Chapitre 15

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Newton frétillait, balayant de ses orbes noires le beau visage du garçon, Thomas le ceinturant. Il égara un baiser sur la commissure de ses lèvres ; l'humain en fut réveillé. Il démêla le sourire épiant le sien, sa voix sortit rauque en prononçant : « Ce n'est qu'un merveilleux réveil.

- Ce merveilleux réveil qui guette une longue journée... répondit le prince. Nous amènerons Chuck au Gnouf d'ici cinq minutes ; je le vois s'étirer. Il se trouve à une vingtaine de kilomètres d'ici, cela ne nous prendra que la matinée.

- Son fatum m'inquiète... murmura-t-il. Ce n'est qu'un enfant.

- Ne te permets aucun déboire, Tommy. Dès la propagation du sérum, je l'inviterai au château, où il sera en sécurité. A présent nos aventures sont hasardeuses, il sera plus protéger de notre destin au sein de l'Abris qu'à nos côtés.

- Je le sais bien... Bien que je ne le verrai plus jamais...

- Tu as la plus sincère de mes paroles. »

Ils avancèrent jusqu'à l'enfant, Newton harnachait Mistral alors que Thomas s'assurait de son état.

« Sommes-nous prêts ? dit Newton. Bien. Ulysse, chère muse, voudrais-tu t'occuper de mon pégase ? tu monteras devant le garçon.

- Cela dépend du niveau que tu attends de moi. Que suis-je censé faire ?

- Il connaît autant la route que moi. Ton unique devoir est de rester sur son dos.

- Dans ce cas j'essaierai.

- Votre altesse, s'interposa Chuck, aucun sang royal n'honore mes veines ; il m'est interdit de noircir la grandeur de votre pégase par mon impureté.

- Tu es un prodige du Glade, mon enfant. contredit le prince. Tu es semblable à nos confrères, autant que je le suis.

- Votre amabilité ennoblie ma nature, votre majesté... »

Mistral fléchissait obligeamment l'antérieur, Thomas s'aida de ses crins et de son canon pour le grimper, Chuck calquant sa technique. Newton, distrayant de sa main les poils de son chanfrein, éclaircit au cheval : « Nous nous retrouverons au sud de Grenpills, au Gnouf. J'aimerais que tu t'y rendes sans m'attendre. Par la suite nous regagnerons le centre et reverrons Minho et Gally au matin. Ai-je ton accord ? » L'animal poussa un renâclement lent et grave, récoltant sur son encolure quelques caresses.

« Le voyage ne dura qu'une trentaine de minutes. informa Newton. Si tout se déroule sans encombre, j'y serai dans seulement vingt. Vous ne serez point abandonnés à vous-même. »

Plus tard, Mistral arrondissait son encolure, le chanfrein moulé dans la verticale. Son toupet cascadait de son front à ses grands yeux noirs, il l'agitait en frémissant les naseaux avec un soupir fort. Une montagne enserrait un village gargantuesque loin au-dessus de son regard, il accosta ses grandes grilles de fer qui se soulevèrent à sa venue. Le Gnouf leur offrit alors ses jardins florissants, parmi lesquels avaient poussé de pittoresques chaumières. Les voyageurs passèrent près d'une fontaine ornée de statues de bronze à l'effigie des plus vénérables Rois du Glade, Newton se trouvant représenté sur le dos d'un pégase, un collier de chasse au poitrail, tous deux parés de légions d'honneur.
Ils descendirent à l'abord d'une auberge annoncée par une enseigne, où Newton patientait. Le garçon, cerné par les villageois, acclamé de toute part, était courtisé par femmes et hommes. Remarquant Thomas, il s'en défit en souriant, allant baiser sa main : « Comment vas-tu ?

- Très bien, ton pégase est un angelot.

- Voilà de quoi apaiser mon âme. dit-il, lançant un regard à Chuck. Tu as été inscrit au logement de cet auberge, mon enfant. Là, voici ta clef. Tu seras traité avec fraternité.

Entre deux mondes - NewtmasOù les histoires vivent. Découvrez maintenant