Âme contre âme

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                                    Carter

C'est comme chercher à observer le soleil en plein midi. De poser le regard sur la splendeur d'un ange venant du ciel. C'est sentir des rayons lumineux qui empilent des milliards de millions de milliers de décharges électriques traverser la surface de notre peau. C'est aussi fixer les étoiles, être séparé de la pesanteur tout en flottant dans l'immensité pluridimensionnelle de la galaxie. C'est d'être tétraplégique sous l'éclat de l'infinie. C'est voir la perfection en face. C'est vivre la théorie de big bang en une seule nuit. C'est fabuleux, c'est sentationnel. C'est magique !
— Salut.
  Je la contemple tellement que ses mots m'importent peu. Sa robe rouge découpée ne couvre qu'en grande partie son bas et se délimite jusqu'à sa poitrine, laissant dans son dos des files entrelacés sur lesquels je pourrais tirer d'un simple geste et découvrir les endroits inexplorés de son monde.
— Heu... oui, oui, Salut ! Tu es...
  Ses cheveux roux ont été dénaturés de la plus mirobolante des manières.
Je ne trouve pas les mots.
— Tu es... wow... tu es resplendissante.
— Merci.
  Je me lève rapidement et tire sur sa chaise pour qu'elle s'y mette. Le Carter gentleman est de retour !
Non... son Carter gentleman !
— En fait, je croyais que...
— Je n'allais pas venir ?
  Elle termine ma phrase avec le sourire timide et dévastant qui m'acharne chez elle. Ce sourire qui m'a amplement manqué.
— Oui. J'étais impatient et tu ne m'avais pas répondu lorsque je t'ai proposé l'heure.
— Je sais. Mais tu me connais.
  Elle se tient droit sur son siège, c'est une top modèle, ou préférais-je dire, une vraie déesse.
— Dis... Comment va ta mère ? Ta journée a été parfaite ?
  Je vais un peu trop vite.
Une question à la fois mec. Une à la fois.
J'inspire puis expire discrètement. Je repose mon regard sur son visage. Mon Dieu ! Elle n'est pas réelle cette femme. Son rouge à lèvres, sa coiffure, ses boucles d'oreilles, sa façon à elle de tourner la tête, il y a tellement de détails qui la rendent si spéciale.
— Elle va bien. Ma journée ne m'a rien apporté de nouveau. J'essaie juste de passer du bon temps avec ma mère. Et la tienne ?
— Je suis sur le point d'acheter l'une des plus grandes entreprises de New York donc... ça tourne dans ma tête à longueur de journée.
— Ah j'imagine. Je suis contente pour toi. Pour ton évolution je veux dire.
— Merci.
  La dernière fois qu'il était question de son travail, je me suis fait exploser. Devrais-je recommencer ?
— Sinon, et toi, comment ça va avec ton boulot ?
  J'inspecte le menu afin de m'accrocher, attendant l'arrivée de la tempête.
Elle m'imite avant de s'illustrer.
— C'est moyen mais je me réjouis bien de mes efforts, j'ai beaucoup travaillé pour ça. C'est ce que j'ai toujours voulu.
— Bien. Cela me fait plaisir.
  Le serveur intervient et nous commandons.

Abby

Passant par les jugements de ma mère sur ma robe dénudée et le regard mitrailleur de Carter, la chaleur du restaurant ne fait que s'accroître. Je maudis Emilie de m'avoir poussé à faire choix de ce... sous-vêtements !
  Panique pas ma belle, dis-lui à quel point que tu as la boule depuis qu'il n'a pas posé ses mains sur toi. Tu l'allumes grave.
Tu peux la fermer, oui ?
Nous savourons nos plats comme nous nous imaginons en train de savourer l'un l'autre dans notre tête. En tout cas, c'est ce que me renvoie mes hormones.
  Tu es sérieuse là ? Du sexe ? Après tous tes sempiternels combats ?
Tu te détruis, Abby ! Tu t'offres un putain de suicide !
No to suicidal.
Hasard ? Coïncidence ?
Les verres offerts par le serveur pour vider notre boisson sont bel et bien gravés par cette tirade.
Elle est partout cette marque, non ? Belgique, et Maintenant, New York.
— Tu t'en souviens ?
  Il pointe du doigt l'écriture imprimée sur le petit crystal.
— Oui.
— La dernière fois qu'on l'a lu on avait décidé de marcher un peu.
— Et maintenant qu'est-ce que je dois savoir d'autre à ton sujet ? C'était la raison de notre balade, tu voulais m'en dire plus sur toi.
  Il humecte ses lèvres avant de répondre.
— Sortons. Allons marcher. J'ai beaucoup à te dire.

Carter

— Tu m' manques, tu sais.
D'où tu sors ça mec ? Putain !
Mais quel con que je suis.
Je voulais éviter de me faire embrouiller mais ma bouche a décidé autrement. J'ignore complètement ce que peuvent être les conséquences. Outre, quelques verres à notre table me suffisent pour affronter mes peurs.
— Je...
  Elle marche sur ses mots.
— Tu n'es pas obligée de répondre. Sinon, ne te gênes pas de dire ce que tu ressens, je peux encaisser le fait que je ne t'ai jamais manqué. Que tu ne ressens plus rien pour moi.
  Nous marchons lentement. J'enlève ma veste pour la couvrir contre le froid, mais surtout, des regards pervers de certains connards debout sur le trottoir.
— Arrête de penser ce que je ressens ou ce que je pourrais dire. Dit-elle au final.
— Je ne...
— Stop et écoute-moi.
  Je me tais. Essayant pour une fois d'être un homme attentif.
— Tu n' t'imagines pas à quel point que tu m'a manqué. Tu m'as déchiré, c'est vrai. Mais ce serait me mentir de dire que je ne t'aime plus. Depuis tout ce temps je me bats contre moi pour pouvoir t'oublier mais je n'y arrive pas. Je t'ai vu en rentrant dans ce restaurant et j'ai tout de suite su que mon corps ne demande que toi. Je...
— Chut.
  Je couvre ses lèvres d'un prompt geste avec mon index, et ce dernier chute jusqu'à son menton. Nos souffles s'enlacent chaudement. Son visage m'implore. Nous sommes collés l'un à l'autre à ne plus vouloir s'éloigner lorsque je replace une mèche de sa chevelure sur son front.
En réalité, je ne voulais plus entendre sa souffrance. Je ne voulais plus savoir pourquoi, depuis tout ce temps, je me forçais à croire qu'elle pourrait me haïr.
— Je t'aime Abby.
  En vrai, j'ai eu tort de douter de notre amour, d'avoir causé tout ce bordel dans sa vie, mais sans doute, j'aurai encore plus de tort si je ne l'embrasse pas tout de suite.

Confidence (Tome 1)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant