C'est mon tour de préparer à manger. Julien est de la partie aussi. Avec son don d'électricité encore mal maîtrisé, si une excursion ne part pas dans les collines pour pratiquer avec les quelques autres dangers publics, il ne peut pas s'en servir. Puis il s'est déjà entraîné au corps à corps toute la matinée. Il me semble que Laurent lui a appris à désarmer.
Pour ma part, je profite de ma corvée de cuisine pour m'amuser et je fais bouillir l'eau avant même d'avoir allumé le feu au-dessous. C'est une petite satisfaction, mais elle m'arrache un sourire.
Nous avons de l'argent, des vivres et même un peu de superflus. J'ai conscience que ce point d'équilibre ne pourra pas être éternel, sauf que pour le moment je savoure.
La bâtisse est devenue un endroit douillet que je n'ai pas envie de quitter. Ma haine et mon désir de revanche s'émoussent face à se confort retrouvé. Heureusement, dans un coin de ma tête je me rappelle que certains de mes amis sont toujours parqués dans le camp et je retournerai les chercher. Avant que leurs esprits soient manipulés. Mais il faut quand même que nous attendions que leur don se soit révélé. Nous n'avons aucun moyen de les maintenir en vie en cas de poussée de fièvre. Je n'ai pas la moindre idée de quand le moment sera idéal. Car plus nous patientons, plus ils auront formé nos anciens camarades à nous combattre.
C'est inextricable.
— Tu te tortures, encore et toujours avec les mêmes réflexions.
— Et toi, tu es constamment dans ma tête, Cyril.
— Ce n'est pas volontaire. Et Laura perçoit souvent des bribes de ce que tu penses quand nous pratiquons.
— Elle est loin de ton niveau... C'est là que je mesure ce que tu as dû endurer pour en arriver où tu en es. Dis-moi que tu sais quoi faire pour la suite ?
— Toujours pas. De toute façon, nous ne sommes pas prêts.
— À treize, nous ne pourrons pas faire grand-chose...
— Tu es toujours en train d'osciller entre ton envie de foncer là-bas et le désespoir que nous n'en serons jamais capables. Il y aura une ouverture. Il y a toujours des ouvertures.
— C'est ce qui t'a aidé à tenir quand tu étais enfermé et torturé ?
— Non. Ce qui m'aidait à tenir, c'est de parfois capter tes pensées. Mais ça tu le sais déjà.
Je rougis malgré moi devant ma casserole de pâtes. Évidemment que je le sais. Son don s'est déclaré pile au moment où on m'amenait dans ce maudit sous-sol. Il a perçu la fournaise de mon cauchemar et les mauvaises intentions des médecins. Il a tenu bon, parce qu'encore une fois dans l'adversité et face à l'inconnu, j'étais là. Et je le comprends enfin. C'est pour cette raison qu'à son arrivée au campement il est venu vers moi. J'ai été idiote de le repousser avec autant d'acharnement.
Je délaisse les fourneaux pour dire aux autres qu'il est temps de passer à table. Je pourrais crier pour les avertir, car je sais que personne ne nous entend de l'extérieur. Il s'avère que cette rue est pratiquement déserte. Il y a quelques patrouilles de police et des personnes bizarres de temps en temps. Mais les dernières ne nous dénonceraient jamais et quand les premiers approchent Laurent ou Cyril nous avertissent.
Le repas se déroule dans la bonne humeur, nous parlons des progrès de chacun, notamment physiques. Laurent est un excellent professeur, c'est lui qui entraîne tout le monde, je l'aide ou le remplace de temps en temps. J'ai passé nettement moins de temps que lui à pratiquer avec nos instructeurs. La patience me fait défaut pour enseigner et je n'ai pas son charisme. Ni son talent pour percevoir les émotions des autres et agir comme il faut... Évidemment. J'ai tout de même affiné mes capacités, mon don. Je suis plus endurante, bref peu importe l'extrême de température avec lequel je joue, je suis capable de beaucoup de choses. C'est le même principe qu'avec un muscle. Martin aussi est devenu très bon, il arrive à localiser son attraction. Il faut dire que les exercices qu'il s'est imaginés pour s'entraîner ne lui laissaient que peu de place à l'erreur. Entouré de couteaux, il devait n'attirer que des cuillères.
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Au pied du mur
ParanormalUne mystérieuse maladie frappe tous les adolescents d'un pays dont très peu réchappent, mais ces derniers ne demeurent qu'en sursis. Et ils le savent. Dans le camp isolé du monde dans lequel ils sont soignés, Dana et ses amis vont devoir affronter u...