Coquillettes

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07 Avril 2035.

Le retour à la réalité a été assez brutal. Dès que nous avons pris place dans la petite citadine de Blake, la tension sexuelle a fondu comme neige au soleil. À mon plus grand désarroi. Dire que nous étions mal à l'aise serait un euphémisme. C'était bien au-delà de ça. Durant le trajet jusqu'à chez lui, nous n'avons pas osé parler, ni même nous regarder.

Alors j'ai passé les vingt minutes, mon attention braquée sur l'extérieur, à écouter une émission stupide que la radio diffusait et à songer à notre situation. Jusqu'à présent, à chaque fois que nous couchions ensemble, c'était sur un coup de tête. Nous n'avions pas le temps de réfléchir à quoique ce soit d'autre que notre plaisir immédiat. Mais ce soir... c'est différent. C'est comme si nous avions pris rendez-vous. Ça n'a plus rien de spontané.

Quand Blake déverrouille la porte de son appartement, le malaise entre nous n'a pas diminué. Je regrette d'ailleurs de ne pas lui avoir demandé de me ramener chez moi finalement. Je crois que je n'ai plus envie de tout ça... Nous n'arrivons pas à nous regarder et il faudrait que nous couchions ensemble ? Ça n'a aucun sens. Je referme derrière moi en ricanant à la pensée que lui comme moi ne sommes pas très doués pour les relations sexfriends.

— Tout va bien ? m'interroge-t-il après avoir entendu mon rire.

Je me tourne vers lui et fais face à son intérieur. Tout est superbe. L'endroit a un style industriel très assumé qui s'harmonise à la perfection avec les murs en vieilles briques rouges et les immenses fenêtres aux montures sombres.

Sur ma gauche, une cuisine aux meubles noirs ouvre directement sur une longue table grise autour de laquelle des bancs sont installés. Au fond, séparé par un escalier en colimaçon, le salon semble confortable avec ses deux canapés en cuir marron, sa table basse assortie à celle de la salle et son grand écran.

Sur la droite, il y a seulement une petite commode avec un téléphone fixe et une lampe. Un peu plus loin, un coussin noir est installé à même le sol, non loin de gamelles. Je fronce les sourcils. Blake a un animal. J'ignore pourquoi cette idée me surprend.

— Tu as un animal ?

— Un chat.

J'adore les chats. C'est d'ailleurs pour ça que j'étais heureux que Sun ait ramené Pancake à la maison. J'attrape l'avant-bras de Blake que je serre tandis que mon regard essaie de repérer le félin dans la pièce.

— Tu en as vraiment un ?

Il rit, se moquant ouvertement de ma réaction, mais je m'en fiche. Il y a encore quelques semaines, pour moi, ce mec était un sans cœur et à présent, j'apprends qu'il a un animal de compagnie. Il me tapote la main comme pour me dire que tout va bien puis m'explique :

— Je vis en coloc' ici. Elle appartient à Pete donc techniquement, elle n'est pas à moi.

— On a un chat à la maison aussi, mais c'est Sun et Ezra qui l'ont trouvé dans une ruelle donc techniquement Pancake n'est pas à moi non plus, marmonné-je, en faisant la moue. Mais je fais comme si...

Bien entendu, cela l'amuse un peu plus. Je soupire et le lâche. Sans attendre, je retire mes chaussures et m'avance dans la pièce, en continuant de chercher le félin. Mais mon attention tombe aussitôt sur le parquet foncé qui est parfait sous le pied. Lisse, mais pas trop. Même en soquettes comme je le suis à cet instant, je ne risque pas de glisser comme un idiot.

Des miroirs habillent le mur et semblent pouvoir être cachés par des panneaux qui coulissent. J'imagine alors l'endroit sans meubles et sans l'escalier en plein milieu. Ça pourrait faire une salle de danse du tonnerre. D'ailleurs, je suis presque persuadé que ça l'a été un jour. Voyant que j'ai un peu de place, je réalise une pirouette. L'adhérence est parfaite.

nothing like us. - idy 4Où les histoires vivent. Découvrez maintenant