Je suis du regard l'avion passer au-dessus de nos têtes. Adam lève le doigt, fait semblant de l'attraper et se touche le nez.
- C'est débile de continuer à faire comme si on avait sept ans, dit-il en reposant sa tête dans l'herbe.
- C'est mieux que de se dire qu'on est presque majeur et un bac à passer à la fin de l'année, replique Arllem.
Je les écoute débattre et vérifie une bonne dizaine de fois de suite si Loïk a répondu à mon message. Le fait est-là. Je n'en ai aucun. Mes deux amis se mettent à rire et je tourne la tête pour mieux les voir.
- Quoi ?
- Comment elle s'appelle ? demande Arllem.
- Qui ?
- Fais pas l’innocent ! Tu as été sur ton portable toute la journée, raille Adam.
- Sérieux, elle s'appelle comment ? redemande Arllem.
- On la connaît ?
- Je vois pas de quoi vous vous parlez.
Je verrouille mon téléphone et le range dans ma poche. J'ai conscience qu'ils s'attendant à ce que je leur dévoile l'identité de la belle demoiselle qui a su me charmer. Seulement, je me vois mal leur avouer que j'attends la réponse d'un garçon que je connais depuis à peine deux semaines. Ça ferait toute une histoire.
- Pourquoi t'es tout rouge si ce n'est rien ?
- Aller, dis nous.
- Elle s’appelle Léa, mens-je. Voilà, vous êtes content ?
- Ah oui, très.
- T'as des photos ?
- Non. Elle aime pas ça.
Ils se rallongent dans l'herbe comme si de rien était et un petit sourire se dessine sur le visage d'Arllem.
- Et toi, pourquoi tu souris ?
Il ferme les yeux et hausse des épaules en continuant de sourire. Je sais très bien la raison de sa joie et ça commence déjà à m’énerver.
- C'est quoi son nom ?
- Quentin, soupire-t-il avec des paillettes dans les yeux.
Il rêve juste d'un prince charmant. Pas d'un connard qui ne ferait que coucher avec lui. Et j'ai le pressentiment qu'il est mal tombé avec ce... Quentin.
- Et tu sais quoi sur lui ? l'interrogé-je sérieusement.
- Tristan... soupire Adam.
- Quoi ?! C'est pas de ma faute si chaque mec qu'il rencontre ne rêve que de le mettre dans son pieu ! Tu te souviens de William ?
- William m'a bien fait comprendre qu'il est hétéro, s'indigne Arllem. Quentin est vraiment gay.
- Ah parce que pour toi, s'il te dit qu'il a envie que tu le suces, le mec est forcément gay ?
- C'est quoi ton problème Tristan ? s'échauffe-t-il en se levant. Léa te répond pas, du coup, tu te défoules sur moi !
- Les gars...
L'intervention d'Adam ne sert à pas grand chose et je me lève à mon tour.
- Mon problème, c'est que tu ne te rends pas compte que tu te fais avoir à chaque fois ! Il n'y a pas eu que William. On en parles de Thomas et de Louis ? Ou de Jules si tu préfères ! J'ai d'autres noms en réserves si tu as besoin !
Il s'essuie la joue avec sa manche, récupère son sac et part en direction de la sortie du parc. Adam me couvre d'un regard fatigué, me faisant comprendre qu'encore une fois, je suis allé trop loin. Je regrette mes mots.
- Arllem... l'appelé-je doucement en le rattrapant.
- Lâche-moi ! crie-t-il contre moi.
Je le regarde s'éloigner et recule jusqu'à m'asseoir de nouveau à coté d'Adam.
- Si tu me dis que tout va bien en ce moment, je risque d'avoir un peu de mal à te croire.
- Mais tout va bien ! m'exclamé-je.
- Ah oui ? Tu es sûr ? Ce n'est pas l'impression que tu donnes. T'as vu tes cernes ? Et je t'avais jamais entendu parler comme ça à Arly ? Tu l'as même appelé par son prénom !
J'appuie ma tête sur mon sac, mon bras sur les yeux.
- Sérieux mec. Qu'est-ce qu'il y a ?
- Il y a que mon père a des problèmes de frics.
- Ah...
Pas de solution. Pas de proposition d'aide. Mais je ne lui en veux pas. Je dois gérer le problème avec ma famille. Ou du moins, ce qu'il en reste.
- J'ai bien conscience que ça peut pas réellement aider, mais ma tante cherche quelqu'un pour l'aider à travailler.
- Ta tante qui gère le magasin bio ?
- Ouais. Sa vendeuse est partie en congé maternité. Ça ne serait que pour quatre mois mais-
- Elle accepte les lycéens ? le coupé-je en m'asseyant, enthousiaste.
- Je suis pas sûr. Attends, attends ! Je pensais plutôt à ça pour ton père. Tu veux vraiment bosser ?
J’acquiesce vivement.
- Et le lycée ? s'inquiète-t-il.
- Je ne ferais pas d'étude sup' de toute manière et mon bac, je vais le foirer. Autant que j'aide mon père maintenant. Les études, se seront Noé qui les fera.
Adam se mord la joue, pense à répliquer quelque chose, mais se ravise. Rien ne me fera changer d'avis pour le moment.
- Tu penses que ton père acceptera ?
- Pourquoi il refuserait ? Ça nous aiderait beaucoup.
- Ok, mais j'ai aucune envie que tu rentres en conflit avec lui à cause de moi.
- Crois-moi, il existe un tas de raison pour lequel mon père risquerait de se mettre en colère contre moi.
Je ne dois jamais lui parler de ma balade à moto et de ce qu'il s'est passé ensuite. Mon portable vibre dans ma poche et je souris en voyant le message de Loïk.
''Désolé, de te répondre seulement maintenant. Uriel m'a fait payer mon absence de l'autre jour. 😫''
''Je me suis retrouver de corvée nettoyage de toilettes par Melkior 💩''
''On aurait dû fuir plus loin 🏍''Je ris en envoyant la réponse et lève les yeux vers Adam qui me fixait.
- Pourquoi tu me regardes comme ça ?
- Cette fille doit être géniale pour te faire autant sourire.
Je jongle entre lui et mon écran. Oui, Loïk est un garçon vraiment sympa. Mais je ne le vois pas comme une fille avec qui il se passerait quelque chose. Déjà, parce que ce n'est pas une fille. Et ensuite, il ne se passera jamais rien entre nous. Loïk est un confident. Rien de plus.
- Bon, je vais y aller sinon, j'aurais jamais le courage de lui parler du boulot ce soir.
- Bonne chance.
Il m'envoie un signe de main, j'attrape mon sac et file jusqu'à l’arrêt du bus en croisant les doigts pour attraper le prochain. Je relis plusieurs fois ma réponse en espérant qu'elle ne soit pas trop ambiguë.
''La prochaine fois, on quittera la région 🙈''
Mon téléphone vibre entre mes doigts quand je m'assois sur un siège.
''Le pays🙀'' ''Ça sera plus sûr👍''
Je nous imagine bien sur sa moto, mes bras autour de sa taille, le moteur vrombissant sous nos jambes, les kilomètres s'enfilant derrière nous. Mon ventre se contracte à cette idée. J'observe la photo que j'ai prise de lui dans le vieux cinéma. Il se tient droit, son regard vairon perdu sur une affiche de film. La lumière qui passait par la fenêtre se reflète dans ses mèches blondes et les manches de son sweat sont retroussées sur ses bras, laissant apercevoir ses muscles et sa peau claire. En plus de ça, son jean épouse parfaitement ses formes. Je me mords la lèvre. Tout se mélange dans ma tête. Rien ne va plus.

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Je te dirai que je t'aime
JugendliteraturTome 1 // Monde plus beau Tristan mène sa vie comme il l'entend. Sans pour autant se donner le droit à l'erreur. Il doit prendre soin de ses proches. Surtout de Noé, son petit frère. Sa rencontre avec Loïk est sur le point de tout bousculer. Ce mot...