Patinoire

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La porte de la salle commune s'ouvrit brusquement faisant sursauter tout le monde.

Drago qui s'endormait sur un épais grimoire de sortilèges se crispa et serra sa baguette sous le livre, prêt à se défendre. La situation dans laquelle il était le rendait particulièrement nerveux, et il devait souvent se faire violence pour ne pas jeter de sorts sur ceux qui le surprenaient.

En voyant Zabini, il s'obligea à se détendre et à desserrer son emprise sur sa baguette, essayant de reprendre sa lecture. Le jeune homme était épuisé, et la complexité des sorts présentés dans les pages qu'il déchiffrait avec difficultés ne l'aidait pas à garder les yeux ouverts. Cependant, il avait besoin de trouver quelque chose pour réparer complètement cette fichue armoire.

Il manquait clairement de motivation. Il n'avait pas eu l'occasion d'échanger de nouveau avec Potter, puisque Rogue les surveillait de près, comme s'il soupçonnait qu'il se passait quelque chose entre eux.
C'était frustrant, et ça ajoutait du stress à sa situation déjà compliquée. Bien évidemment, il y avait eu un impact sur son sommeil et sur son appétit, et les cernes sombres étaient de retour sous ses yeux.
Mais croiser le regard inquiet de Potter suffisait à dénouer un peu le nœud d'angoisse dans son estomac, comme si voir que le Gryffondor ne l'oubliait pas était une preuve qu'il tiendrait parole.

Drago grogna légèrement alors que le bruit dans la salle commune l'empêchait de se concentrer, et il leva la tête, sourcils froncés.
Visiblement surexcité, Zabini s'approcha de lui.
- Viens avec nous, le lac est gelé, une vraie patinoire !

Il allait repousser sans ménagement le métisse, quand Théo s'approcha, habillé chaudement.
- Allez Drago, viens nous aider à montrer à ces fichus Gryffondor qu'on est les meilleurs sur la glace !

Drago hésita longuement. D'un côté, il avait les pages jaunies d'un livre ennuyeux au possible, pour remplir une mission terrible et haïssable. De l'autre, quelques instants d'évasion et un peu d'air frais, au milieu de ses camarades, dans une atmosphère de normalité feinte.
Et puis, l'intervention de Nott fit pencher la balance. Il avait mentionné les Gryffondor, et il supposa immédiatement que Potter était de la partie.

Il l'imaginait sans peine, les cheveux en désordre, débraillé, les yeux brillants de joie et un sourire idiot vissé sur le visage.
C'était probablement dangereux - même si le lac était gelé, la glace devait être fine et le risque de passer au travers était important - alors le brun avait probablement été l'un des premiers à y poser le pied, comme si c'était un jeu.

Quelque chose remua en lui, alors qu'il pouvait presque voir le Gryffondor dans son esprit, et il grogna un vague assentiment. Il se leva, et referma soigneusement le livre, cachant le titre aux yeux trop curieux de Zabini.
- J'arrive.

Il monta dans le dortoir pour ranger soigneusement le grimoire, le cachant au fond de sa malle,  et il enfila un pull par dessus sa chemise. Puis, il posa sa cape la plus chaude sur ses épaules, et entoura son écharpe aux couleurs de sa maison autour de son cou.
Chaudement vêtu, il rejoignit ses camarades, et les suivit sans dire un mot, se sentant détonner au milieu des adolescents joyeux. Il ne parvenait pas à se détendre et à rire avec les autres. Il avait l'impression d'avoir perdu quelque chose d'essentiel qui le maintenait à l'écart des autres.

Il suivait ses camarades souriants et joyeux, le visage sombre et les poings serrés, l'angoisse l'étouffant presque.


Nott était à ses côtés, mais ce dernier resta silencieux, affichant juste un léger sourire satisfait. Drago s'en sentit agacé, comme s'il s'était montré prévisible, et il avait horreur de ça.
Rapidement, ils arrivèrent à l'extérieur dans le parc de Poudlard, et il oublia tout, fasciné.


Il avait neigé, et tout était blanc. Quelques flocons tombaient encore, paresseusement.
Au delà de ce monde de blancheur immaculé, le lac semblait figé, sous la fine couche de glace qui s'était formée.

Au bord du lac, il y avait un petit attroupement, et les écharpes rouge et or renseignaient sur l'identité du groupe. Bien évidemment, les lions étaient les premiers à venir se défier, s'émerveillant de la possibilité de glisser sur la surface lisse.

Et bien évidemment, Potter était celui qui était le plus loin sur la glace, les joues rouges, ses cheveux partant dans tous les sens. Il riait aux éclats, ne craignant visiblement pas de se retrouver au fond du lac.

Drago ne le quitta pas des yeux alors qu'il avançait, et il se rendit compte qu'à cet instant, si Potter lui avait fait signe et lui avait demandé de le rejoindre, il aurait obéi sans prendre garde aux risques.

Il ne comprenait pas comment le Gryffondor stupide dont il se moquait quelques mois plus tôt avait pu changer à ce point. Le gosse maigre et insignifiant semblait avoir pris de l'assurance et il irradiait littéralement.
Quoi qu'il dise, ce foutu brun était un leader né. Il se ne rendait même pas compte de son charisme, de tous les regards sur lui. Il n'avait pas compris que c'était lui qu'ils suivaient tous, qu'ils avaient osé posé le pied sur la surface gelée du lac uniquement parce qu'il s'y était précipité sans la moindre hésitation.


Soudain, leurs yeux se croisèrent. Drago s'arrêta, sans cesser de le fixer, incapable de détourner le regard. Et Potter ne détourna pas les yeux non plus. Il le regardait et il sourit plus largement, comme s'il était content de le voir.


Nott s'arrêta à ses côtés, leurs épaules se frôlant presque, et Drago revint à la réalité, clignant des yeux et détournant avec peine son attention de Potter. Son camarade le regardait lui aussi, avec un petit sourire en coin. Théo prit la parole, doucement, veillant à ce que personne ne puisse l'entendre autour d'eux.
- Tu comprends maintenant pour quelle raison il est mieux de le suivre lui ? Pourquoi je suis sûr qu'il pourrait t'aider ? Il... Il attire tout le monde, sans même le vouloir parce qu'ils savent tous de quoi il est capable.

Drago renifla, et répéta ce qu'il avait toujours dit - mais qui n'était plus tout à fait exact.
- Il me déteste. Ne sois pas stupide.

Théo gloussa et se pencha un peu vers Drago, sans quitter le lac des yeux. Sans quitter Potter des yeux.
- Pourtant... il surveille de près ce qui se passe ici. Ce n'est pas vraiment le comportement d'un ennemi, ça.  J'ai vu comment il te regardait, en permanence. 


Drago tourna la tête vers Potter et bien évidemment, le Gryffondor le fixait. Il semblait agacé, et son froncement de sourcils s'accrut quand Nott se pencha un peu plus vers lui. Le Serpentard se rendit compte avec choc que Potter ne semblait pas aimer que Théo se tienne trop près de lui. Comme s'il était... jaloux. Mais c'était impossible, non ?

Quand il ne reste que l'espoirOù les histoires vivent. Découvrez maintenant