14. La jeune fille aux cheveux corail

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La nuit était déjà tombée lorsque je posai un pied dehors, suivie de près par Meallta qui ne me lâchait plus d'une semelle. La pseudo-robe écrasait mon corps et ma peau, déjà légèrement rougie par les abus physiques, se recouvrit de frissons désagréables sous le regard insistant de mes ravisseurs. Mal à l'aise, je me dandinai nerveusement pour cacher le plus d'attributs possibles, et cette tâche s'avérait si complexe que je ne remarquai pas immédiatement la moue moqueuse de Schérazade, du type vipère aigrie qui crache son venin sur ses têtes de turcs.

Des froissements de pas rapides se firent entendre juste derrière nous, tandis qu'une dizaine d'inconnus finissaient de charger les carrosses d'énormes cartons . Le criminel, qui s'était absenté quelques instants pour pénétrer dans une bourgade voisine, revenait accompagné d'un homme frêle à l'homme paniqué.

- On est parti ! déclara-t-il avec entrain.

Il donna une grande tape dans le dos du pauvre monsieur qui manqua de s'affaler sous l'effet du choc, avant de se tourner vers moi. Son regard me longea de haut en bas, puis il explosa de rire, déclenchant ainsi l'hilarité générale.

— Crève saloperie, laissai-je échapper.

Merde. Pause. Retour en arrière.

Le temps se figea, à croire que même-lui craignait mon châtiment. Mes trois bourreaux me firent face, unis par cette ficelle meurtrière qui me pétrifiait. Même leurs sbires avaient cessé de s'activer pour me dévisager, l'air stupéfait. C'était comme si des dizaines de Tobirama avaient entendu un Uchiha dire qu'il allait devenir Hokage.

— Je serai curieux que tu répètes ça, grinça le tueur d'une voix vibrante qui cloua le bec de tous les êtres vivants présents en ce lieu.

Je tentai de prendre une grande inspiration avant de rectifier le tir, mais le haut de la robe déclina l'opération. Tant pis pour l'oxygène, il me fallait trouver une parade sur le champ si je voulais pas que l'assassin me fasse manger le sol.

— Trêve de plaisanterie, repris-je d'un air on ne peut plus sérieux. Voilà ce que j'ai dit.

En voilà une réplique qui claque !

Les membres de ce trio infernal se regardèrent à tour de rôle, communiquant seulement par leurs pensées sans doute infâmes. Une bouffée de chaleur s'empara de moi lorsque le tueur amorça un mouvement suspect et rythmé, slalomant rapidement entre ses sbires jusqu'à arriver à ma hauteur. Il glissa derrière moi avec adresse et, dans un instant de terreur inexprimable, passa son bras autour de mes épaules, avant de plaquer sa chaussure formelle sur mon pied droit, rebroyant ainsi mes os déjà broyés. Lorsque mon regard croisa le sien, l'espace d'un instant, je crus qu'il se réveillait d'un long et douloureux rêve. Bizarrement, il me relâcha presque immédiatement.

— Je suis sympa, donc je te laisse décider dans laquelle tu veux monter, déclara Meallta en pointant deux sortes de limousines du doigt.

Laissez-moi rire doucement...

Je ne pourrais énumérer le nombre d'erreurs que comporte cette phrase, seulement les noter dans mon carnet de blagues à ressortir de temps à autres. D'autant plus que me demander de choisir entre ces deux véhicules, c'est tout comme proposer à un restaurateur en crise de passer les dix prochaines années avec Philippe Etchebest ou Gordon Ramsay.

Déconcertée face à un tel culot, je haussai les épaules. Meallta redressa sa cravate et me poussa dans l'une des deux voitures, dont l'intérieur, muni d'un écran plat et d'un minibar avec des cocktails visiblement délicieux, était tout aussi luxueux que l'extérieur.

— De l'autre côté de la rive. Et magne-toi, ordonna le tueur au pauvre homme, qui s'avérait donc être le chauffeur.

Assise à côté de Schérazade, je me tortillai pour baisser le tissu de la robe sur mes cuisses tandis qu'elle dégotait un miroir de poche pour appliquer une énorme couche de rouge-à-lèvres rouge. Lorsqu'elle me cracha de regarder ailleurs, je reportais mon attention sur le tueur qui tapotait nerveusement sur l'écran de son téléphone portable.

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