Chapitre 18

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Le retour au palais avait ravivé cette fragile flamme d'espoir que Thomas s'évertuait à étouffer. Gally et Minho s'offraient l'occasion de badiner dans les grands salons, qu'ils garnissaient de rires francs et aigus, de mets savoureux, de danses et de chants vifs. Ils orchestraient un spectacle amusant, de joyeuses inventions sous leurs regards joviaux tandis que Newton avait la tête reposée sur son épaule et la main enlacée dans la sienne. Mais Thomas avait le devoir de décliner cette félicité idéale, elle lui était proscrit, il ne devait pas y prendre goût, ni même lorsque Newton liait leurs yeux et leurs sourires. La déception, l'inanité et les infortunes de la Terre n'en seraient que plus fortes.

« Tommy ? prononça doucement Newton, alors qu'ils somnolaient dans le lit qu'ils avaient partagé des jours plus tôt. Qu'as-tu ? Nous avons passé la journée à folâtrer tous ensemble, pourtant tu me parais tant chagriné... Qu'y a-t-il, mon amour ?

- Nous... n'aurions pas dû succomber l'un à l'autre, hier. révéla-t-il d'une voix faible. Je regrette.

- T, tu... regrettes...? s'affola-t-il, se crispant. Tu regrettes...? pourquoi ?

- C'était le prologue de notre vie, cette vie sans imperfection, celle dont je rêve et qui m'est interdite. Cette journée l'était aussi. Tu ne peux pas comprendre à quel point vivre ce dont on me prive bientôt m'est douloureux. J'aurais voulu effacer ma nature, ce défaut qui me dévore et me rattrape sans délai... mais je n'ai pas ce pouvoir.

- Tommy... murmura-t-il, glissant une main dans ses mèches brunes. Mon tendre Tommy... je te comprends. J'ai les mêmes sensations... je les fais taire, j'essaye, pour abuser de ce semblant de quotidien. Seulement rien ne m'en préserve... je le comprends, mon bel humain... je le vis. »

Thomas l'embrassa, Newton monta ses hanches et cueillit ses joues. Il dit avec délicatesse, secoué par quelques tremblements : « Je t'aime... je le ferai jusqu'à ma mort. Mais tu n'es pas qu'un amour infini, tu es l'unique sens de ma destinée, l'unique bonheur de mon existence. Moi sans toi n'a pas de valeur, ni de plaisir. En as-tu, une fois loin de moi ?

- Je n'en suis pas capable, non.

- Voudrais-tu de moi ? Faire de moi ton quotidien ?

- Voici une question qui détient déjà une réponse. Je le voudrais.

- Malgré les sacrifices que je représente ?

- Tu n'en représentes aucun, mon ange... j'ai perdu ma famille, le monde gris n'a plus rien à me consacrer, ni paix, ni joie. Tu serais un miracle, mais tu m'es interdit.

- T, Tommy, n, non... bredouilla-t-il plus bas. Seydris a évoqué un juste miracle auquel je n'avais osé songer... pourtant il est plausible, il peut être entendu et exaucé...

- Newt, de quoi parles-tu ? As-tu une solution ?

- Tommy, mon Tommy... je t'aime comme je ne l'ai jamais fait, je te dédie mon cœur, ma vie, mon âme si tu les veux. Voilà pourquoi je te le demande... voudrais-tu me combler pour le restant de mes jours, faire de moi ton époux ?

- N... Newt...?

- Le Glade ne rejetterait pas notre union, Seydris l'a sous-entendu... balbutia-t-il, parlant vite. Tu pourrais vivre ici, avec moi, au Glade, comme s'il était ton foyer... tu pourrais m'appartenir, je serai tien...

- M... Mais... cela... cela inclut...

- Que tu deviendrais Roi... à mes côtés. »

Thomas se confondit en silence, en sons sans mots, en perplexité et en surprise. Newton, tâtonnant son torse, hâtait ses consolations, stipulait avec crainte et honte : « Tu ne me dois aucune coercition, ni vœu. J, j'ai seulement cru... cru que...

Entre deux mondes - NewtmasOù les histoires vivent. Découvrez maintenant