Chapitre quinze : La deuxième règle

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« Vous et vos amis Assassins n'avez prêté aucune attention aux conséquences de vos actions ».

Lucrèce Borgia



Plantée en plein milieu du trottoir, les bras croisés, son regard ambré enregistrant chaque détail, Morgane se mordillait les lèvres jusqu'au sang, tandis qu'elle s'enfonçait un peu plus profondément dans ses souvenirs. Elle avait déjà retiré d'office les deux maisons situées à chacune des extrémités, en se fiant uniquement à son instinct. N'en restait plus que trois. Trois maisons avec les mêmes murs de pierre blanche, les mêmes portes peintes en noir, les mêmes fenêtres à guillotines. En voyant les fenêtres à guillotine ouvertes au rez-de-chaussée, elle élimina également la deuxième maison en partant de la droite. Son père se trouvait toujours à Abstergo Industries et, si elle n'avait aucune idée de l'heure qu'il était, Morgane était certaine qu'il n'était pas encore quatre heures de l'après-midi. Elle, enfin la version « passé » d'elle-même, n'était pas encore rentrée de l'école. Personne à la maison donc aucune raison pour qu'une fenêtre soit ouverte. N'en restait plus que deux. La 54 avec sa jardinière de fleurs roses sur le rebord des fenêtres, des voiles blancs pour préserver l'intimité des résidents et la peinture qui commençait à s'écailler sur la porte d'entrée. La 55 pourrait passer pour sa jumelle n'eut-été l'absence de fleurs.

- Puis-je vous aider, mademoiselle ?

Morgane sursauta. Une femme, la petite quarantaine, vêtue d'une élégante tenue gris perle avec un non moins élégant chapeau de la même couleur perché sur ses cheveux noirs savamment coiffés, venait de se matérialiser à ses côtés.

- Je ne voulais pas vous effrayer, s'excusa-t-elle aussitôt. En vous regardant, je me suis demandé si vous n'étiez pas perdue.

Si la politesse lui avait fait employer le mot « perdue », le regard hautain de l'inconnue était éloquent. Morgane sentit ses joues l'échauffer. Cette femme, qu'elle ne connaissait ni d'Ève ni d'Adam, lui faisait implicitement comprendre qu'elle n'avait pas sa place dans ce quartier ultra chic, où elle avait vécu les douze premières années de sa vie et où elle y résidait depuis près de trois ans, uniquement à cause de sa tenue. Pour qui se prend-elle celle-là ?

- Je cherche la maison d'Arthur Campbell. Il est mon directeur de thèse à Oxford, rétorqua Morgane avec aplomb.

Les meilleurs mensonges trouvent leur source dans la vérité. Morgane avait bien étudié à Oxford – une décision unilatéralement prise par Rikkin, pour lequel le prestige de la meilleure université du Royaume-Uni primait sur les désirs de sa protégée – dont elle était ressortie avec un diplôme en Histoire et en Anglais. Son père avait bien enseigné l'histoire à Oxford, travail qu'il cumulait avec son poste de directeur du Département des Recherches Historiques à Abstergo Industries. De ce fait, si l'inconnue doutait de sa bonne foi, Morgane était plus que préparée à assouvir sa curiosité concernant son père en général et la vie estudiantine à Oxford – dont elle conservait un souvenir mitigé – en particulier.

Ce ne fut pas nécessaire. La femme perdit son air hautain avec la rapidité de l'éclair.

- Quelle coïncidence ! Mon fils est en deuxième année de Mathématiques à Oxford. Vous le connaissez peut-être, il s'appelle Archie Pennyworth. Un garçon extrêmement brillant. Il ira loin vous verrez. Vous avez de la chance, ma sœur est la plus proche voisine des Campbell alors autant dire que je connais très bien Arthur. Un homme charmant et tellement cultivé.

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