Partie 9 : Révélations (2)

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Quelques minutes plus tard, Giuliana descendit dans le couloir du bas et se mit à faire ouvertement du charme au jeune policier en faction devant la porte. Ce dernier, rouge comme une pivoine, semblait ravi de l'attention qu'il suscitait auprès d'une aussi belle femme.

Les trois garçons parvinrent ainsi à descendre et à se glisser discrètement dans la pièce du fond sans qu'il s'en aperçoive, trop occupé à fanfaronner. Ils passèrent par la fenêtre de la buanderie pour rejoindre la voiture d'Antoine qui était stationnée à l'arrière de la maison et démarrèrent en trombe sans rencontrer la moindre résistance.

- Et bien !, commenta Justin. On ne peut pas dire que ce soit une brigade d'élite qu'on nous a envoyée là. Je crois qu'on a eu raison de vouloir régler ça nous-mêmes...

Baptiste ne lui répondit pas. Il priait pour qu'ils aient eu raison. Pourvu qu'ils réussissent ! Il gardait l'œil fixé sur le smartphone de sa sœur dans l'attente d'un nouveau message qui arriva quelques secondes plus tard.

- Tu dois prendre l'autoroute en direction de Lille !, intima-t-il à Antoine.

Ce dernier ne se le fit pas dire deux fois et suivit le panneau indicateur.

- Par contre, ils nous demandent de jeter ici les balises qui se trouvent dans les billets... et nos portables..., poursuivit-il.

Antoine stoppa la voiture sur un bas-côté et ils s'en débarrassèrent, non sans regret.

- C'était le seul moyen pour la police de nous suivre, annonça sombrement Baptiste en s'asseyant à nouveau sur son siège. Espérons que tout se passe bien...

- Tu as fait le bon choix, le rassura son ami avant de démarrer.

- N'empêche, signala Justin. C'est quand même bizarre qu'ils sachent tout ça... On dirait qu'ils savent tout ce qu'on fait, jusqu'à notre sortie de la maison...

- Tu crois que l'un d'eux nous espionne ?, interrogea nerveusement Antoine.

- Je ne sais pas... Pourquoi ? Tu as des choses à nous avouer ?

- Je n'ai rien fait !, s'insurgea immédiatement l'autre en se retournant vers le siège arrière.

- Arrêtez !, s'énerva aussitôt Baptiste. Ce n'est pas le moment de vous disputer et d'avoir un accident ! On ne peut pas revenir en arrière de toute façon, alors allons-y ! Lucie compte sur nous...

Le reste du trajet se passa dans un silence angoissé, uniquement ponctué du bruit de la sonnerie des messages que Baptiste recevait à intervalles réguliers et qui leur indiquaient la direction à suivre.

La voiture finit par rejoindre les boulevards en périphérie de la ville. A cette heure tardive, le coin était plutôt calme. Antoine dépassait lentement le grand centre commercial quand Baptiste reçut une dernière indication.

- On doit aller à « La Dorcas » ?!, s'étonna-t-il. Je ne comprends pas... Ce n'est pas un hôpital ?

- Si, mais il est désaffecté depuis quelques années maintenant, l'informa Justin. Tu crois que c'est là qu'ils la détiennent ?

- Je n'en sais rien, mais c'est là qu'on doit aller... Ok, Antoine : tu dois te garer sur l'ancien parking à l'arrière de l'hôpital. Après, on devra suivre des flèches...

- Des flèches ?, questionna ce dernier. Qu'est-ce que ça veut dire ?

Baptiste ne lui répondit pas. Il sentait l'adrénaline pulser dans ses veines et il priait pour ne pas avoir joué avec le feu en prenant cette décision. Depuis le siège arrière, Justin posa une main réconfortante sur son épaule.

- On va y arriver, lui assura-t-il.

Il perçut l'angoisse dans sa voix, mais il était content d'avoir son soutien.

Quelques instants plus tard, ils sortaient d'un coin isolé du parking, là où Antoine avait garé son auto pour échapper aux regards indiscrets. Son signalement avait certainement été donné à toutes les voitures de police en patrouille et il ne fallait prendre aucun risque.

Ils se dirigèrent lentement vers les vieux bâtiments délabrés qui se dressaient face à eux. Le jour déclinait fortement à cette heure crépusculaire et ils durent s'éclairer à la lampe torche qu'ils avaient eu la bonne idée d'emmener au cas où... L'imposant édifice, uniquement éclairé par la lune, prenait un aspect fantômatique et le chemin qui y menait était envahi par les mauvaises herbes qui avaient repris possession des lieux, accentuant encore plus le sentiment d'abandon général.

Ils balayèrent les alentours à la recherche des fameuses flèches annoncées. Baptiste et Justin étaient gênés dans leur progression par les deux lourds sacs contenant l'argent de la rançon et furent soulagés d'entendre Antoine s'écrier tout à coup :

- Venez voir ! Je crois que j'ai trouvé !

Il braquait le faisceau de sa lampe sur la façade arrière du bâtiment et on y distinguait une flèche phosphorescente peinte à la hâte.

- Allons-y !

Baptiste s'élança dans la direction indiquée, ses compagnons à sa suite. Les flèches les guidèrent jusqu'à une fenêtre cassée. Etonnamment, c'était la seule du bâtiment à être dans cet état. Il s'agissait sans doute d'un passage créé par des squatteurs. Il angoissa à l'idée que Lucie se soit retrouvée seule là-dedans.

Ils hésitèrent un instant avant que Justin ne se décide.

- Je passe le premier, lança-t-il.

Il le suivit et constata qu'il tenait entre les mains une barre métallique qu'il venait de ramasser à terre.

- On ne sait jamais, déclara-t-il en le regardant.

Baptiste ne dit rien et cria à Antoine de les suivre. Comme ce dernier mettait un certain temps à arriver, il se pencha par l'ouverture juste à temps pour le voir glisser subrepticement dans la poche de son jean quelque chose qu'il venait de ramasser à terre.

- Tu viens ?, s'enquit-il.

- Je... j'arrive, lui répondit son ami d'une voix blanche.

- Tu es sûr que tout va bien ?, lui demanda Baptiste.

- Oui, oui. Je... je vous suis.

Et, tandis qu'Antoine les rejoignait, il jeta un regard entendu à Justin. Il leur cachait quelque chose, c'était évident. Ils devraient l'avoir à l'oeil.

Ils se mirent en quête de la flèche suivante qui leur indiquait de prendre à gauche et ils empruntèrent un couloir étroit qui semblait donner sur d'anciens vestiaires. Tous les locaux étaient vides et l'humidité suintait des murs libérant une odeur âcre de moisi. Baptiste prit les devants suivi de près par Antoine et Justin qui fermait la marche, ne quittant pas son prédecesseur de son regard soupçonneux et épiant ses moindres faits et gestes. Ils furent ainsi amenés jusqu'à un ancien local de gardes. Sur la table au centre de la pièce, le jeune homme se saisit d'un bout de papier qui avait été laissé bien en évidence à leur intention :

« Déposez l'argent sur la table et sortez. Si vous vous êtes montré réglo, vous recevrez un message vous indiquant où est la future maman. »

Ils firent ce qui était demandé et sortirent de la pièce la peur au ventre à l'idée d'avoir été bernés sur toute la ligne. Après avoir rebroussé chemin, ils se retrouvèrent rapidement dehors, en proie à leurs angoisses. Baptiste fixait le téléphone comme si il pouvait y faire apparaître un message alors qu'Antoine s'était assis sur une vielle balustrade, complètement perdu dans ses sombres pensées. Quant à Justin, il ne tenait pas en place : il allait et venait dans tous les sens sans parvenir à se calmer. Les minutes passèrent sans aucune nouvelle quand celui-ci explosa soudain :

- Maintenant, ça suffit !, cracha-t-il en agrippant Antoine par le col et en le plaquant contre le mur délabré derrière lui. Dis-nous où elle est ! Où est ma soeur ?

Où es-tu?Où les histoires vivent. Découvrez maintenant