Prologue

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1500 ans auparavant:


   Il arpentait les hautes herbes des nouvelles terres, ses pas flottants au-dessus du sol.

Un groupe de créatures à la peau grisâtre se tenait assis en tailleurs dans cette nature sauvage. Ce champ qu'il voyait au travers de son esprit, et de son cercle sans couleur.

Tous étaient silencieux, se tenant droit, les yeux comme aveugles.


Il s'arrêta au centre du cercle, observant, dans un sourire de victoire, l'immensité s'offrant à eux:

"Mes enfants, clama-t-il. Les prochains siècles seront guidés par l'espoir de notre victoire. Débute la naissance de notre plus belle création."


Un bruit sourd, celui de la destruction, encombra leur discussion.

Il demeura impassible, calme.

"Ma chère soeur, soupira-t-il.

-Je vois que je n'ai pas été conviée au Conseil, râla-t-elle."


Il cligna des yeux, et ses pupilles devinrent d'un rouge pourpre, dans lequel brillait un nouveau C, encerclé d'un serpent. Elle recula d'un pas, hésitant sous la surprise.

"Entre parmi nous, et tu seras à nouveau conviée, affirma-t-il.

Elle secoua la tête.

-Je ne veux pas causer leur perte.

-C'est un refus quelque peu étrange pour la destruction, rit son frère."


Elle sera la mâchoire, tandis que sur chacune des poitrines des créatures, la marque refit surface.


"Entre parmi nous, reprit-il.

-Et quelle en sera ma place ?

Un long râle s'échappa de sa gorge.

-Crois moi ma chère sœur, tu auras le plus grand rôle à jouer de notre règne."


Avant qu'elle n'eut le temps de répondre, une vive douleur s'engouffra en elle, lui arrachant une grimace.

Un instant plus tard, la marque était à jamais gravée en elle, coulant dans ses veines.


Une longue vibration résonna dans le cercle, et tous ressentirent un soulagement et une force multipliée. Leurs voix résonnaient dans les esprits de chacun. Comme s'ils n'étaient plus qu'un seul ordre, qu'une seule Organisation.


"Notre cercle se ferme, tout comme les Cartiens naissent, hurla l'Etre. A jamais !"



                                                                                     PROLOGUE 


Elle reprit doucement sa respiration, puis son calme.


Le silence revint soudainement dans cette trop grande pièce ayant abrité les échos de la douleur.

La douleur ? Des cris ?

Les souvenirs se rassemblaient un à un, tels des pièces de puzzle, pour reconstruire les faits, ses faits.


Ses yeux s'agrandirent et elle ne put les refermer, voyant à chaque fois la scène se reproduire. Il lui fallut pourtant du temps pour se rendre compte que les vestiges de celle-ci se trouvaient devant elle.

Du sang, rien que du sang.

L'odeur lui chatouillait les narines, et elle se courba, prise de nausées. Sa lame était pleine de cette substance aqueuse et pourpre, presque noire. Elle tremblait comme une feuille en automne.

Son cœur vacilla quand, voulant agripper sa jupe pour se rassurer, elle ne rentra en contact qu'avec les restes de son intérieur.

Elle était emplie d'un dégoût total. Pour elle, pour son acte impardonnable.

Elle avait envie de pleurer, mais elle ne réussit qu'à extraire de sa gorge en feu un cris perçant, qui se brisa contre les parois blanches de la salle.


Cette pièce était immense, vide, alors qu'elle entendait une voix...Des voix.

D'abord celles des conseillers, qui lui avaient confié cette mission. De ceux qui lui avaient fait répéter chacun des gestes à accomplir.

Puis, celle de son père lui révélant à quel point il était fier de la compter dans ses rangs.

Et enfin, celles de sa mère. Celle qui l'avait mise en garde, ou du moins, avait essayé, lui faisant comprendre que ces hommes n'étaient que des machines à tuer, dangereux et imprévisibles.

Sa mère s'était agenouillée devant elle, et tandis qu'elle fixait ses yeux clairs, presque blancs, elle avait serré ses mains ridées dans celles de sa fille, et avait articulé, d'un ton neutre «Ils sont prêts à faire des choses que tu n'imagines même pas».


Bianca se laissa tomber à terre, inspirant et expirant fortement.

About de souffle, elle finit par crier:

« Si, je le sais, car je viens moi-même, de commettre un meurtre ! »




Ce sang...Coulant de ses doigts, au sol dans un petit cliquetis sanglant. Ce silence... Insupportable bruit de l'étrange. Et cet être, allongé, le regard fixe, le visage parfait. Aucune rougeur, juste cette blancheur translucide. Elle dut regarder plusieurs fois ses pupilles inertes pour réaliser. La jeune fille était souillée d'un sang inconnu et son odeur remontait jusqu'à ses narines. Elle aurait voulu vomir. Son cœur et sa peur battaient ensemble dans un rythme infernal. La vie de ce corps inanimé lui avait été retirée sauvagement... Et elle n'était pas innocente.

Visage de l'oubliOù les histoires vivent. Découvrez maintenant