CHAPITRE 24 - JOURS 111 À 116 - EN MISSION

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Clarke avait la migraine en se réveillant et elle ne la quitta pas de la journée entière. Telle une amie un peu faux cul qui vous souffle à l'oreille 'je t'avais prévenue', elle redoubla même lorsqu'elle croisa les yeux de son chef d'unité.

Heureusement pour la jeune femme, l'un des rares avantages à avoir été élevée par sa mère, était qu'on apprenait très vite à faire illusion. Aussi se comporta-t-elle tout à fait normalement alors qu'elle avait envie de hurler.

Elle fit la connaissance des autres personnes de son unité. Ils l'accueillirent à grand renfort de blagues lourdes sur les infirmières sexy. Clarke joua le jeu et leur rentra dedans, sans se laisser marcher dessus. Elle savait que c'était le seul chemin vers leur coeur. Et c'était très important de s'entendre avec ses camarades, pas seulement parce qu'elle était leur médic' et que leur vie pouvait dépendre de ses performances, mais parce qu'elle aurait besoin d'eux tous les jours pour ne pas devenir folle.

Ils étaient partis de la base tôt le matin en car pour rejoindre l'aéroport militaire le plus proche. Là bas, le caporal Blake leur avait dit à quel point il était fier de repartir en mission avec chacun d'entre eux. A l'évidence, il était très proche de ses hommes. Il avait également officiellement introduit le soldat Griffin aux autres, leur ventant son excellente performance à l'entraînement, et leur assurant que ça compenserait son manque d'expérience sur le terrain. Clarke avait eut envie de le gifler quand il avait parlé d'elle sur un ton condescendant.

Quelques heures plus tard ils prenaient place dans l'énorme avion cargo en partance pour l'Afghanistan. Clarke, dans les airs, ne ressenti aucune pression. Elle savait que le trajet jusqu'à la base centrale américaine n'était pas le réel commencement de sa mission. Une fois sur place, ils passeraient quelques jours d'acclimatation au centre avant d'être envoyés à un avant poste pour les trente prochains jours, durée de leur mission.

Des heures durant, elle observa son environnement et ses camarades. Chacun s'occupait comme il pouvait : Hughs lisait a la lueur d'une lampe de poche, Brown écrivait une lettre concentré uniquement sur sa tâche, la plupart écoutaient de la musique en somnolent. Et le caporal ... le caporal la regardait elle. Il la fixait comme s'il tentait de savoir si elle ferait l'affaire. Si elle ne craquerait pas. C'était son boulot d'analyser chacun de ses hommes, de déceler la moindre faiblesse qui pourrait coûter la vie du groupe une fois sur le terrain. Le moindre faux pas et on revenait en étant l'ombre de soi-même, ou pire encore on ne revenait pas du tout.

Clarke soutint son regard aussi longtemps qu'elle le pu. Elle voulait lui prouver qu'elle était prête. Pas le moins du monde affectée par l'ombre qui planait entre eux. Ce fut lui qui détourna les yeux, un sourire énigmatique sur le visage.

Lorsque Clarke posa un pied en dehors de l'avion, elle fut écrasée par la chaleur. Son équipement pesait une tonne et elle loua le seigneur que toutes ces couches de vêtements cachaient à quel point elle transpirait à grosses gouttes en dessous.

Dans le camion qui les conduisait à la centrale, Clarke découvrit avec un mélange de peur et de mélancolie un pays dévasté par la guerre. C'était une chose que de l'apercevoir à la télévision, mais le voir de ses yeux en était une autre. Les enfants jouant au milieu des décombres, les femmes qui crachaient sur leur passage, les hommes qui les observaient de loin méfiants. Au pays, ils étaient des héros, ici ils inspiraient la crainte.

"Eh la nouvelle," lui dit Hugues en lui donnant un coup de coude. "Il n'y a pas d'entraînement qui puisse nous préparer à ça, pas vrai ?"

Clarke resta pensive un instant, reportant son attention à son environnement.

"Ouais," approuva-t-elle simplement.

"Tu verras on s'y habitue," continua-t-il en posant une main rassurante sur son épaule. "Enfin autant qu'on puisse s'habituer à ça."

La base centrale n'était pas du tout comme l'avait imaginé Clarke. C'était immense, des camions circulaient d'un bout à l'autre de l'énorme campement et les gens se déplaçaient comme dans une fourmilière. Elle mit quelques instants avant de se rendre compte que les autres récupéraient déjà leurs affaires pour se mettre en mouvement.

Leur unité était affectée dans une tente où seul un paravent la séparait de ses compagnons. Ça ne dérangeait pas Clarke, elle préférait ça que d'être tout le temps séparée d'eux, ce qui la mettrait indéniablement à l'écart. Chacun s'installa et Clarke les entendit plaisanter sur qui allait se prendre la première balle. Ça la mit mal à l'aise, le fait qu'ils rigolent de leur potentielle mort, mais elle comprit très vite que c'était leur manière à eux de dédramatiser la situation et de relâcher la pression.

Les deux jours qui suivirent furent remplis de briefings et de sessions d'entraînements. Le caporal Blake leur expliqua qu'ils étaient envoyés au nord du pays pour veiller sur la sécurité d'une petite communauté, souvent mise à mal par les rebelles ennemis. L'après-midi, lors du pic de chaleur, il les faisait courir plusieurs kilomètres en équipement complet et le soir, Clarke voyait arriver avec horreur le moment de se glisser sous le jet d'eau glacé pour se décrasser. Elle était déjà fourbue et exténuée avant même que ne commence la vraie mission.

La veille de leur départ pour l'avant poste, elle se tourna et se retourna sur sa couchette. Elle entendait Benjamin ronfler comme un sonneur, bercé par l'insouciance du sommeil. La tente était plongée dans l'obscurité et tous semblaient dormir sur leurs deux oreilles. On lui avait dit que c'était la dernière nuit où elle pourrait dormir sans souci d'une attaque ennemie et qu'il fallait en profiter au maximum, mais le stresse repoussait inlassablement les bras de morphée.

Excédée, Clarke repoussa le drap fin qui la recouvrait. Elle était vêtue d'un shorty qui lui arrivait à mi-cuisse et d'un t-shirt frappé du logo d'un groupe de rock qu'elle idolâtrait quand elle avait quinze ans. Elle enfila ses chaussettes et ses rangers, sa veste de treillis et sortit dans la nuit. Elle marcha quelques minutes, sans réel but que de s'aérer et de se changer les idées.

Elle allait regagner sa tente quand elle sentit plus qu'elle n'entendit quelqu'un qui s'approchait. Bellamy Blake se tenait à l'entrée d'un petit baraquement qu'il avait le privilège d'avoir en tant que chef d'unité. Il l'observait de ses yeux perçants et Clarke ne put s'empêcher de frissonner. Il s'approcha silencieusement d'elle et lui demanda dans un souffle pourquoi elle ne dormait pas.

Elle ne répondit pas, parce que c'était hors de question de lui donner la satisfaction de verbaliser devant lui qu'elle avait la trouille de ce qui l'attendait demain. Et puis de toute façon elle savait très bien qu'il n'était pas dupe. Il soupira et s'accroupit pour ramasser une poignée de poussière.

"La première nuit avant le début de ma mission je n'ai pas pu dormir non plus," il marqua une pause en se détournant à moitié d'elle. "J'étais terrifié et complètement paumé, je remettais tout en question : mon engagement, mes motivations et mes capacités."

Clarke le laissa parler. La force et la tranquillité dans sa voix avaient quelque chose de rassurant.

"Je sais ce que tu penses," affirma-t-il tranquillement et Clarke ne douta pas un instant que ce fut vrai. "Je ne te laisserai pas tomber Clarke."

L'utilisation de son prénom la bouleversa. Comme si la nuit, quand personne d'autre ne pouvait les voir, il redevenait le frère de sa meilleure amie, celui qui avait caressé sa peau avec déférence, celui qui l'avait rendue désirable pour une nuit.

"Je te ramènerais chez toi saine et sauve."

Il ouvrit la main et la poussière s'éparpilla dans l'air frais. Il marchait déjà vers son baraquement, sans un regard en arrière pour elle. La jeune femme retourna sur sa couchette. Allongée sur le dos, elle pensa à ses paroles. Il ne pouvait pas tout anticiper, ne pouvait pas empêcher une bombe d'exploser, une balle perdue de l'atteindre et pourtant... Pourtant la peur s'était envolée, remplacée par une confiance aveugle en son commandant. Elle ferma les yeux et trouva enfin le sommeil.

*** Et voici le nouveau chapitre de cette fanfic !
La première mission de Clarke, comment trouvez vous qu'elle s'en sorte ? Et cette petite scène avec Bellamy ? Je ne voulais pas qu'ils ne se parlent pas pendant tout un chapitre, alors je me suis dit que ce serait chouette que ce soit celui qui la rassure non ? 
La suite arrive bientôt ! 
N'oubliez pas de me dire ce que vous en avez pensé et d'appuyer sur la petite étoile en bas du chapitre ! 
WSC.

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