Chapitre 16

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À trois jours d'arrivée, Thomas scintillait sous l'éclatante Grande Ourse, mêlant à sa conscience d'irascibles repentances. La fin de son séjour s'amorçait indolemment, le renouait à la privation de Newton et de ce bonheur fantastique qui expirait dès le douceâtre rideau du monde gris tombé. Sa nature l'avait astreignit à cette ignominieuse désolation, l'éluder était une utopie indûment pensable. Newton, couché contre lui, tira de ses lèvres un murmure consolant : « Qu'y a-t-il, mon prince ? je vois ton visage si navré.

- Je redoute ce que je serai une fois le Glade rétabli... Je redoute les humeurs qui me bâtiront.

- Tu as su t'affranchir de chaque obstacle qu'on a élevé sur ton chemin. Ta crainte ne devrait pas t'entêter.

- Sans toi ? Crois-tu que je veuille mener une telle vie ?

- Ce que l'univers compte créer se créera, du moins je le pense. »

Il entortilla deux doigts dans ses cheveux bruns, Thomas l'observant par delà un soupir : « Tu aimes cela, me trompe-je ?

- Caresser tes cheveux ? plutôt. Bien que j'aimerais bien caresser autre chose de toi...

- Ne fais pas semblant de ne pas m'avoir compris. rosit-il, ouvrant de grands yeux. Répondre par l'absurde, aimes-tu cela ? Cherches-tu à me perdre ?

- Et toi, aimes-tu l'incessante torture que tu te prescrit ? Ne veux-tu jamais te juger digne de paix ? »

Soudain Minho surgit d'entre les buissons auprès de Gally. Thomas, porté par un élan de frayeur, se dressa sur ses cuisses.

« Je vous dérange, mais cela en vaut la peine. En effet j'amène une question cruciale : quelle voix Mistral a-t-il ?

- Combien avez-vous parié, Gally et toi ?

- Quarante-cinq stoins... répondit honteusement Gally.

- Voilà une belle somme... Eh bien Mistral n'en n'a aucune. Voyez-vous, je comprends ses idées sans même en ouïr une syllabe. C'est de là que découle le fantastique de notre relation.

- Ahy ! fit Minho. Aucun de nous deux n'avez envisagé cela.

- Puisque tu as gagné les deux précédents concernant Newton, c'est à toi de me payer.

- Bah ! c'est un judicieux raisonnement que tu me présentes ! judicieux, mais injuste !

- Pariez-vous sur votre Roi ? sourit mesquinement Newton.

- Nous parions sur beaucoup de sujets, en sincère honnêteté. répondit Minho.

- Les tautologies ne te donnent aucun crédit, au contraire... marmonna Gally.

- Dites-moi, mon prince, pourrions-nous marcher un peu avec votre pégase ?

- Marcher ? au clair de lune ?

- Les vaillants guerriers ne connaissent pas la nuit.

- Pourquoi ne pas plutôt sécuriser les alentours ? Ne voudriez-vous pas vous assurer qu'aucun de ces monstres ne nous guettent ?

- Eh... Eh, pourquoi pas ?

- Minho, veux-tu que nous servions d'appâts ?

- Allons, nous sommes de vaillants guerriers ! Suis-moi, grand gaillard.

- Je vous offre mes remerciements les plus distingués. » 

Mistral secoua sa gigantesque masse, Thomas le contempla étendre ses splendides ailes, noires et luisantes, puis gravir les cieux chargés d'électricité. Ému par les nombreuses marques de son enthousiaste admiration, Newton prélassa sa tête sur ses genoux, mêlant à la légèreté de l'air sa voix tendre : « Tommy... tu n'es pas eux...

Entre deux mondes - NewtmasOù les histoires vivent. Découvrez maintenant