L'Aube de ma vie

Chapitre 1

1 LA DÉCOUVERTE

- Comment peux-tu dire une chose pareille ?

- Désolée Roman, ma décision est prise. Il est trop tard pour avorter. Je veux savoir si tu veux de ce bébé ou si je dois voir une assistante sociale pour le donner à l'adoption !

Le ciel me tombe sur la tête ! Cette femme est folle ! dire que j'ai quitté mon travail pour venir me perdre dans ce quartier au milieu des embouteillages pour entendre ça !

- La DDASS ? N'y songe même pas ! Tu me dégoûtes. J'en viens moi de la DDASS ! Il est hors de question que cet enfant ait la même vie que moi. Tu m'entends ? Je ne sais pas comment je vais me débrouiller, mais je le garde !

Cette espèce de cinglée m'a appelé dans la matinée pour me demander de passer chez elle. La première idée qui m'est passée par la tête a été qu'elle cherchait un bon coup ! je ne veux pas me vanter, mais j'en suis un, même si j'ai 52 ans !

Avec ce qu'elle vient de m'annoncer, elle m'a coupé la chique pour quelque temps, à vrai dire !

Enceinte...

Je tourne le dos, avant d'avoir un geste inconsidéré et lui balancer mon poing dans la figure. Je sors en claquant la porte de son luxueux appartement, avant de m'arrêter sur le palier et de m'adosser contre le mur, les jambes tremblantes. Mon cœur bat démesurément dans ma cage thoracique. Comment puis-je rester calme après ce que je viens d'entendre ? Je peux comprendre qu'une femme ne veuille ou ne puisse pas garder un enfant pour des raisons qui lui sont propres. Je comprends aussi les difficultés rencontrent certaines d'entre-elles. Mais en ce qui la concerne, elle vient de m'annoncer qu'elle ne veut pas de cet enfant parce qu'elle veut profiter de la vie, et que la maternité n'est pas son truc !
Ça, je peux le comprendre aussi.

Bon sang ! Comment ai-je pu être aussi con pour coucher avec elle ?

J'ai rencontré Bianca huit mois plus tôt, lors d'une soirée chez des amis communs à laquelle je me suis rendu pour faire plaisir à Paul, mon meilleur ami qui voulait me changer les idées. Après le départ de Tristan, mon compagnon, quatre ans plus tôt, que j'ai eu beaucoup de mal à digérer, et devant son insistance, j'ai cédé. Le courant est passé tout de suite avec Bianca. Non seulement elle était sympa, mais sa beauté exceptionnelle, sa jupe à ras-la-moule et son décolleté plongeant ont eu raison de moi. J'ai lutté, mais pas longtemps. Après avoir broyé du noir pendant des mois, j'ai pris la résolution de me prendre en main et de sortir de l'état dépressif dans lequel je m'empêtrais.
Pour le coup, c'est réussi !

En bon bisexuel, j'ai profité de toutes les occasions qui se sont présentées à moi. Et des occasions, j'en ai eu ! Et puis Bianca est arrivée. Elle m'a sauté dessus, et je n'ai pas résisté. Aujourd'hui, je le regrette ! Mais comment vais-je faire pour me sortir de ce pétrin ? Je me rends compte de sa cruauté, de son manque d'empathie, et ça me retourne l'estomac.

Je prends plusieurs inspirations, tentant de retrouver un calme relatif, et je me redresse pour sortir de cet immeuble qui me donne l'impression d'étouffer. Il faut absolument que je réfléchisse posément à tout ça et que je fasse les choses dans les règles avant que cet enfant ne paye les conséquences de notre inconscience.
Parce que cet enfant, elle ne l'a pas fait seule. J'y suis aussi pour quelque chose.

Tristan, mon ex-compagnon et moi-même avions projeté de nous marier, et par la suite, recourir à la GPA aux États-Unis. Nous avions contacté une association de pères homosexuels qui devait nous aider à accomplir le rêve de devenir parents. Malgré la somme exorbitante, nous étions d'accord sur le fait que nous voulions, au moins un enfant. Ensuite, notre histoire d'amour est devenue compliquée et toxique, et nous avons choisi de nous séparer avant de nous faire plus de mal. Enfin, il l'a surtout décidé, lui.