La mort à ses trousses

Epilogue

« Jérôme est en ville. »

Voilà bien longtemps que je ne l'avais pas vu. A l'instar des autres Lumas qui avaient donné de leur personne pour me sauver de la mort, vingt-cinq ans plus tôt, nos échanges étaient devenus rares. L'immortalité ne m'avait jamais totalement séduite et une année après avoir donné mon accord, nos corps avait repris le fil de leur vie. Je ne me voyais pas vieillir sans mes parents, ni avec la même forme physique. L'éternité n'était pas pour moi, et Aiden m'avait suivie dans cette vie d'humaine.

« Oh, vraiment ? » répondis-je à celui qui partageait ma vie depuis le lycée

Il était à mes côtés, assis sur notre canapé trois places. Nous avions l'habitude de parler, sans ouvrir la bouche. Notre lien n'avait fait que s'accroitre avec les années, se renforçant toujours plus. Tout nous était naturel à présent.

« J'ai l'impression qu'il compte rester. » m'informa Aiden.

Sa main dans la mienne m'était réconfortante et ce feu qui m'avait toujours protégé était des plus joyeux, chaque jour qui passait. Nous n'avions jamais changé de comportement l'un envers l'autre, même en présence de nos enfants. Ce jour-là ne faisait pas exception.

— Vous n'êtes pas attentif, se plaignit Nolhan.

L'ainé nous avait réuni au salon, pour nous annoncer une importante nouvelle. Je m'inquiétais toujours à son sujet, car contrairement à sa cadette de deux ans, mon fils n'était pas un Luma. Même s'il n'était pas effrayé par ce monde, il préférait en rester éloigné. Il s'était habitué à n'être qu'un humain et cela me dérangeait, plus que lui. J'aurais voulu qu'il ait des pouvoirs, tout comme son père. Personne ne pouvait choisir cependant et j'essayais encore de me résigner.

« Minah, tu te perds. » remarqua mon mari.

Je secouai la tête avant de me reconcentrer sur le jeune homme de dix-neuf ans. Il avait hérité des cheveux noirs et des yeux bleus d'Aiden, ce qui me ravissait. Mon bébé était incroyablement beau et il faisait tourner les têtes ! Malheureusement, il n'avait jamais ramené quelqu'un à la maison. Il croyait aux âmes-sœurs et à l'amour en un regard. Il patientait donc, à mon plus grand désarroi.

— On t'écoute.

Mon fils était nerveux, jouant avec ses doigts, s'efforçant de poser ses yeux sur nous. S'il avait l'apparence du Luma, il avait plutôt pris son caractère de moi. C'était amusant. J'aurais aimé que Dalia ait mes cheveux bruns et la personnalité d'Aiden. Mais elle s'était complètement détachée de nous. Elle avait une teinte ni noire ni brune, c'était un mélange particulier et son caractère me faisait grincer des dents. A dix-sept ans, elle n'en faisait qu'à sa tête et contestait toutes nos décisions. Elle n'écoutait qu'elle-même et abusait de ses pouvoirs. C'était insupportable.

Nolhan se racla la gorge et je revins sur lui.

— Je suis amoureux.

L'annonce me fit frapper des mains, le sourire aux lèvres.

— Vraiment ?

Je ne comprenais pas très bien sa mine renfrognée et son angoisse. Il savait que j'attendais cet instant depuis longtemps !

— C'est une personne formidable et je suis sûr que vous l'aimerez, si vous prenez le temps de la connaitre. Elle prend soin des autres et...

— On la rencontre quand ? le coupai-je, toujours heureuse.

Aiden était étrangement silencieux et patient. Il devait en savoir plus que moi. Son pouvoir s'était renforcé et il pouvait à présent entendre les pensées de qui il voulait. Il ne se privait pas de faire son papa poule, et je détestais ça. Même si Dalia était exécrable et Nolhan discret, ils savaient tous deux que nous étions à leur écoute en cas de problème.