chapitre 14

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L'hôtesse de l'air, une grande blonde élancée me secouait mollement le bras. Elle tentait sûrement de me réveiller. Il n'y avait plus de bruit autour de moi, plus de gosse qui voulait jouer aux cartes. C'était calme.
- Madame... Madame Desronce... elle me regarda le visage penché sur moi. Nous sommes arrivés.

Je me relevais péniblement. Une fois avoir quitté l'avion, je pris mes deux valises et mes bagages à main je me dirigeais vers une salle de réception. La climatisation de la pièce me faisait frissonner. À côté d'une plante à moitié desséché se tenait une femme recouverte d'un grand foulard vert brodé de perles. Elle se tourna vers moi. Son regard avait quelque chose de très sadique, de petits yeux gris relevés par de belles prunelles rose me regardait de loin. Elle me dévisagea et se dirigea vers moi.

C'était Chilla, elle avait considérablement maigri mais se trouvait en de bonnes conditions physique. Un jupon vert d'eau recouvrait son haut jaune citron et lui cachait les pieds.

Elle était toute en couleur! On ne pouvait pas la rater...
- Mari..aaa! Me lança elle avec un faux sourire.
- Chilla. J'avais dit ça du ton le plus froid qui ne soit jamais sorti de ma bouche.

Heureusement, Chilla n'avait pas de sentiments et se contre-fichait de mon amabilité distante. Elle prit une de mes valises après m'avoir serré la main. Celle ci était recouverte de bagues en argent toute aussi belles les unes que les autres et un grand tatouage de henné lui recouvrait tout le bras.

Elle n'avait pas changé, juste un peu bronzé, ses cheveux étaient toujours aussi splendides, comme tissé dans un rayon de soleil ou je ne sais quoi, ses mouvements étaient gracieux et elle avait toujours la curieuse façon de vous parler tout en souriant et en paraissant avoir une chose atroce derrière la tête.

Nous nous dirigions vers la sortie. Une bouffé de chaleur humide m'attaqua à l'ouverture des portes.
- Au début tu auras chaud, mais dans une semaine ça passera... souffla Chilla en marchant devant moi. D'ailleurs c'est pour quand ton bébé?
- Euh pour...ça fait sept mois, alors je sais pas...
- Je suis devenue infirmière, donc je pourrais être ta sage femme si tu veux.
- Y a pas une différence entre sage femme et infirmière?

Nous sommes descendu un escalier en béton et étions arrivé dans un garage.

Chilla tourna la tête et me lança:
- T'inquiète pas je vais assurer, moi aussi j'ai accouché mais j'étais toute seule pour le faire!

Nous arrivons devant un 4×4 bleu. Elle sortit une clé et l'ouvrit. En réalité, je m'attendais plus à ce qu'elle ait une vieille ferraille sur roues ou quelque chose de moin... gros. Elle mit mes bagages dans le coffre et m'indiqua la place passager sur laquelle je m'étais assise.

Une fois avoir démarré l'engin et continua:
- ... voilà et donc je pourrais plus t'aider que tu ne le crois. Oh! j'allais oublier, ça fait un mal de chien l'accouchement! Alors...

Elle continua à parler devant elle en conduisant sur une route asséchée, je sais qu'on ne dit pas qu'une route est asséchée, mais là c'était vraiment le cas.
- ...et ton travail est juste à côté de ma maison. Franchement pour une nana qui n'a pas de sentiments, je t'ai trouvé un super boulot!

Nous avions pris un route plus récente qui menait à un rond point décoré de statuettes ancestrales.
- ...Ah! et j'espère que tu parles bien l'anglais parce que en dehors des cours que tu donneras, c'est la seule langue que tu vas entendre.

Nous passions dans une petite ville, ma tante qui se plaignait que Fontainebleau était sal aurait fait un arrêt cardiaque! Les gens circulaient principalement sur des vélos ou de vieux scooters. Les femmes portaient toute de magnifiques tenues, aucune identique à une autre. Certaines avaient un point sur le front qui d'après moi ressemblait plus à une verrue chez les femmes âgées. La plupart avaient des tatouages en henné comme Chilla.

Ce lieu était vraiment très très différent de la France. Mis à part l'impression de manque d'hygiène que me procurait l'endroit, je devais bien admettre que ces lieux étaient hors du commun et pas dans le mauvais sens.
- ...et comment tu vas l'appeler ton gosse? C'est un fille non?

Ça, je n'y avait pas du tout réfléchis en réalité, mais un nom me venait à l'esprit, il était plus symbolique qu'autre chose bien sur, je pensais au nom de ma mère: Félicia. Même si je n'ai pas de sentiments, j'ai un tantinet de respect envers ma mère et son nom, en souvenir d'elle, sera celui de mon enfant.
- Je vais l'appeler Félicia...
- Ah...

Elle se reconcentra sur la route, nous étions maintenant en pleine route de forêt, des arbres qui me semblaient exotiques poussaient de partout et cachaient les rayons du soleil. Nous arrivions dans un village, mignon quoi qu'un peu vieillot... Elle tourna sur une route semblant ne pas avoir été refaite depuis l'antiquité et passa ensuite sur un chemin qui lui n'avais jamais été bétonné! Les maisons autour de nous étaient tout ce qu'il y avait de plus rudimentaires, en pierres apparentes, fleuries, elles possédaient toutes un potager et de petites statuettes de divinités. Nous arrivions ensuite devant deux bâtiments, l'un était tout en béton, par endroit recouvert de mosaïque et possédait un portail imposant. L'autre était une grande maison en pierre apparente aux allures splendides et abritait un magnifique jardin. Chilla arrêta le moteur et déclara qu'il fallait descendre.

L'endroit où elle avait garé sa voiture était un simple parking de terre, très banal. L'air était chaud et me faisait horrible tourner la tête.

Je n'en revenais pas, Chilla se dirigea vers l'immense maison de pierre et me demandait de la suivre: moi je m'attendais à atterrir dans une cabane en plastique vu ce qu'on  montrait de l'Inde à la télévision.

Je la suivait, plus nous avançions plus nous croisions des femmes en tenues traditionnelle et des hommes aux crânes chauves. Nous sommes entrés dans la maison, Chilla enleva ses chaussures et je fis de même.
- Viens je vais te montrer ta chambre et t'expliquer le système de la maison.

Nous nous dirigions vers une chambre au premier étage. La maison de l'intérieur n'avait rien d'extraordinaire, d'ailleurs elle était plutôt sal, la peinture orange des murs partait au moindre coup de vent et le parquet sous mes pieds semblait être centenaire. La décoration était originale, enfin par rapport à la France: très colorée et omniprésente.

La chambre où Chilla m'avait emmener était très simple. Même un peu trop. Les murs étaient vert citron, deux fenêtres laissaient un agréable passage lumineux et les seuls meubles de ma chambre était un matelas, une étagère en bois, un grand miroir orné de mosaïques, un tapis brodé d'éléphant bleus et une statuette d'un dieu portant une bougie parfumée.

Ok.

Bon.

C'était...

Pas comme la chambre que j'avais chez ma tante...

Chilla arrêta mes pensées et posa mes valises contre le mur.
- Alors ici t'es dans une genre de maison commune,  tu vois? Enfin bref... le soir à dix neuf heure tu viens dans la cuisine, c'est la porte à gauche et tu viens nous aider à préparer à manger. La salle d'eau est dans le bâtiment au fond du jardin, il y a aussi une source vers l'entrée si tu as soif.

Elle commença à sortir mais se retourna.
- Ah! sur l'étagère je t'ai posé deux tenues je t'expliquerai demain.

Elle sortit pour de bon.

J'étais toute seule, planté dans la pièce. Mon coeur se serra, comme si quelqu'un l'écrasait dans sa main.

C'était la première fois que ça m'arrivait.

Sa Vie Mon JeuOù les histoires vivent. Découvrez maintenant