La nuit était à peine tombée quand Cirseï rentra chez elle. Étant archimage, un manoir somptueux lui avait été construit et meublé situé en extrémité de la ville. Le bois noir ne le rendait pas le moins du monde accueillant. De grandes et hautes fenêtres tentaient d'illuminer l'intérieur malgré des rideaux tout aussi sombres qu'épais. Le deuxième étage étant inhabité, les carreaux se voyaient poussiéreux et les fleurs des balcons, mourantes. Elle n'avait dû y monter que deux ou trois fois. Quelque chose là-haut la terrifiait. Ou, était-ce simplement trop grand pour se sentir en sécurité ? Bien que plusieurs années séparaient sa vie d'orpheline de sa vie aisée actuelle, elle ne se sentait toujours pas à sa place. Il était inconcevable de se plaindre sachant ce qu'elle avait dû vivre plus jeune, mais ce n'était pas ce que son cœur désirait.
Elle poussa les portes et traversa le hall rectangulaire pour se rendre au salon, qui se trouvait également être sa chambre. Son corps se détendit en apercevant son oreiller. Dans un soupir las, elle se laissa choir dans son fauteuil avant de jeter un œil sur la cheminée. Le feu dans l'âtre brûlait encore, ses crépitements réconfortants brisaient le silence du manoir inanimé. Un rappel violent à sa solitude.
La plupart des archimages qui avaient croisé son chemin préféraient s'isoler. Sans oublier que la reine interdisait formellement aux archimages de se mêler aux bas peuple. Elle n'avait donc pas franchement sympathisé avec l'un ou l'autre. De toute manière, elle n'était pas douée d'éloquence. Et ses tentatives d'approches aux festins royaux s'étaient toutes montrées infructueuses. Il faut dire que l'ego de la plupart des invités frôlaient le ridicule. Pourtant, la présence d'une famille ou de quelconque proche constituait son plus profond désir. Oui, sa famille, celle qu'elle n'avait jamais connue. Celle qui restait un mystère malgré toutes ses recherches. L'elfe l'avait poussé à réfléchir sur ses origines, mais elle n'avait aucun trait physique elfique. Sa chevelure noire et ses yeux bridés, caractéristique propre aux zaïss, ses oreilles arrondies ainsi que ses pouvoirs parlaient d'eux même.
En un coup d'œil bref, Cirseï examina la pièce pour rédiger une liste mentale de ce qu'elle pourrait emporter avec elle dans un petit sac en tissu. Peu de choses marquèrent son esprit, seulement des vêtements chauds, d'autres plus légers pour finir sur quelques petits objets servant à son hygiène et à se parer. Prendre plus rendrait sa charge trop lourde et surtout moins pratique. Or, l'agilité et la discrétion seront de mise lors de son infiltration durant la nuit.
Cirseï se leva et remplie le seul sac qu'elle utilisait toujours. La nuit qui venait de prendre place lui rappela qu'il était temps de dormir. Après avoir tiré les rideaux, elle se coucha sur le canapé moelleux qui faisait face à la cheminée. La chaleur agréable lui réchauffait son corps gelé par les rafales qui faisaient rage dehors.
Les paupières fermées, elle repensa avec pitié au pauvre elfe qui devait grelotter dans sa chambre au palais. Puis s'imagina traverser les mers cheveux aux vents, combattre des monstres hideux pour protéger des innocents, rencontrer toutes sortes de peuples et créatures ! Des endroits et des situations surprenantes, nouvelles ! Comme c'était excitant d'imaginer tout cela bien qu'en réalité, il n'en serait peut-être rien. Ou bien moins palpitant que l'idée qui trottait dans sa tête.
Un courant d'air froid la fit frémir et la sortit d'un sommeil sans rêve. En émergeant, Cirseï constata qu'il faisait complètement noir. Le feu s'était éteint durant la nuit. Une chance, sans cela, rien ne promettait qu'elle se réveille assez tôt. Une sphère lumineuse apparut au creux de sa main tandis qu'elle se levait pour faire sa toilette. Dans un long et bruyant bâillement, elle projeta la sphère plus haut dans la pièce afin de libérer ses mains. Elle se passa un coup de gant d'eau froide avant d'enfiler un ensemble de soie.
Cirseï ouvrit ses rideaux. Il lui fallait déterminer l'heure avec la position de la lune dans le ciel. Aussitôt, une lueur bleue s'engouffra dans le salon. Pratiquement quatre heure du matin. Il fallait se hâter avant que l'aubergiste ne se lève. Elle brossa à la hâte ses cheveux noirs et se coiffa d'une haute queue-de-cheval. Sa crinière, si longue, tombait malgré tous ses efforts au niveau de ses reins. La reine lui avait interdit de les couper sous prétexte de tradition. Quant à Cirseï, elle y voyait un moyen supplémentaire de la tourmenter. Ne plus voir sa majesté n'allait pas troubler son sommeil.
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Cirseï l'exilée
FantasíaCirseï, une jeune archimage remise ses rêves d'aventure et de voyage pour ne pas désobéir aux ordres; protéger l'île. Une île en paix depuis toujours, sans animation ou trouble aucun. Pourtant, une demande bien singulière vient apporter à cette jeu...