Chapitre onze : 1754

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« Parfois, je me sens déconnectée de tout ici. J'ai passé presque une décennie à rechercher ces Fragments d'Eden ».

Lucy Stilmann.



Septembre 2017, Planque des Assassins, Londres



Le mois de septembre touchait à sa fin. Comment est-ce possible ? s'étonna Morgane, en regardant la pluie tomber à torrent par la baie vitrée. Son investissement dans, ce qu'elle appelait en son for intérieur, « la folle quête suicidaire de Minerve », l'avait empêchée d'en voir la couleur. Pour être tout à fait honnête avec elle-même, cela faisait un bon moment qu'elle avait perdu la notion du temps. Depuis le jour où Shaun l'avait appelée pour lui apprendre la tragédie de Hong-Kong, Morgane avait l'impression de s'enfoncer dans un tunnel obscur où une catastrophe l'attendait à chaque tournant. Quand ce n'était pas une mission qui tournait au désastre, c'était la trahison d'un allié. Quand on ne tentait pas de la tuer, c'était à elle de se faire passer pour morte aux yeux des personnes qui comptaient le plus pour elle dans le seul but de participer à la plus surréaliste des missions. Quand est-ce que j'en verrais le bout ? Quand pourrais-je enfin me reposer pour de bon ?

Il n'y avait pas si longtemps, Morgane n'aurait eu aucun doute quant à la réponse à ces deux questions. Le combat qu'elle menait cesserait aussitôt après la mort de Junon et la défaite des Instruments. Maintenant que la Capsule lui donnait du fil à retordre, elle voyait les chances d'une victoire complète sur l'Isu mégalomane s'éloigner un peu plus chaque jour. La Capsule n'est pas en cause. Le problème vient de moi. À regrets, elle se détourna de la baie vitrée. Il était temps de se remettre au travail.

Morgane avait retenu la leçon de sa dernière mésaventure temporelle. Après sa discussion avec Minerve, son retour à la réalité, allongée sur le trottoir, le nez pratiquement collé au pas de porte du fleuriste, lui avait causé une belle frayeur qu'elle n'était pas prête d'oublier de sitôt. Cette nuit-là, la chance était avec elle. Il n'y avait pas âme qui vive dans cette artère abondamment fréquentée la journée. Seulement, elle ne pourrait pas toujours compter sur la chance. Elle devait se montrer plus prudente sans quoi elle pourrait bien faire la une des journaux à sa prochaine réapparition dans le présent. Terminé les sauts au jugé. Son futur voyage sera aussi le dernier. Elle allait tout faire pour.

Durant les trois semaines suivantes, Morgane s'était attelée à la fastidieuse tâche de collecter toutes les informations touchant de près ou de loin à l'année 1754 et il était indéniable que si elle n'avait pas eu l'idée de hacker la base de données d'Abstergo Industries, elle serait toujours en train de chercher une aiguille dans une botte de foin. Le piratage du système informatique des Templiers alors même qu'elle les soupçonnait fortement d'être derrière l'attaque du manoir aurait pu s'apparenter à de la témérité. Les incessantes intrusions de Rebecca puis de Bishop dans leur réseau avaient fini par mettre la puce à l'oreille des cadres d'Abstergo. Leur diligence à contrer les efforts des Assassins avait permis de rattraper leur lenteur à se rendre compte de la fragilité de leurs pare-feux. Désormais, là où Bishop mettait moins d'une minute à pénétrer dans le système, il lui fallait à présent plusieurs jours, avec l'aide inestimable des Initiés, pour y parvenir. Cependant, à trop vouloir protéger leurs données les plus sensibles, les Templiers avaient négligé celles qui, à leurs yeux, n'avaient aucune valeur. Une faille sur laquelle comptait Morgane sans trop y croire et qu'elle ne fût que trop heureuse d'exploiter. Il ne s'agissait donc pas de témérité mais d'un pari qui s'était révélé gagnant.

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