Chapitre 9

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 CHAPITRE NEUF

Après avoir ramené Elsa dans sa cellule, Aloïs se dirige vers les sanitaires. Il avait besoin d'une bonne douche pour essayer de s'oublier un peu. Sa respiration se fait de plus en plus erratique.

Arrivé devant les douches, il reste planté là, presque fébrile, tentant d'inspirer sans soubresaut. Il commence à trembler. Lever les bras pour se déshabiller lui paraît insurmontable à se moment là. Et puis, une fois dans la douche où pas plus tard qu'il y a quelques minutes, Elsa se trouvait, il ouvre l'eau chaude qui vient s'écraser contre sa peau, ruisselle contre ses bras, ses cicatrices...

Les volutes de vapeur l'enveloppent dans un cocon réconfortant. Aloïs aimait bien prendre des douches brûlantes, ça le détendait. La sensation de piqûre à chaque goutte d'eau qui le touchait lui rappelait son enfance où il était encore avec sa mère. Sa mère... Penser à elle était tantôt un agréable souvenir, tantôt un cauchemar revenu de son enfance pour le hanter.

Il touche ses cicatrices qui striaient ses omoplates. Avec les années, elles avaient bien blanchies et étaient plus fines mais elles ne pourraient jamais s'effacer. Elles seraient présentes pour le restant de sa vie ; Elles étaient lui.

Aloïs ferme les yeux. Il ne sentait plus que l'irrégularité de sa peau sur ses doigts. La violence qu'il a vécu des années plus tôt se lisait à travers ces crevasses, autrefois rouges et boursoufflées, un peu comme la cicatrice d'Elsa. En repensant à elle, Aloïs resserre ses doigts contre le mur sur lequel il s'était appuyé. Il la revoit étalée sur le sol en béton, geignant de douleur, se tenant les côtes. Elle était tellement crispée qu'Aloïs avait tout de suite regretté son geste après-coup. Il ne voulait pas transmettre cette violence dont il a été victime petit mais c'était plus fort que lui... Il était incapable de ne pas faire de mal, c'était dans sa nature. Il lui semble d'ailleurs avoir entendu à l'hôpital qu'il souffrait d'un trouble de la personnalité, c'était peut-être à cause de ça qu'il était hors de contrôle par moments. Parfois, il sentait venir une colère soudaine qu'il avait beaucoup de mal à canaliser et quand elle explosait, il n'était plus maître de lui-même. Mais le pire dans tout ça, c'était qu'il était encore à moitié conscient quand il a frappé Elsa au flanc, car il n'était pas qu'en colère, il était aussi en panique totale à cause d'un prénom bégayé !

Aloïs expire longuement par la bouche pour se calmer, ferme l'eau et va chercher une serviette accrochée au portant non loin de la porte. Il se sèche les cheveux et le corps avant d'enrouler la serviette autour de la taille et de sortir dans le couloir. Avant d'aller dans sa chambre, il va rapidement vérifier par les barreaux de la cellule d'Elsa comme elle se sent. Quand il l'a déposée sur son petit matelas, elle gémissait encore, recroquevillée. Elle semblait s'être endormie, maintenant. Aloïs souffla de soulagement et repartit dans le sens opposé pour aller s'habiller dans sa chambre.

Il faisait beau ce matin aussi Aloïs décide de mettre un tee-shirt orange, son favori. Il avait prévu de sortir les chiens en promenade aujourd'hui dans le Rosa Hartman Park qui n'était pas très loin de l'entrepôt. Une fois prêt, il va déposer une bouteille d'eau à côté du matelas d'Elsa et vérifie que sa porte soit bien fermée à clé avant de mettre en laisse quatre chiens. Il ne pouvait pas physiquement en supporter plus ; il devra faire plusieurs promenades.

Le soleil tape fort sur la tête d'Aloïs mais heureusement que les arbres ne manquaient pas dans ce parc. Les chiens sont heureux de sortir et de pouvoir s'amuser avec les autres chiens des promeneurs. Pour la première fois depuis longtemps, Aloïs était à l'aise et presque apaisé là, assis sur la pelouse, le dos calé contre un tronc d'arbre, laissant ses compagnons vagabonder autour de lui, à jouer. Personne ne le regardait bizarrement, on lui souriait même parfois. Il fait même l'effort de sourire à son tour ou d'au moins faire un signe de tête et c'était vraiment agréable. Au bout d'un moment, il laisse sa tête aller contre l'arbre et ferme les yeux. C'étaient les derniers jours ensoleillés avant que l'automne ne fasse tomber les feuilles et que les pluies transforment la pelouse en glissades. Les oiseaux chantaient joyeusement, la brise faisait bruisser les feuilles et les enfants riaient aux éclats. C'était bon de rester ainsi !

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