Chapitre 12: Le lien

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Alors qu'elle pénétrait le jardin de fleur de son père, Yorda sentit une main forte et rugueuse lui attraper l'épaule. Il s'agissait de Dosh, le sangsaek du roi. Une sorte de dirigeant suprême des armées. La pauvre savait pourquoi il l'arrêtait avant qu'elle n'ait pu aller plus loin, mais préféra feinter l'ignorance. Elle se retourna pour lui faire face. Il portait l'armure impeccable et brillante des grandes occasions. Ses cheveux gris lui retombaient sur le visage, un visage fatigué, balafré, ridé. Soudain, il lui adressa un sourire, laissant entrevoir une poignée de dents cassées.

- Que voulez-vous faire par ici ? demanda Dosh sans se dépeindre de son sourire édenté.

Une multitude de mensonges s'entrechoqua dans sa tête, elle opta cependant pour celui qui serait le plus plausible.

- Je voudrais simplement voir ces étrangers de plus près, monsieur, répondit Yorda en prenant un air innocent et naïf.

Elle savait qu'il avait une fille, et qu'il était un père très aimant, protecteur. Une sorte de papa poule. Jouer l'enfant mignon et bienveillant se transformait en une carte infaillible contre lui. Comme escompté, Dosh eut une moue attendrie.

- Vous avez toujours été de nature curieuse, mmmh ? Bon, si vous me promettez de ne rien faire de stupide, vous pouvez les observer de loin. Mais interdiction de les déranger, suis-je bien clair ?

Yorda se contenta de hocher la tête en souriant en retour, et ne se fit pas prier pour s'aventurer parmi les rosiers, jonquilles, buisson et autres plantes. En tendant l'oreille, elle marcha moins d'une minute avant de trouver ce qu'elle désirait. Son père discutait paisiblement avec l'un des soldats étrangers et le jeune qui l'intriguait tant. Ils se trouvaient tous trois sur le miniponton qui survolait la fine rivière du jardin. Des sons qui lui revenaient, Yorda constata que son père s'exprimait en langage Zaïss, une langue ancienne que son peuple apprenait aux jeunes sans trop savoir si cela servirait. C'est la langue des servants de la justice, tous les peuples se devaient de l'apprendre. La princesse jeta un coup d'œil au ciel. La pluie couvrait ou bloquait tout son un peu faible. Il faisait gris aujourd'hui, mais elle était certaine qu'il n'allait pas pleuvoir. Après s'être un peu calmée, toute sa concentration se focalisa sur eux, éliminant tout autres sources parasitaires.

- Vous avez établi une carte des environs malgré toutes vos mauvaises rencontres ? s'étonna son père, une main sur son menton. La découverte de nouveaux territoires doit vraiment tenir à cœur à votre roi.

Le grand soldat roux haussa mes épaules, sourit, et s'appuya contre la rambarde du pont. Il tentait de cacher son opinion sur le sujet.

- Il agit sur les conseils de son oracle. Le roi lui donne énormément de crédit, je me dois de lui faire également confiance. L'oracle s'est rarement trompé après tout. Il lui prédit la richesse, de nouveaux horizons, ainsi qu'un destin qui l'attendait loin dans l'ouest, au-delà de nos connaissances des mers. Revenir les mains vides serait un échec trop grand.

- Le dévouement que vous portez envers votre royaume vous honore. Je vais vous offrir une copie de nos cartes. Nous avons aussi un navire prêt pour votre voyage de retour.

- Merci infiniment. Je remercie les dieux qu'il reste des peuples encore bienveillants dans ce monde. Sans ces étranges êtres d'obsidienne, nous aurions triomphé sans trop de perte.

Le roi des Ombres prit alors un air sérieux, et se tourna vers les deux étrangers qui lui faisaient face à présent.

- Une chose importante à savoir ; quelque soit votre destination, les dieux belliqueux sont à l'œuvre. Tout comme les dieux de justice. Tant qu'il y a de la lumière en vous, l'ombre essaiera de l'éteindre. Tant qu'il y aura de l'ombre en vous, la lumière essaiera de l'éclairer. L'un cherchera toujours à corrompre l'autre. On ne sait jamais à qui on peut réellement faire confiance.

Cirseï l'exiléeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant