Chapitre 30

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LE GRAND DÉPART

L'aube venait tout juste de poindre tandis que je me tenais là, abritée dans l'ombre du réfectoire, contemplant le paysage de désolation qui nous entourait

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L'aube venait tout juste de poindre tandis que je me tenais là, abritée dans l'ombre du réfectoire, contemplant le paysage de désolation qui nous entourait. L'auditorium réduit à l'état de ruines avait laissé place à un immense terrain retourné, dévasté, offrant une vue ouverte sur le jardin botanique aux couleurs ternies qui s'étendait derrière le domaine. Il flottait encore dans l'air une aura permanente et oppressante, empreinte de Magie Noire. Nous nous trouvions tous réunis dans la cour, étudiants et professeurs, croulant sous un silence de mort qui créait un contraste angoissant avec les bavardages insouciants et les éclats de rire qui résonnaient habituellement dans les couloirs et la cour.

À mes côtés, Monsieur Parasteni n'avait pas émis un seul mot depuis le début des opérations, observant d'un regard attentif le véhicule venu tout droit du Ministère qui se dressait au milieu de la cour. C'était une immense voiture noire montée sur six larges roues, dénuée de fenêtres, tirée par deux créatures au pelage orangé iridescent. Leurs longues jambes se mouvaient avec souplesse tandis qu'elles trépignaient d'impatience, raclant le sol terreux du bout de leurs fins sabots. Sur leur crâne s'agitaient deux cornes verdâtres semblables à des antennes s'agitant doucement au rythme du vent, surmontant les deux yeux globuleux qui occupaient presque toute la surface de leur figure. Malgré l'élégance naturelle qui se dégageait de leur silhouette, elles avaient quelque chose d'étrangement repoussant, maintenant sans peine les éventuels curieux à bonne distance du véhicule qu'elles gardaient.

Cela faisait désormais trois jours que toute menace pesant sur nos têtes avait enfin été écartée. Trois jours pendant lesquels les deux hommes responsables de ce chaos étaient restés enfermés sous bonne garde dans les cachots, hors d'état de nuire, en attendant qu'ils ne soient remis entre les mains des hauts responsables du continent, pour recevoir les justes représailles de leurs actes. Pour ma part, j'avais passé l'essentiel de ces trois jours alitée, le temps de me remettre de mes émotions. En laissant ainsi la Magie Noire pénétrer dans mon corps, cela l'avait considérablement affaibli, le rendant incapable de lutter efficacement de lui-même. L'incontestable talent et les inépuisables ressources de Monsieur Parasteni m'avaient permis de m'en sortir sans trop de difficulté, et il ne me restait plus à présent qu'un large bandage à l'épaule, recouvrant la plaie béante en cours de cicatrisation. Par endroits, ma peau était encore couverte de macules noires tout autour de la blessure. Malgré tout, je ne ressentais plus la moindre douleur, et je savais que ces traces ne tarderaient pas à disparaître pour de bon, une fois que tout ceci ne serait plus qu'un lointain mauvais souvenir.

Pour autant, malgré la redevance éternelle que j'éprouvais à l'égard de mon professeur de Magie Blanche, ce dernier avait été très clair et très honnête avec moi : sans la présence de la pierre autour de mon cou, les chances pour lui de parvenir à me sauver auraient été quasiment nulles. En songeant à cela, mes doigts glissèrent dans la poche de ma jupe et se refermèrent sur le fragment qui ne m'avait plus quittée. Je le déposai dans la paume de ma main et l'observai un long instant, captivée. Cette pierre m'avait sauvé la vie, m'avait donné la force nécessaire pour accomplir mon destin. Cette certitude en tête, je repliai mes doigts sur elle et fermai les yeux. Mais il me fut impossible de percevoir la moindre force émanant d'elle. Actuellement, elle n'émettait plus aucun éclat. Mon organisme en peine avait été contraint de puiser dans son énergie pour combattre la Magie Noire que j'avais laissée pénétrer en moi, et il l'avait complètement drainée de toute sa force, ne laissant plus qu'une simple pierre polie, certes magnifique et irradiant de mille couleurs à la lueur du jour, mais désespérément inerte et silencieuse. Néanmoins, je sentais que le lien qui m'unissait à elle était toujours aussi fort, bien que moins facilement perceptible. Mon corps était épuisé, mais mon âme était plus vivante que jamais, et ce grâce à ce minuscule fragment. Plus qu'une simple pierre, c'était une petite partie de moi-même que je tenais au creux de ma main.

LYCHÉRIA Tome 1 - L'Académie de MagieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant