Chapitre 6

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Aidée de l'adjointe en chef, nous transportons les plats de poissons sur des chariots à roulette, le plus loin de la salle à manger si possible.

-Où est-ce que l'on va mettre tout ça ?

-Dans l'océan. ordonne le mari de l'ex-sirène d'une voix morne. C'est là-bas qu'elle devrait être.

Ce type me fait de la peine. Il est venu avec sa femme sur ce bateau de croisière pour passer une semaine romantique et voilà que cette dernière a fini en grillade - de quoi cauchemarder pour le restant de ses jours.

L'homme vient nous rejoindre et attrape un chariot pendant que je m'occupe du deuxième. Nous quittons la cuisine et nous dirigeons à l'extérieur. Midi ayant bientôt sonné, peu de gens sont dehors. Nous pourrons donc jeter librement le contenu des plats dans l'eau salée sans que les gens ne se posent de questions.

Quand un métamorphe découvre un acte de gaspillage, il crie rapidement au scandale.

-Vous voulez peut-être dire quelques mots ? je suggère alors que nous sommes sur le point de tout balancer par-dessus bord.

-Je ne saurais pas quoi dire. répond-il, désespéré. Cela ne vous dérange pas de le faire à ma place ?

Aie, très mauvaise idée.

Je suis loin d'être du genre sentimental. Je m'éloigne dès que les choses deviennent trop sérieuses pour moi, certaine que je ferai des gaffes sinon. C'est d'ailleurs pour ça que mes camarades de meute ne m'invitent jamais aux enterrements.

Ils me connaissent par cœur et savent que, sans le vouloir, je finirai par dire quelque chose de déplacé. On a essayé une fois, et ça c'est mal fini entre moi et la famille du défunt. Depuis, on s'est tous mis d'accord pour que je n'approche aucun rite funèbre.

-Euh, vous êtes sûr ?

Il hoche la tête de façon affirmative, apparemment sûr de lui.

-Alors, euh...

Que puis-je bien dire ? Repose en paix, petite sirène, que Dieu fasse en sorte qu'aucun poisson ne s'étouffe avec tes arrêtes ?

Pas sûre que ce mec apprécie la blague.

-Comment s'appelait-elle ? je lui demande alors, espérant gagner un peu de temps.

-Aneliya.

J'inspire profondément.

-Ok, je me jette à l'eau. j'annonce avant de me rendre compte de mon erreur.

Aha, bravo Hasna, encore une bêtise que tu aurais bien fait de garder pour toi.

Heureusement pour ma fourrure, l'homme ne relève pas.

-Nous sommes aujourd'hui réunis sur le pont de ce navire pour honorer les funérailles d'une chic sirène - je crois. Aujourd'hui, elle a rejoint un monde meilleur : le paradis des poissons. Repose en paix, Aneliya.

Ces mots dits, nous jetons la nourriture dans l'océan. Une fois tous les plats vides, l'homme se met fixer l'eau, encore secoué par son deuil. Je m'apprête à m'éclipser pour le laisser seul, lorsque j'aperçois une silhouette qui m'est familière au loin.

J'approche de quelques pas pour enfin reconnaître Andréas de l'autre côté du pont. Encore ce matin je me serais peut-être réjouie de le voir, mais après ce que j'ai découvert ce midi, je ne ressens que de la colère à son encontre.

Ce sont des loups qui ont tué cette sirène. Peut-être même que c'est Andréas lui-même qui a fait le coup. Cette possibilité me refroidit tellement que même sa beauté divine m'est sans effet. J'approche vers lui à pas furieux. Il me remarque et a l'insolence de me sourire innocemment.

Hostile Désir [ Réecrit ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant