembla si sérieux que les larmes de l'enfant coulèrent comme une évidence du coin de ses yeux.
Il cacha sa bouille dans le cou de son père.

– Maman aussi, elle t'aime. On t'aime Rémi. Ne l'oublie jamais.

☁️

« Ça va ? »

– Oui, juste un peu fatigué.

– Ah, c'est vrai ! Qu'est-ce que c'est dur de rester assis toute la journée à écouter des profs parler !

– Je me lève quand même à 6 heures !

– Oui Rémi. Mange maintenant. Et va dormir après ! Tu m'as l'air vraiment fatigué.

Il sourit à sa mère, qui lui tendait son assiette, et acquiesça.

– Oui, maman.

À suivre...

Apache - ALIEXOù les histoires vivent. Découvrez maintenant