Chapitre 10 : Arrêter de vivre ? Survivre ?

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Cathy m'avait raccompagnée depuis plus de quatre heures à présent. La nuit était tombée et mon réveil m'indiquait 3h24. J'aurais dû dormir depuis bien longtemps, pourtant, je n'y parvenais pas. Aucune question ne tourbillonnait dans mon esprit, seuls les derniers événements dansaient dans mon esprit. En moins d'une journée, j'avais été propulsée dans un univers que je ne connaissais pas et surtout, qui ne m'effrayait pas.

A présent seule dans mon lit, cette absence d'inquiétude m'inquiétait. Je savais qu'il y avait quelque chose d'autre. Et j'étais persuadée que ce quelque chose était lié à Aiden, d'une façon ou d'une autre.

Je me redressai en passant une main sur mon visage. Il y avait aussi ces actions, dont je n'avais pas été témoin, mais qui m'avaient été contées. Arnaud avait modifié les souvenirs de mes professeurs, pour qu'ils pensent mon absence due à la fièvre. Il avait également transformé ceux de mes parents, afin que les deux versions concordent. Et puis, il y avait Cathy et la barrière qu'elle dressait chaque nuit autour de ma maison. C'était la raison pour laquelle les Obscurs n'avaient jamais attaqué une fois le soleil couché.

Sur le chemin du retour, Cathy s'était alarmée la concernant. Le stress que je lui en veuille de m'avoir entrainée dans tout cela l'avait poussé à se ronger les ongles. Evidemment, je l'avais rassurée. Personne ne m'avait embarquée dans quoique ce soit. C'était moi, cette nuit-là, qui avait croisé leur route par un pur hasard. Je n'aurais pas dû aller si tardivement au cinéma.

Finalement, bien trop éveillée, je me levai. Dans le noir, je m'approchai de ma fenêtre et tirai légèrement le rideau. Je n'avais pas fermé mon volet, je ne le faisais plus depuis ma rencontre avec ces sombres silhouettes. Me perdant dans la contemplation du lampadaire, dont la lumière grisaillait, je pensais à Aiden. Je serrai le tissu entre mes mains, me rappelant combien le sentiment d'humiliation l'habitait. Ils s'étaient amusés de lui.

Je me souvins de leurs regards, de leurs sourires dissimulés, satisfaits. Ils s'étaient crus invincibles, indestructibles face à lui. Et l'amour-propre d'Aiden en avait été blessé. Je me rappelais ses lèvres pincées et son regard triste. La terreur était inscrite au fer rouge sur ma peau, mais sur la sienne, il y avait l'impuissance. Jamais mon ami n'oublierait ce jour. Sans ses compagnons, il m'aurait perdue. Il se pensait faible, alors que je ne voyais en lui que force. Il avait été fou d'intervenir seul, mais il avait suivi son instinct. Mon Soleil était loin de ce qu'il pensait de lui-même.

Je relâchai le rideau et soupirai. J'aurais tant voulu parvenir à lui faire comprendre qu'il était exceptionnel. Il m'avait sauvée la vie, qu'importent les erreurs qu'il avait pu commettre. Peu m'importait les « si », tout ce qui comptait à mes yeux étaient les faits. Malheureusement, ce n'était pas son cas.

Je posai ma tête sur la vitre, soupirant une nouvelle fois. J'étais tombée dans l'illusion de ses rires et de ses sourires, sans chercher les pleurs qui s'y cachaient. Je m'étais contentée de l'image qu'il donnait aux autres et je m'en voulais désormais. Comment pouvais-je m'appeler amie ? Je pensais le connaitre, mais de lui, je ne connaissais que la surface. Je ne pouvais pas parler d'un « ami rieur et blagueur », ni d'un « ancien Aiden ». Pourtant, cette facette de lui me manquait déjà. Son sérieux, son inquiétude, sa maturité, je n'en voulais pas. Celui que j'appréciais, c'était l'Aiden insouciant, même s'il m'exaspérait quelques fois. Il était mon oxygène. Qu'allais-je faire s'il disparaissait derrière les nuages ?

Je rouvris les yeux, tout en me disant que j'avais besoin d'air. Ainsi, j'ouvris la fenêtre et m'assis sur son rebord. J'observais toujours la lumière apparaitre et disparaitre, tandis qu'un souffle frais venait à moi. Et puis, il était apparu dans ses grisaillements. Vêtu de noir, il m'avait d'abord fait penser à leur ombre. Puis, tandis qu'il tentait de sourire, j'avais reconnu mon Soleil et ses yeux bleus. Ces derniers semblaient rayonnants, parmi toutes ses couleurs sombres.

La mort à ses troussesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant