Chapitre 17

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La chambre ronde assignée par Seydris n'avait rien d'aussi macabre que ses paroles. Le tapis central couvrait le carrelage, il était orné de fleurs tissées sur le moelleux coton bleu. D'épais coussins enveloppés de satin remplissaient l'étendue du lit sphérique, voilé par un léger rideau garni d'une bordure dorée que l'on pouvait tirer. Il était surmonté de trois fenêtres, longues et contiguës, exposant le jardin grandiose où Seydris n'apercevait rien qui ne fût lui-même. La galaxie progressait au plafond, les planètes inexplorées s'agitaient lentement dans l'obscurité des cieux, tournoyaient près des étoiles et des satellites.
Newton l'observa des secondes rêveuses, puis allongea le rideau. Il se dévêtit et se coucha sur le torse de Thomas, dont les jambes frissonnaient en-dessous des draps poudrés.

« Newton... interpella-t-il subitement, brisant leur silence. Tu m'as menti. Pourquoi l'as-tu fait ?

- T'avoir... menti ?

- Seydris m'a expliqué la force spirituelle qui te protège. Il m'a expliqué que tu savais ton inutilité à ce remède. Pourquoi me l'avoir caché ?

- T-Tommy... Je croyais... que tu allais prendre peur... j'ai pensé te rassurer en m'impliquant dans cette conception, je... je pensais bien faire... Je ne voulais pas t'inquiéter au point de ne pouvoir me suivre... Je te demande pardon...

- Ne sois pas ridicule... Je l'aurais fait, peu importe les conditions. J'avais la possibilité de te côtoyer encore une fois, je ne pouvais pas la décliner à cause de la crainte. Et ton monde est plus précieux que le mien... vous n'avez rien du monde gris, vous êtes tout ce qu'il devrait devenir. Je n'aurais jamais pris le risque de contribuer à son péril, pas après ce qu'il m'a accordé.

- Je le sais, Tommy... je sais ta générosité et ta pureté. Mais tu connaissais le sort que réservent les miens à ceux de ta nature... tu aurais pu prendre panique.

- Il est vrai... mais je connaissais aussi ta force et ta bravoure. Je savais déjà que tu ne me laisserais jamais seul, pas même un instant. Je savais que je ne risquais rien près de toi. »

Il glissa ses doigts le long de son dos, profitant de sa nudité qui faisait frétiller le blond de sensibilité.

« Ce n'est pas le plus important... reprit Thomas. J'ai compris le mal que je te cause, un mal profond, qui s'étend au-delà de mes mots et de mes gestes, qui s'inscrit dans ma destinée. Ce mal qui t'oblige à te scarifier.

- Ce mécréant a voulu que tu culpabilises... grommela-t-il de rage. Me trompe-je ?

- Il m'a énoncé des faits...

- Que sais-tu d'autres ?

- Tout ce que j'aurais dû savoir... Le pouvoir que je te vole, ta tentative de mort, l'anormalité de ta température, tes yeux, tes crises... Je ne sème que de la douleur, je suis incapable de te faire ressentir mon amour, on m'en défend. Je ne mérite rien de toi, je ne le dois pas. C'est pourquoi je devrais mourir, te libérer de mon malheur, te sauver de l'agonie que j'engendre. Je le préfère. »

Il prit le pantalon du prince qu'il avait laissé près d'eux, sortant sa dague de son fourreau en la lui tendant.

« Tue-moi... je t'en prie. Je suis lassé de tes maux, lassé de mon âme. Tue-moi, et je ne laisserai rien de moi.

- N... Non ! bredouilla-t-il. Non, non...! Diable, non ! Q... Que me demandes-tu...

- Ma mort mettrait un terme à tout. Fais-le, fais-le en mon nom.

- Comment... Comment peux-tu... Comment peux-tu m'infliger ces mots...! Tu m'assassines...!

- Newt, je dois mourir... Le sérum sera conçu, ton peuple est sain et sauf. Je n'ai plus aucune utilité, ta souffrance doit être soulagée. Je ne veux plus de ma vie maintenant que je sais ce qu'elle te fait. Tue-moi, ou je le ferai. »

Entre deux mondes - NewtmasOù les histoires vivent. Découvrez maintenant