Chapitre 12

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 CHAPITRE DOUZE

La nuit est tombée. Et Aloïs n'est toujours pas revenu. Le silence pesant semble étouffer encore un peu plus Elsa qui regarde désespérément dans le vide à l'écoute du moindre bruit de la présence d'Aloïs. Elle est au centre de la cage, complètement recroquevillée sur elle-même ; elle se balance d'avant en arrière en fredonnant une mélodie. London bridge is falling down, falling down... London bridge is falling down, my dear lady... Aloïs lui avait chanté cette chanson il y a plusieurs jours aussi elle continue perpétuellement, comme un mantra, à répéter ces paroles dans l'espoir qu'il revienne au plus vite.

Le froid agresse l'épiderme d'Elsa. Cette nuit est vraiment fraîche et dans le hall, seule, Elsa ne cesse de murmurer sa prière chantante. Aucun signe de vie autour d'elle. Aloïs a dû partir avec les chiens mais il est déjà bien tard et la nuit bien avancée. Que fait-il ? Pourquoi ne vient-il pas la voir ?

Un bruit semblable a plusieurs claquements de portes. Elsa gémit d'agacement. Des chiens qui aboient et quelqu'un qui décrète le silence. Elsa se réveille en sursaut. Aloïs ! Elsa essaie de s'étirer mais ses bras rencontrent tout de suite les barreaux froids de la cage. Ses genoux lui sont douloureux mais elle ne peut pas vraiment changer de position. Elle s'agrippe aux barreaux et attend avec impatience qu'Aloïs vienne la voir. Elle tente tout de même de se redresser mais sa tête touche aussi les barreaux alors que son dos n'est même pas tendu. Puis elle attend. Les bruits s'estompent, les chiens se calment mais encore aucune trace d'Aloïs. Elsa resserre un peu plus les barreaux.

- Aloïs ?, couine-t-elle.

Seul le grincement d'une porte suivi d'un claquement lui répond. Puis, de nouveau le silence.

- Aloïs !, l'appelle-t-elle, les yeux humides.

Rien.

Elsa sait au fond d'elle qu'il ne viendra pas ; il serait déjà venu la voir.

- Aloïs...

Elsa se positionne dans un coin de la cage en diagonale, essayant d'avoir le plus de place possible. Maintenant qu'elle est réveillée, le froid l'assaillit plus que jamais. La faim la rend encore plus sensible. Elsa tremble, sa peau se couvre de chair de poule. Elle ferme les yeux et essaie de se concentrer sur quelque chose qui puisse la faire sombrer à nouveau dans le sommeil. Tout de suite lui vient le toucher d'Aloïs. Sa chaleur qui couvre ses bras. Ses longs doigts fins qui s'attardent sur son grain de peau. Son torse pratiquement plaqué contre son dos dans la douche. Elsa s'endort.

« Je suis assise sur les marches d'entrée de la caravane. Maman est en train de faire la sieste, je n'ai pas le droit de rentrer sinon maman est méchante avec moi. Je tiens dans mes bras mon doudou. Je le sers très fort quand papa me manque. Il est parti au supermarché parce qu'aujourd'hui c'est mon anniversaire ! J'ai sept ans ! Mais il fait chaud aujourd'hui et j'ai très soif. Papa est parti depuis longtemps et je ne peux pas rentrer à la maison... Alors, je câline mon doudou en espérant que papa revienne rapidement. J'ai hâte de manger du gâteau et de boire du soda !

- Hé, petite !

C'est Joey, notre voisin. Il me fait peur. La dernière fois, il a voulu me montrer quelque chose dans son pantalon mais j'ai fermé les yeux et je suis rentrée chez moi. Mais tout de suite, je ne peux pas rentrer chez moi, maman dort.

Joey est gros. Et il transpire beaucoup. Il sent pas bon non plus. Mais papa a l'air de l'apprécier parce qu'il passe beaucoup de temps le soir avec lui à boire. Parfois, il rentre et il se bat avec maman. J'aime pas ces nuits-là parce que j'ai peur.

- Qu'est-ce que tu fais toute seule ?, demande Joey.

Je me bouche les oreilles et ferme les yeux. Je ne veux pas qu'il s'approche de moi. En plus, comme c'est mon anniversaire, j'avais le droit de porter une robe mais maintenant je veux mettre un pantalon, parce que Joey me regarde bizarrement.

StockholmOù les histoires vivent. Découvrez maintenant