— J'ai failli avoir peur.
Le tueur déposa un morceau de pain et un verre d'eau sur la vieille commode.
Rassis, le pain. Malgré ma myopie légendaire, je remarquai immédiatement sa couleur terne et sa croûte peu croustillante. Étonnamment, j'en venais presque à regretter le délicieux repas que Lana m'avait concocté pour mon anniversaire, aka un sandwich au thon et au beurre de cacahuète.
Le prénommé Zyan semblait étonné de me voir levée de si bon matin, recroquevillée dans un coin de la cave dans une position de méditation.
Hier, après avoir découvert le pot aux roses, j'avais décidé de rendre les armes. Le criminel n'avait pas eu besoin de prononcer le moindre mot : son sourire sardonique, symbole de victoire, en disait déjà suffisamment. Le cœur lourd, j'étais retournée dans ma tanière en flageolant sur mes jambes, consciente que cette fois-ci, mes petites magouilles ne me tireraient pas d'affaire. Après tout, je ne me confrontais pas à un vaurien de pacotille que même Homer Simpson aurait pu berner, mais à un redoutable meurtrier blindé aux as qui semblait beaucoup plus malin qu'il n'en avait l'air.
— Ça a l'air délicieux, lâchai-je amèrement. Je sens que je vais me régaler.
— C'est les restes que je donne aux chiens errants.
— Les chiens ne sont pas censés manger de pain.
— Et qu'est-ce que tu t'apprêtes à faire ? répliqua-t-il d'un ton cinglant.
Très bien. C'est la guerre.
— Remballez-ça. J'ai perdu l'appétit, mais pas ma dignité.
Le criminel réprima un rire insolent, et une légère fossette se dessina au creux de sa joue.
— Et tu mords aussi ?
— Ça pourrait finir par arriver, oui, déclarai-je en lui lançant un regard menaçant.
— Si ?
— Si vous ne me libérez pas sur le champ.
Il passa une main dans ses cheveux de jais avant de fixer un point derrière moi. Même si cela paraît complètement insensé, à l'instant où ses pupilles quittèrent les miennes, une drôle de sensation se nicha dans ma poitrine, un peu comme un mauvais pressentiment. Le tueur me lança alors un regard glacial, privé de cette habituelle malice sournoise dont il avait le secret. Je tâchai de faire bonne figure, mais cette transition brutale me flanqua des sueurs froides. Physiquement, la distance qui nous séparait restait moindre, mais psychologiquement parlant, il semblait à des kilomètres d'ici. Soudain, sa mâchoire carrée se crispa, et le verre qu'il tenait entre les doigts explosa. Je poussai un cri de surprise tandis qu'il serrait les poings, si fermement que des éclats pénétrèrent dans sa paume. Un long silence s'installa, à l'issue duquel le meurtrier secoua vivement la tête. Il s'agenouilla auprès de moi, et releva mon menton pour me confronter.
— On vient à peine de faire connaissance, ce serait dommage de te laisser filer maintenant, non ?
Le criminel coinça mon visage entre son index et son pouce, et le souffle brûlant que je reçus sur ma peau me glaça jusqu'aux os.
— J'ai des contacts et un très bon avocat, je n'hésiterai pas à vous envoyer au tapis !
Il se tordit de rire et se releva rapidement, toujours face à moi.
— Et tu comptes faire comment ? Rejoindre la terre ferme à la nage ? J'ai hâte de voir ça ! Surtout n'oublie pas de me prévenir si tu te noies, que je me marre un bon coup !
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Romance- Donne moi ton portable, m'ordonna-t-il d'un ton froid qui me fit presque sursauter. Face à cet inquiétant bourbier, et en dernier recours, je décidai de dégainer ma botte secrète, une arme imparable qui en effrayait plus d'un : mon humour. D'une v...