Chapitre 9

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                                ROMAN

— Alors ton chef te plait ?

    Malheureusement, le lundi est ma journée libre et celle de Paul aussi. Après avoir déposé Alba et Emy à l'école et Milo à la crèche, nous avançons vers le petit bar du village pour prendre un café. Il n'est que 9 heures du matin.

— Ta femme a la langue bien pendue, m'exclamai-je.

— Je pourrais répondre à ça avec une saloperie tellement grande que tu ne la regarderais plus jamais de la même façon, répond-il en ricanant.

— Non, merci, pas la peine, m'exclamai-je, en mettant mes mains devant lui.

— Bon, accouche, il te plait ou pas ?

    Je secoue la tête, conscient que tant que je ne répondrais pas, il reviendra à la charge. Ce n'est même pas de la curiosité de leur part. Juste une façon de me faire comprendre qu'ils sont là.

— Oui, il me plait. J'ai des yeux pour voir figure-toi. Mais j'ai passé l'âge de me faire des illusions, alors n'en parlons plus. Je ne suis pas certain qu'il soit gay, alors fin de la conversation.

— Attends, attends, s'exclame-t-il en me retenant par le bras. La dernière fois qu'Alice a insisté, tu lui as dit que tu étais certain qu'il ne l'était pas ! Tu as l'air moins convaincu aujourd'hui.

— Je ne sais pas. Le soir où je suis resté avec lui pour préparer plusieurs recettes...

— Comment ? s'extasie mon ami, avec un air qui semble avoir muté en celui d'une espèce d'adolescent.

— Bordel Paul ! essaye au moins d'être adulte cinq minutes, tu veux bien ? Franchement, on ne dirait pas que t'es avocat par moments !

— Oui tu as raison, je déteins sur Alice parfois. Mais allez, insiste-t-il en me poussant du coude. Raconte-moi, Roman.

— Il ne s'est rien passé de spécial. Juste quelques regards et des frôlements furtifs... je ne peux pas l'expliquer et je n'ai pas envie de le faire non plus.

Je ris alors que Paul hèle le serveur pour commander 2 autres cafés.

— Et que vas-tu faire ?

— Comment ça, qu'est-ce que je vais faire ? Rien ! c'est mon chef, je ne sais pas s'il est gay et je ne compte pas bouger. Je suppose que vendredi prochain j'irais faire un tour à Paris voir si je fais descendre la température.

    Je lâche ça, mais cela fait bien longtemps que je ne cherche plus à passer un moment avec qui que ce soit. Depuis la naissance d'Alba pour être exact.

— C'est trop d'infos là, me lâche-t-il avec une grimace.

    Je réponds en riant et en le poussant par l'épaule. Paul a toujours été comme ça, à me titiller.

    Fin novembre, le froid s'est bien installé cette année. Je n'ai jamais trop aimé le froid, on ne sait jamais à l'avance si on doit s'habiller pour affronter des gelées, du vent ou un déluge. En revanche, dès que j'entre dans la cuisine du restaurant, ma température intérieure prend 50 degrés d'un coup... plus ou moins. Dommage que je ne puisse pas accuser les fours et les brûleurs de l'immense piano.

    Ces dernières semaines l'attitude de Lucas à mon égard a été un peu changeante, et cela me donne à réfléchir. Parfois, je jurerais qu'il est en train de plaisanter, et d'autres fois, il m'ignore et hausse le ton. L'autre soir, il a claqué la porte de son bureau après nous avoir surpris avec quelques collègues à la débauche. Nous discutions d'une de mes sorties à Paris, quelques années plus tôt assez concluante d'un point de vue sexuel. Tout le monde est au courant de mes penchants. Je ne vois pas pourquoi je devrais les cacher. J'estime avoir le droit de vivre ma vie comme je l'entends.

L'Aube de ma vieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant