Chapitre trente-quatre : Une affaire en suspens

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Nous avons sacrifié notre vie personnelle pour le bien commun.

Bayek de Siwa



« Toute ma vie, alors que je croyais apprendre à vivre, j'apprenais seulement à mourir ».

Leonard De Vinci



Satisfaite, Morgane balança la pierre ensanglantée par-dessus son épaule. Dès l'instant où Dhami toucha le sol, le temps reprit sa course normale. Elle devait déguerpir avant que Charlotte ne se hisse hors de son cratère. Comme elle effleurait son collier, une douleur atrocement familière lui fit perdre contenance. Après ce qu'elle venait d'accomplir, c'était inéluctable. Elle venait de figer le temps. Ce n'était pas rien. Sans parler de sa petite incursion dans le futur. Le futur... Quand elle se trouvait près de Charlotte, une pensée l'avait frappée. Quelque chose en lien avec Shaun. Qu'est-ce que c'était ? Elle ne put s'y attarder. Sans crier gare, sa céphalée s'accentua. Hoquetant de douleur, Morgane tomba à genoux près du corps de Dhami. C'était pire que tout ce qu'elle avait déjà connu.

- Oh mon Dieu, souffla-t-elle, en se prenant la tête entre ses mains.

Elle ne put rien ajouter de plus. Sa vision se troublait. Sa poitrine se serrait. Sa conscience se brisait. Elle était à l'agonie. Je vais mourir. Ce fut là, sa dernière pensée cohérente.

Morgane ne tomba pas dans les pommes. Elle n'était pas non plus consciente de son environnement. Elle se trouvait dans un entre-deux. Elle était comme détachée de son corps. Elle ne souffrait plus. Elle ne ressentait qu'une profonde quiétude. Un calme absolu. Elle avait accompli sa mission. Maintenant, elle pouvait se reposer. Voilà ce que cela fait de mourir, songea-t-elle. En fait, la mort n'avait rien d'effrayant. Elle n'avait qu'à fermer les yeux et lâcher prise.

Lorsqu'elle refit surface, elle flottait. Le monde avait pris une teinte grisâtre, qui n'était pas sans rappeler ce qu'elle percevait à travers la Vision. En revanche, les couleurs étaient différentes. Au loin, le centre-ville irradiait littéralement en un maelström de couleurs. Un pur concentré de vie. Morgane baissa la tête. En comparaison, son corps faisait pâle figure. A la limite du translucide, à l'exception du halo doré qui l'entourait, dont l'éclat se ternissait à vu d'œil et d'une lueur d'un vert très sombre à l'emplacement de son cœur. Du côté de Dhami, le jaune dominait avec, ça et là, des tâches cramoisies, plus ou moins grandes. Mue par la curiosité, elle se retourna vers une silhouette turquoise nimbée de noir. La mort rôdait déjà autour de Charlotte.

Morgane reporta son attention sur son corps. Quelle triste fin que la sienne. Dans un pays étranger, aux côtés d'un homme qu'elle haïssait, dans une temporalité qui n'était pas la sienne. Elle s'alarma de la réalité alternative qu'elle venait de créer et de l'impact que sa disparition aurait dans son présent avant de se rappeler que ce n'était plus son problème. Elle était morte ou peu s'en fallait. Verrait-elle une lumière blanche apparaître à l'horizon ? Ses parents l'attendaient-ils de l'autre côté ? Et Desmond, Callum, Charlotte ainsi que tous les Assassins ayant donné leur vie dans un combat perdu d'avance ? Existait-il seulement un au-delà ou alors était-elle condamnée à errer pour l'éternité ?


Si on lui avait demandé comment elle imaginait sa mort, Morgane aurait répondu « Sans souffrir, entourée de mes proches ». Ce n'était que pur fantasme, bien entendu. Elle était un Assassin. Elle avait fini par accepter l'idée d'une fin violente. Parfois, pour tromper l'ennui, elle prenait les paris. Qui aurait sa peau en premier ? Dhami ou la Capsule ? Maintenant qu'elle y était, elle aurait préféré que ce soit Dhami. Un sacrifice héroïque au cours d'un affrontement épique où elle aurait triomphé de l'invincible Instrument avant de succomber à ses blessures. Au lieu de cette fin digne d'être honorée, elle allait sombrer dans l'oubli. Quelqu'un s'inquiéterait-il de sa soudaine disparition ? Shaun. Elle comptait pour lui. Après le message qu'elle lui avait laissé, il se poserait des questions, elle en était certaine. Plus que jamais, elle regrettait la façon dont ils s'étaient quittés. Nous aurions pu être si heureux.

Assassin's Creed : DownfallOù les histoires vivent. Découvrez maintenant