Chap13-Kayla

177 13 2
                                    

-Tyron, retirez vos lunettes.
ordonne Mr Filow.

Je ne prends même pas la peine de regarder la scène et continue à scruter le ciel.
Tyron est assis à l'autre bout de la salle de classe, tandis qu'un mec occupe la place qui lui était autre fois destiné. Tyron ne veut plus rien avoir à faire avec moi, en début d'année c'est ce que je réclamais pourtant pourquoi maintenant ça me dérange? Dans tous les cas, pour une énième fois le rebel va finir dehors. Tout ça à cause de quoi, de vulgaires lunettes de soleil qu'il arbore depuis un certain temps.

-Je vous ai déjà dit "non".
lance-t-il.

Quelques chuchotements se font entendre, la plupart des élèves trouve qu'il a du cran. Franchement?
Le professeur soupire et perd patience.

-Vous connaissez déjà la suite, Mr Tep... prenez la porte.

Et comme à son habitude, il se lève et s'en va sous le regard de meufs qui s'extasient et d'autres qui le trouvent tout simplement irrespectueux.
Moi, je veux juste que le cours puisse enfin commencer. Et c'est ce qui se produit suite au départ du grand métis. Qu'est-ce-qu'il lui prend depuis un certain temps? Il n'est plus le même.

-Donc aujourd'hui, nous allons étudier un nouveau thème, assez complex cette fois si. D'où vient la souffrance?
commence le professeur.

Je trésaille. D'où vient la souffrance?
Je ne sais pas. Mais elle m'est bien familière cette émotion destructrice, ce sentiment qui nous met au plus bas, qui peut nous rendre fragile comme agressif, ou encore gaie. Chacun a sa manière de souffrir, il y en a qui l'extériorisent de manière violente ou méchante, d'autres qui en pleurent, certains qui l'ensevelissent sous une joie factice, la plupart qui l'expose au yeux de tous et enfin certains qui en perde la joie de vivre. Ils restent passifs face à leurs existences, ils en sont arriver au point où ils n'arrivent plus à rien ressentir ils n'ont plus le goût de rien. Aucune émotion, aucune sensation. Rien. Et c'est là le stade ultime. Ce stade qui fait de toi rien d'autre qu'une épave qui subit sa vie. Ce stade où tu pourrais bien mourir ça ne te dérangerait pas, c'est là la pacerelle entre la vie et la mort. Tu deviens comme ils diraient: un mort vivant.
Je suis bien heureuse de ne pas en être arrivée là, il me reste encore mon humanité et une mère qui prend soin de moi. Je suis reconnaissante pour ça.
Alors je pourrais bien lever ma main et les époustoufler avec mes connaissances sur ce thème, mais non, je n'en ai pas envi. Je préfère rester là à les regarder débattre sur le sujet intéressée par le point de vue de chacun, mais personne ne peut connaître d'où vient la souffrance à moins qu'il est ressenti dans tout son être. A moins qu'il ne soit arriver à ce stade...

***

Le cours est terminé et là je n'ai pas envi de rentrer chez moi directement, j'ai envi de me poser sous mon arbre fétiche. D'être un peu seule.
Au moment où je me retrouve à proximité, je discerne une silhouette. Tyron?
Quand le métis remarque ma présence il se dépêche de se lever dans l'intention de partir, mais avant qu'il ne puisse faire un pas je commence:

-Tyron tu peux rester si tu veux.
dis-je un peu gênée.

Ça faisait longtemps que je ne lui avais pas parler. Et lui il semble complètement indifférent et fais un pas.
Okay, je sens que je vais regretter ce que je vais faire.

-Tyron, qu'est-ce-qui t'arrive? Ça fait des semaines que tu dors en cours, tu ne traîne plus avec tes potes, tu es désagréable avec tout le monde et que tu portes ces lunettes. C'est de ma faute?

Il soupire et se retourne brusquement vers moi.

-Bordel! Tout ne tourne pas toujours tour de toi! Je fais ce que je veux, si je veux porter des lunettes je les porte, si je veux mal vous parler je vous parle mal! Maintenant fiche moi la paix!
s'époumone-t-il.

Je suis surprise par autant de rage, autant de colère. Il est pathétique et il souffre. Ça me fait mal de le voir dans un état pareil, et il est hors de question que je lui foute la paix. Moi j'aurai aimé qu'on ne me croit pas et qu'on m'aide, il est hors de question que je le laisse sombrer.

- Je veux juste t'aider...

-J'en veux pas de ton aide, occupe toi de ton cœur insensible et va pleurer dans les bras de ta mère. D'ailleurs, quand est-ce que ton père revient te chercher? Parce-que crois moi tes départs n'ont jamais fait de la peine à personne.
débite-t-il.

Aïe. Il veut jouer à ça? Bah crois moi je suis endurante ce ne sont pas tes petites piques qui vont m'atteindre.
Je prends mon courage à deux mains et lui retire ses lunettes.
Je suis... je suis...

-Rends moi ça ou je te jure que...
il grogne.

-Tyron...

Tout d'un coup mon regard s'attendri, ce que je vois fait pitié. Il me fait de la peine comment a-t-il fait pour en arriver là?
Il essaye de me prendre ses caches souffrance, mais je les serre contre ma poitrine.

-Donc... c'est pour ça que tu portes des lunettes. Pour cacher ta tristesse flagrante. Avant j'avais beau te lorgner, mais rien je n'arrivais pas à lire en toi. Mais... là tu es comme un livre ouvert et toi même tu le sais.

Il détourne son regard preuve de sa faiblesse, depuis quand Tyron Tep détourne son regard? Qui est cet homme? Donc c'est lui le vrai Tyron? Désespéré, torturé? Ou est-il juste l'oeuvre de son ra-le-bol?

-Tu es torturé, Tyron laisse moi t'aider.

-Je n'ai pas besoin de ton aide, tu es chiante. Okay, si tu veux mes lunettes garde les! Mais fou moi la paix! Tu ne connais rien de moi, et ce que tu vois là c'est juste passagé donc arrête de faire comme si j'étais un oiseau malade. Restes avec ton seul ami, cet arbre à la con.

Il s'apprête à s'en aller mais je le retiens de nouveau, il finira bien par craquer et accepter mon aide. Je le prends dans mes bras et pose ma jou contre son échine. Il fait froid, mais il est pourtant si chaud.

-Si tu veux que je te lâche il faudra me frapper.

Il essaye de se défaire de mon entreinte mais je le serre encore plus fort.
C'est ce que j'ai toujours voulu qu'on me fasse, qu'on ne me croit pas. Qu'on s'aperçoive de ma douleur. Qu'on m'aide.
Un sanglot. Je sens le faux dur à cuire étouffer un sanglot.

-Kayla...
Il déglutit difficilement.

Je le relâche lentement et il se retourne vers moi. Il retient ses larmes. Je n'aurai jamais cru voir un jour ce mec qui pourtant semblait être dénué de ce liquide, aussi prêt de le laisser s'échapper.
Il ferme les yeux quelques secondes, et elles repartent aussitôt d'où elles viennent.
J'aurai aimé être aussi forte que lui.
J'ancre mon regard dans le sein et la seule chose dont j'ai envi c'est de lui faire perdre cette tête d'enterrement.

- Je vais tout t'expliquer, mais pas ici...

Enfin.

-Où alors?

...

****
Tyron a failli pleurer!

SECRET SUFFERING• Tome2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant