Chapitre 7

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Nous sommes sous terre. Je ne sais pas comment je le sais, mais je le sens, mon intuition vite confirmée par l'affichage d'un ascenseur devant lequel nous passons sans y monter. Il indique le niveau inférieur trente. Je suis peut-être sous les pieds de mes amis.

Le docteur Elias s'engage dans des escaliers et nous remontons, pour nous arrêter au niveau moins cinq.

— Je t'amènerais à ta chambre tout à l'heure, elle est au niveau moins dix. J'imagine que tu dois être pressée de rencontrer tes futurs camarades.

Je hoche la tête, suspendue à ses lèvres et légèrement excitée.

La porte à peine passée, je constate qu'il y a des militaires armés. Partout ! Je ne suis pas tranquille. Je suis vêtue de ma tenue d'hôpital en tissu presque transparent et ouverte derrière, dans une culotte qui bâille... Je suis soudainement prise d'un accès de peur et de pudeur. Je suis vulnérable.

— Ne sois pas inquiète, tu vas tout comprendre très vite.

J'en doute, je suis certaine qu'ils vont encore me mentir, comme ils le font à priori depuis que nous sommes là.

Après avoir parcouru un long couloir percé d'une infinité d'ouvertures, nous nous arrêtons devant une porte à double battant qu'Elias franchi sans ralentir.

La vision me coupe le souffle. La pièce est immense, aveugle, des néons aux lumières crues éclairent des dizaines d'appareils sportifs. Il y a aussi des tatamis dans un coin, une piste de course qui encercle le tout. Et des adolescents. Et Camille.

— Dana !

Avoir imaginé qu'elle était en vie ne m'avait pas préparé à la revoir. Je reste statufiée et je suis submergée par l'envie de pleurer.

Elle me serre dans ses bras et ça me fait un bien fou. Ses cheveux châtains sentent le shampoing qu'il nous donne, mais ça me réconforte quand même.

— J'espérais pas te voir si vite, mais je savais que si quelqu'un était capable de s'accrocher ce serait toi.

Je ne comprends pas tout ce qu'elle me dit, mais complètement hébétée je ne demande pas d'éclaircissements.

Le docteur Elias met fin à nos effusions et me fait visiter, après que beaucoup se soient arrêtés pour me saluer. Tous les visages me sont familiers, certains ont beaucoup changé avec les années. J'imagine que j'en apprendrais plus, plus tard. J'étouffe la déception et la tristesse de ne pas avoir vu Cyril et espère le croiser ailleurs.

— C'est l'étage qui est dédié à votre réhabilitation. Comme tu as pu le constater, un grand nombre de ceux qui ont eu une rechute dans le camp sont ici. Malheureusement, certains ne s'en sont pas sortis, mais notre taux de survie s'améliore au fil des connaissances nouvelles. Il y a le réfectoire, une infirmerie, des salles de cours privés, mais tu en sauras plus demain lors de ta première journée. Je dois te faire part d'une chose importante, mais elle risque de te blesser. Et il te faut éviter les émotions fortes, déclare-t-il peu sûr de lui.

— Je vous écoute.

— L'épidémie n'est pas apparue naturellement. Nous n'avons pas encore déterminé comment, mais un pays a fait des expériences de manipulation génétique. Je te passe les détails indigestes sur le comment et des procédés, mais il y aura des cours à ce sujet si tu es intéressée. Pour résumé, ils tentaient d'améliorer les compétences de leurs soldats, mais la nature a été capricieuse, leurs vecteurs se sont répandus dans la nature, il se trouve que les adolescents y étaient particulièrement sensibles. Comme vous vous doutez, beaucoup sont morts, même si on a essayé de vous préserver de cette nouvelle. J'aimerais te préserver un peu plus, mais je sais que tes camarades vont vendre la mèche et j'ai peur qu'ils ne le fassent pas correctement. Sur la base nous sommes protégés, mais le monde a changé ces quatre dernières années, c'est la guerre. Pas la troisième guerre mondiale, mais tout comme. La misère frappe, la nourriture manque, même en France, les réfugiés climatiques s'accumulent à nos frontières, dans l'Europe c'est chacun pour soi... Bref, les tensions politiques font que nous avons fermé nos frontières. Tu suis jusque-là ?

Au pied du murOù les histoires vivent. Découvrez maintenant