Je mâchouillais le bout de mon crayon, nerveuse. Je regardais mon cahier d'histoire, mais j'étais trop consciente de la présence d'Aiden pour réellement me plonger dans la seconde Guerre Mondiale. Il n'était pas officiellement revenu au lycée mais, avec son don, il persuadait les autres que sa présence était totalement normale. Il avait pourtant cinquante ans et se tenait assis comme un adolescent de dix-sept ans. Il se fondait dans le décor avec une facilité qui me déconcertait.
— Merci.
Le crayon s'envola à l'autre bout de la pièce, manquant de peu Aiden. Les autres lycéens présents nous fixaient, peu certain concernant la situation. Certains gloussaient et me demandaient si je voulais assassiner quelqu'un. Je savais que j'aurais dû rebrousser chemin en apercevant des gens de ma classe. J'étais discrète en cours et aucun d'entre eux ne me connaissait réellement. Je ne souhaitais pas que cela change.
— Ton pauvre crayon ne survivra pas, si tu continues à le maltraiter, me conseilla Aiden, en le posant sur ma table.
Trop concentrée sur les autres, je n'avais pas remarqué qu'il s'était levé. En accord avec son observation, je rangeai l'objet maltraité dans ma trousse. L'instant d'après, je jouais avec mes mains, toujours focalisée sur mes pages. Les mots écrits traversaient encore mon esprit, sans former de phrases cohérentes.
Aiden me reparlait et j'en étais vraiment contente. Cependant j'étais devenue si mal à l'aise en sa présence ! Je ne savais plus trop comment réagir, ni quoi dire. J'avais peur de le blesser et qu'il disparaisse à nouveau, même si je savais que c'était ridicule. Il avait été beaucoup trop mal de m'abandonner pour recommencer.
Le silence de la permanence m'inquiéta soudain et je relevai le regard. Les lycéens parlaient, mais je n'entendais rien. Ce n'était pas normal. Puis, en avisant Aiden, la tête posée sur sa paume, je me détendis. Je ne savais pas ce qu'il avait fait, mais il était responsable. Je n'avais rien à craindre.
— J'ai demandé à Cathy de nous aider un peu.
— Oh elle a dressé une barrière entre eux et nous ? Est-ce qu'ils nous voient ?Je laissai mes yeux se promener un peu partout, fascinée. L'envie de me lever et de trouver la limite de la barrière me démangeait. Je sentais cependant que ce n'était pas une bonne idée.
— Il se peut que j'ai aussi demandé Jérôme.
— Il peut créer des illusions, c'est ça ?Aiden hocha la tête et j'en fis de même, avant de me sentir idiote. Voilà que je me mettais à réagir de façon stupide, en plus de ne pas savoir comment agir.
— Pourquoi tu leur as demandé de l'aide ? questionnai-je en fronçant les sourcils.
Il laissa tomber son effort de paraitre confiant et posa ses mains devant lui. Son regard était fuyant.
— Depuis que tu le sais, j'ai tendance à te répondre. Je suis désolé. C'est aussi nouveau pour moi...
— Aiden, tu es gêné ? ris-je.Il s'adossa au dossier de sa chaise, même s'il était trop tard pour freiner mon amusement. Mon Soleil n'avait jamais eu une telle réaction en ma présence et, pour une fois, le changement me plaisait.
— Ce n'est pas drôle, plaida-t-il.
Il pouvait raconter ce qu'il voulait, je voyais bien qu'il se retenait de sourire.
— Tu m'as manqué, lâchai-je.
Ses prunelles bleues semblèrent s'éclaircirent encore et j'en souris d'autant plus. Peut-être que le réel Aiden était encore mieux que celui rieur et blagueur que j'avais connu jusqu'alors.
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La mort à ses trousses
ParanormalMa vie suivait son chemin, sans trop d'embûches. J'avais dix-sept ans, je la croquais à pleine dents. Je n'attendais que de vivre un amour beau et fort. Et puis, un soir, tout a basculé. Le bonheur que j'éprouvais a volé en éclats. Dix minutes, tout...