Inspirer, Expirer

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《Oui, coach... Je vais essayer d'assurer》
Dit Jordann en posant son téléphone face écran sur la table, signe que sa conversation était terminée.

- C'était ton coach, il voulait quoi ? Demanda Krys assis face à son frère en posant sa tasse qu'il venait de vider.

- Me sermonner et me rappeler le match du réveillon.

- Le coach Peters a raison, tu ne participe plus aux entraînements et tu te laisses aller intervint leur mère en entrant dans la pièce.

Jordann serra le poing signe de son agacement à constamment entendre la même chose.
Mais comme à chaque fois il va sortir une excuse pour clore le débat.

- Le manche de mon sac de sport à lâcher. Se contenta t-il de répondre.

Krys habitué à ses excuses bidons lui jeta un regard incrédule mais ne répondit rien et se leva pour poser sa tasse dans le lave-vaisselle.

- Je pars au boulot. On se voit ce soir dit Krys en posant un léger baiser sur le front de sa mère avant de quitter la pièce.

- Des sacs de sport, tu en as plusieurs. Pourquoi tu n'en prends pas un autre tout simplement ? Demanda t-elle à son benjamin.

- Non.

- Dans ce cas, répare-le.

- Je ne peux pas.

Agacé par le ton désinvolte de son fils, la mère Amichia poussa un soupir.

- Que te manque t-il dans cette maison pour le réparer ?

Elle sentit son fils se tendre à sa question. Mais attendait sa réponse.

- Tu voudrais savoir ce qui me manque dans cette maison... tu parles de cette maison fantôme, où plus personne ne se parle réellement ou on entend plus le moindre rire. Et le truc c'est que je sais et comprends parfaitement pourquoi. Ce qui manque dans cette maison Maman, c'est Moëra.
C'est Moëra qui me manque Maman, tu voudrais que je change de sac mais ce sac c'est elle qui me l'a offert pour mon premier tournoi et depuis il est mon porte-bonheur, je ne participe à aucun tournoi sans et s'il s'use, elle le répare à chaque fois. Et maintenant elle n'est pas là... Maman... sa voix se brisa... elle n'est plus là. Sa phrase se termina dans un sanglot.

Surprise par la tirade de son fils, elle se surprit à avoir des frissons. Il venait de mettre des mots sur une réalité qu'elle ne voulait pas voir et qu'elle façonnait pourtant jour après jour.

Les larmes de son fils lui déchirant le coeur, elle s'efforça en vain de retenir les siennes et vint le prendre dans ses bras.
Dos à elle, il voulait tenter de dissimuler ses larmes mais ses reniflements le trahissaient.

- Tu sais Jo, elle voudrait que tu participes à ce tournoi dit-elle d'une voix à peine audible, enrouéepar la peine.

- Maman, je n'y arriverai pas.

- Si Jordann, tu peux et tu vas le faire... pour elle.

En disant cela, elle était passé devant son fils et lui faisait face. Lui assis et elle debout, à ce moment, elle le revoyait des années en arrière quand après s'être disputé avec son frère, il venait chercher du réconfort auprès d'elle. Comme à cette époque, les yeux de son fils brillaient de l'éclat de sa peine.

Et comme à des années auparavant, elle le serra dans ses bras, transmettant dans son étreinte toute la chaleur et la force qu'elle emmagasinait.

Force qui malheureusement aujourd'hui lui faisait défaut. Florence se montrait forte face au monde mais, elle n'en pouvait plus. Combien de fois par journée finissait-elle en larmes quand tout autour d'elle lui rappelait l'absence de sa fille ?
Combien de fois avait-elle sursauté en entendant la porte s'ouvrir ?
Combien de nuit blanche avait-elle passé allongée sur le lit de sa fille serrant contre elle son oreiller ?

Elle ne comptait pas, le seule décompte qu'elle avait en tête et qui l'obsédait, en était à 274.

274 jours que sa fille n'est plus dans sa maison.
274 jours qu'elle est au prise d'un malade.
274 jours que Florence ne sait pas où se trouve sa fille.

Elle se rendait compte à présent que son désarroi l'avait fait se détourner de tous. Elle avait négligé sa vie de famille et sa propre personne.

Les larmes de son fils à ce moment-là, la mettait face à l'évidence. Préoccupée par son propre chagrin, elle ne voyait pas celui des autres.

Ses enfants et son mari avaient besoin d'elle et elle avait besoin d'eux. Ils avaient tous besoin du soutien de l'autre.

Comme pour se redonner du courage et comme un top départ pour se ressaisir, elle inspira un bon coup. Et mit fin à leur étreinte.

Jordann, même s'il avait les yeux encore brillants, avait séché ses larmes.

-Bon assez fait les pleureuses pour aujourd'hui. Tu y vas à cet entraînement ou pas ? Demanda Mme Amichia à son fils dans un ton qui se voulait plus détendu.

En réponse, il se leva un grand sourire aux lèvres. Dominant sa mère de toute sa taille, il lui posa un léger baiser sur le front avant de s'éloigner vers l'escalier qui mène aux chambres.

Il redescendit une dizaine de minutes plus tard, en tenue de sport et son sac rafistolé à la va vite sur son épaule.

Sa mère vint le rejoindre devant la porte.

-Attends un peu petit, en rentrant, tu me laisseras ce sac que je puisse le remettre dans un état plus stable se moqua t-elle en tirant sur un fil qui pendait du point de couture.

- Te moques pas, j'ai fait ce que j'ai pu. La suivit-il dans son rire.

- Oui je sais fils. Et n'oublie pas ajouta t-elle alors qu'il sortait déjà de la maison. Inspire par la narine droite, expire par la gauche, fais un grand sourire à la vie et hakuna matata.

Jordann s'arrêta en plein milieu de l'allée en entendant cette phrase et se tourna vers sa mère en lui lançant un regard de reconnaissance.

Cette phrase, c'était celle de Mo. A chaque fois que l'un d'eux n'avait pas le morale, elle la lui sortait. Ça avait le don de l'agacer parfois mais aujourd'hui cette phrase absurde le réconfortait plus qu'autre chose.

Regonflé à block, Jordann se rendit à son entraînement au grand plaisir de son entraîneur.

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La suite au prochain numéro 😉

Stockholm SyndromeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant