Une sensation désagréable emplit son corps tandis que Yorda se réveillait. Cela avait peut-être à voir avec l'odeur âcre qui planait dans l'air. Un mélange de terre fraîchement retourné et de pourriture. La venaison ne sentait pas si mauvais et les fermiers ne toucheraient plus à leurs terres avant deux saisons. La reine se redressa vigoureusement de son socle en granite, gardant son manteau d'ombre enroulé contre son corps frêle pour la maintenir au chaud. Elle enfila une robe chaude puis, d'un pas rapide, elle marcha jusqu'au balcon de sa chambre.
L'air glacé la frappa au visage. S'accomoder froid soudain n'était pas chose aisée. Surtout lorsque ce ne devrait pas être le cas. La fin de l'été est toujours doux, ici. Et voilà qu'en quelque jours, pluie, vent viennent troublée la transition des saisons.
En s'appuyant contre le muret de pierre, elle s'enquit à chercher d'où pouvait provenir pareille puanteur. Plus bas, les gardes patrouillaient comme d'habitude, le peuple s'affairait dans tous les sens et des bardes chantaient de sinistres couplets dans les rues. Rien près du château ne pouvait justifier pareil parfum. Plus loin en revanche, derrière la première muraille, une foule s'était rassemblée et des gardes s'accumulaient autour du cimetière.
Intriguée, Yorda sortie aussitôt de sa chambre et descendit les escaliers pour rejoindre le grand hall. À peine avait-elle posé les pieds sur le marbre que des servants l'assommèrent de questions qu'elle esquiva sans un mot avant de sortir. Elle enroula ses pieds ainsi que tout son corps à l'exception de son visage de son épaisse ombre, et entreprit de se rendre au cimetière sans s'arrêter pour qui que ce soit en chemin.
Les gardes la saluèrent tandis qu'elle passait la première muraille, mais aucun ne commenta sur l'odeur ou l'attroupement non loin d'eux. Yorda marcha lentement jusqu'à la foule qui échangeait à voix basse multiples consternations. C'est en se décalant d'eux pour mieux voir qu'elle comprit. Les tombes avaient été ouvertes. Certains corps, sûrement trop frais, laissés au sol. Les autres, clairement emportés par quelqu'un ou quelque chose. Malgré son immensité, le cimetière entier venait d'être profané. L'apercevant, le peuple se jeta sur elle tout en la noyant de questions et d'inquiétudes.- Ma reine ! Comment ont-ils pu pénétrer la deuxième muraille ? s'étonna un fermier. Et sans se faire voir ?
- Qui a bien pu faire cela ? demanda une femme d'une voix outrée.
- Avez-vous donné l'ordre d'une telle chose ? demanda un autre.
Yorda secoua lentement la tête de gauche à droite, trop choquée pour répondre. Elle écarquilla ses yeux noirs, en reculant doucement. La lumière venait de jaillir dans sa tête. Le coupable n'était pas bien difficile à trouver, mais si tel était le cas alors la situation se trouvait bien plus grave que prévu. Elle tourna rapidement les talons et remonta en furie au château pour y rejoindre le sous-sol.
L'humidité là-bas lui donnait toujours cette étrange sensation à la gorge, comme si quelque chose la grattait. En traversant le couloir qui mène au cachot, Yorda remarqua que le garde dormait. Il semblait simplement fermer ses paupières, mais il dormait, sa respiration lente et profonde le trahissait. Dans un long soupir, elle le dépassa et traversa les cachots vides puis traversa un second couloir suintant dont les torches éclairaient faiblement les murs, pour finir devant une large porte en bois dont des signes de toute sorte avaient été peints grossièrement dessus. Derrière celle-ci, on pouvait entendre un bruit d'ébullition régulier.- Filyne, ouvrez-moi, ordonna Yorda d'une voix assurée. Je vais devoir recourir à tes services, une fois encore.
Aucun autre son que l'eau bouillonnante ne vint perturber le silence. Après quelques secondes, la reine ne put s'empêcher de se concentrer sur les sons. En fixant son attention, une légère respiration s'ajoutait au bruit ambiant de la pièce. Filyne était là, mais ne lui répondait pas. Une poignée de seconde passa. Elle s'apprêtait à entrer sans son consentement lorsque la porte s'ouvrit en un grincement. Filyne se tenait devant un grand chaudron fumant au-dessus d'un feu de cheminée. Une odeur de menthe attaqua ses narines délicates.
VOUS LISEZ
Cirseï l'exilée
FantasíaCirseï, une jeune archimage remise ses rêves d'aventure et de voyage pour ne pas désobéir aux ordres; protéger l'île. Une île en paix depuis toujours, sans animation ou trouble aucun. Pourtant, une demande bien singulière vient apporter à cette jeu...