Chapitre 17

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      ROMAN

    Il est 23 heures quand je décide d'aller me coucher après avoir fait les cent pas dans la maison, comme un imbécile. C'est ce que je ressens en ce moment. Que je suis un idiot. Comment expliquer sinon que je me sens aussi mal, alors que c'est moi qui ne voulais pas d'entraves ?

— Les retrouvailles se sont mal passées ? Me demande Paul, qui m'intercepte alors que je sors pour fermer les volets en bois.

— Où sont passés ta femme et les enfants ?

— Emy s'est endormie pendant qu'elle nous racontait les détails de votre voyage, et Alba est tombée sur le canapé bien avant. Quant à Alice, elle plie quelques affaires dans la cuisine.

— Ça te dit de prendre un café avec moi ?

    Il ne réfléchit que quelques secondes, avant de rentrer chez lui pour prévenir sa femme et revenir s'enfermer avec moi dans mon salon.

— Tu vas me raconter ?

    Je soupire et m'affale sur le canapé. Avec lui, je peux parler plus calmement. Avec Alice, le plus souvent cela finit par des boutades, et ce soir je n'en ai pas envie.

— C'est terminé.

    Les paroles sortent toutes seules, parce que je ne supporte plus l'angoisse qui me submerge depuis cet après-midi.

— Je suis désolé. Et comment te sens-tu ?

— Pas très bien, à vrai dire, réponds-je en avalant une gorgée de café. Paul m'imite. va passer, je pense.

    Je n'en suis pas certain. Depuis Tristan, je n'ai jamais ressenti ça pour personne. J'ai eu quelques rencontres, mais elles se sont très vite soldées par des échecs. Peut-être que je n'étais pas disposé non plus à ouvrir mon cœur à qui que ce soit.

— Tu veux qu'on sorte ? Me dit-il en désignant la porte.

    Alice doit certainement s'être couchée. Il faut dire qu'il est déjà presque minuit. En général, quand il veut sortir, c'est pour fumer en cachette. Je me moque de lui en le voyant ouvrir la porte de chez lui et jeter un œil vers l'entrée avant de refermer tout doucement.

— Fous-moi la paix, une fois de temps en temps, ça ne me tuera pas.

— Oui, mais fumer planqué comme un voleur...

    Je m'interromps. Un SMS arrive et me coupe la respiration.

— C'est lui ?

    Je lis le message avec attention.

— Ce n'est pas grave, il me demande juste de nous comporter comme d'habitude au travail, réponds-je d'un air détaché.

    Je pose le téléphone sur une chaise du salon de jardin rangée sous le petit auvent et je passe la main sur mon visage. La frustration m'empêche de réfléchir posément.

— Tu veux marcher un peu ?

— Marcher ?

— Oui, on fait un petit tour. Il ne fait pas trop froid ce soir et il n'y a personne, demain on ne travaille pas ni toi ni moi... et je crois que tu as besoin d'une bonne discussion entre amis. Je me trompe ?

— Peut-être, cédai-je en zippant mon blouson et enroulant une écharpe autour de mon cou. Paul repart chez lui mettre un mot sur la table pour Alice, au cas où elle se réveillerait et ne le trouverait pas. Il enfile un bonnet gris et nous sortons sans faire de bruit.

L'Aube de ma vieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant