Cirseï l'exilée

Chapitre 9: Perdu

 Nei regardait les étoiles qui brillaient dans le ciel noir et froid. La prairie dans laquelle le groupe s'était arrêté ne comportait rien que de l'herbe parsemée de quelques rochers. Il grelotta, serra les dents et réajusta son manteau. Au moins, le vent ne les torturait plus comme aux premiers jours de recherche. Mais quelque chose le dérangeait. Les périodes chaudes devaient déjà être là. L'hiver était passé depuis un moment. La sorcière impactait la nature du déséquilibre forcé qu'elle lui infligeait.

C'est frigorifié qu'ils tournaient en rond, et ce, depuis des semaines. Il était presque sûr d'avoir survolé tout le continent sans avoir trouvé la moindre trace de nain. Etaient-ils parties ? Ou éradiqué comme l'avait été Dorone, la ville d'homme il y avait approximativement un siècle ? Il ne restait plus beaucoup de nourriture. Bientôt, il faudrait rentrer et s'expliquer auprès du chaman. Ce serait un épisode gênant où le ridicule les ensevelirait sous une épaisse couche de honte. La colère lui monta.

- Tu as dit savoir lire les étoiles, te diriger grâce à elle et regarde nous ?! Ce n'est plus la peine de mentir, tu peux nous dire qu'il n'en est rien maintenant, maugréa-t-il tout en s'appuyant contre un rocher.

Le dragon albinos émit un court grognement d'irritation. Sa queue se déroula de son corps et sa tête s'éleva du sol en vue de lui asséner un regard sévère.

- Je sais très bien ce que nous avons fait, répondit Rei d'une voix grave et raisonnante. Ce n'est pas parce que nous sommes perdus que nous avons traversé toutes les terres. Les nains ne sont pas où ils devaient être. Eknevar est vide. Ils ne sont nichés dans aucune montagne ou colline, dans aucune grotte ou gouffre.

- Nouuuuus aaaavvons suurvolé trrrois fois les mmmmontagne siiiilenciiieuse, bégaya Mei mollement, rrrriiien.

Sa sœur avait fait de nets progrès, surprenant même, mais elle n'arrivait toujours pas à articuler les mots rapidement. Le bon côté des choses revenait à ne plus devoir faire la traduction pour Rei.

- Nous allons revérifier, encore une fois, dit Rei. Je suis certain qu'ils se trouvaient au sud. Quelque chose nous a forcément échappés. Nous savions que ce serait difficile. Ne perdez pas cette rage qui vous habitait lorsque nous sommes partis. Dormez à présent.

Alors le dragon blanc remit sa queue comme elle l'était avant d'être provoqué et reposa sa tête au sol avant de fermer les yeux.

Une grimace se dessina sur le visage de Nei. Ce n'était pas un cavalier, encore moins un chevaucheur de dragon. Ces deux semaines étaient les pires de sa vie. Les écailles de sa sœur avaient écorché multiples parties de son corps, et ses fessiers lui procuraient des douleurs aigües lorsqu'il s'appuyait dessus. Son corps s'habituait et se durcirait à la longue, mais pas assez rapidement pour que cela devienne supportable. Et voilà qu'on lui annonçait que cette souffrance repartait pour deux semaines de plus. Il jura entre ses dents.

Le lendemain, une fine pluie les tira de leur sommeil. La température se montrait plus clémente que la veille. Après que Mei et Rei aient chassé leur déjeuner et que Nei ait mangé le sien sorti du sac de provision, ils se mirent en route pour une seconde recherche. La prairie où ils avaient passé la nuit se trouvait non loin de la tour grise. Ils commencèrent là, puis volèrent vers les montagnes du roc. La seconde visite infructueuse, le groupe se dirigea jusqu'aux forêts des arbres morts. Là, ils constatèrent qu'une ville d'ombre s'y était établie. Chose qu'il n'avait pas vue au premier passage. Ils longèrent ensuite la rivière de Beldera pour remonter jusqu'au lac de Sennam qui se voyait bordé d'arbres d'un vert foncé intense. L'eau pure qui brillait là rappela à Nei que sa gourde ne contenait plus rien. Il cria à sa sœur de se poser, qui bientôt, plongea vers le sol. Le dragon blanc ne tarda pas à remarquer ce que faisait Mei et la suivie, lui aussi avait soif. Il se posa un peu plus loin qu'elle et s'abreuva aussitôt. Une tâche qu'il abhorrait sous cette forme.