Chapitre 7 : Retrouvailles particulières

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Je rentre chez moi épuisée de cette journée. Ma mère doit sûrement être encore au travail. Demain c'est mercredi, nous avons deux exercices d'anglais à faire. Une fois dans ma chambre. Je laisse tomber mon sac au pied de mon lit et m'allonge. Je ferme les yeux quelques minutes avant de les rouvrir pour me mettre au travail. À peine j'ouvre mon cahier que ma tête tourne. Je suis vraiment épuisée : la course de ce matin, les cours, les cachotteries de mes amis...  Je me force pendant 20 minutes à essayer de faire les exercices pour au final ne pas y parvenir. Je me rallonge désespérée sur mon lit. Pourtant les langues, ça me connait ! IL a raison, je ne suis vraiment bonne à rien, je ne réussis jamais rien... Je sombre alors dans un monde de rêves et de sérénité. Je me retrouve encore une fois de plus dans la forêt, à courir, cette sensation de liberté, cette sensation de fraîcheur. Je revois la maison brûlée mais se rajoute à mon rêve : un incendie, deux personnes : deux hommes, un plus vieux et un adolescent. Je me rapproche d'eux, l'adolescent pleure, le plus vieux est à terre et a la peau complètement brûlée, il semble inconscient.

- RÉVEILLE TOI !

- Que... Quoi... Il est quelle heure ? Je demande en ouvrant soudainement les yeux.

- Il est l'heure de dîner et ça fait 10 fois qu'on t'appelle. Me crie mon père.

Je me prends deux énormes gifles, je sens ma tête tourner. Sonnée, je l'entends encore rugir au dessus de moi. 

- Lève toi !!!

Il me soulève alors de mon lit par les cheveux, je peux entendre les pleurs de ma mère au pas de la porte, elle le supplie d'arrêter mais rien n'y fait. Il me traîne par les cheveux ainsi dans tous les escaliers en m'insultant de tous les noms, il me jette par terre dans la cuisine. Il est comme fou, presque possédé. Une fois à table, je veux pleurer mais mon corps se retient. Ma mère n'est pas bien non plus, les yeux rougis, elle n'ose pas les lever pour me regarder. Mon père commence à manger le repas fait par ma mère mais recrache aussitôt sa bouchée au sol.

- C'est dégueulasse ce que t'as fait Charlie.

- Pardon mon chéri, tu veux que je te prépare autre chose à manger ? demande timidement ma mère. 

- Azalée va s'en occuper. dit il avec un sourire malsain. 

Je me lève de ma chaise et je demande doucement : 

- Tu veux manger quoi papa....? 

- Vas me chercher de l'huile d'olive et du colin à l'épicerie près de ton école. Tu y vas à pied bien sur. Et si tu n'es pas revenue dans 5 minutes, tu sais ce qui t'attendra.

Ce qu'il me demande est impossible, l'épicerie est à 10 minutes d'ici. Mais... Est ce que j'ai le choix ? Je me lève, enfile mes chaussures et cours aussi vite que je peux avec mes blessures, en direction du magasin. Il est 20h32. Les rues sont sombres, je ne suis pas très rassurée. Peu de lampadaires sont allumés. Mais j'arrive devant l'épicerie saine et sauve. Je rentre tellement vite à l'intérieur que je tombe sur le ventre dans l'entrée. Mes plaies se réouvrent laissant dégouliner le sang sur mon tee-shirt blanc : une accumulation de malchance. Le vendeur vient me relever et me demande si je vais bien.

- Oui, merci beaucoup c'est gentil. dis je avec un demi sourire, les larmes aux yeux.

- Mais vous saignez jeune fille ! il me répond complètement paniqué. 

- Ne vous inquiétez pas monsieur, ce n'est qu'une simple égratignure. 

Je fonce dans le rayon des surgelés et prends le colin que m'a demandé mon père. Je prends également l'huile d'olive dans le rayon d'en face. Je retourne près du vendeur, à la caisse, pour payer en vitesse.

- Vous êtes sûre que vous allez bien ? Me redemande-t-il à nouveau.

- Oui monsieur, je vous souhaite une bonne soirée, au revoir. dis je rapidement. 

Je vais pour sortir du magasin quand tout à coup, je fonce dans quelqu'un.

- Pardon excusez moi monsi.... 

Je lève la tête et je le vois. L'homme que j'ai vu en rêve à deux reprises, devant l'épicerie ce midi. Il est encore là. Il est grand et musclé. Je le dévisage et il fait de même, un léger sourire au coin des lèvres. Je me sens vide de toute émotion. Nous restons là, sans bouger.

- Ce serait bien de terminer votre phrase jeune fille, et également de vous pousser. Je n'ai pas que ça à faire de ma soirée. me dit-il toujours en me dévisageant

- Euh oui... Pardon... Excusez moi monsieur, au... Au revoir.

Je le contourne et il ne me lâche pas du regard. Me rappelant ma "mission", je regarde vite mon téléphone : 20h41. Ça fait 10 minutes quasiment. Ce soir c'est la fin. La chute, les questions de l'épicier, le mystérieux inconnu, tout ça m'a fait perdre un temps considérable que je ne peux pas rattraper. Je n'ose pas rentrer chez moi, j'ai peur. Mais je n'ai pas le choix. Je cours comme je n'ai jamais couru. Je cours pour ma vie. Arrivée chez moi à 20h45, je rentre pleine de transpiration et de sang sur mon tee-shirt. Mon père me fixe avec un regard mauvais. Il se lève et s'approche de moi. 

*

Je n'entends plus rien.

Je ne vois plus rien. 

Il fait tout noir et cela me convient. 

Je me réveille le lendemain matin dans mon lit. 

Je ne peux pas bouger,

Comme si j'étais paralysée. 

Je parviens au bout de dix bonnes minutes à m'asseoir sur le rebord de mon matelas. 

Douloureuse, je tente de me lever

Mes jambes cèdent sans même essayer.

Mal aux jambes, au dos, à la poitrine, aux cuisses, aux bras,

Je me demande quand sera la dernière fois.

*

Les larmes coulent sans que je puisse les arrêter. Je suis au sol, je tente de me lever. Après quelques chutes, je peux enfin tenir debout. Il est 5h30 du matin. Je sors de ma chambre difficilement. Je descends le plus discrètement possible. J'enfile un manteau et je pars : direction l'hôpital. 

Au bout de quelques mètres, je sens que je ne tiens plus. Je m'écroule sur le trottoir humide. Je suis seule dans le noir, blessée, vulnérable. Mes paupières lourdes menacent de se fermer, je ne peux pas résister. 

Chercher son nom dans Beacon HillsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant